La peau est une limite entre Moi et le reste. Elle est une partie de moi mais je suis bien autre chose que mon apparence ; je suis tout une histoire.
Qu’y a-t-il derrière les apparences, derrière les vêtements ou même derrière cette peau ? C’est cette peau comme enveloppe, comme interface qui m’a justement questionnée et m’a naturellement portée vers le concept psychanalytique du «Moi-Peau». Sans en connaître, au départ, le propos, j’ai trouvé l’association de ces deux mots aussi poétique qu’émouvante. «Moi» comme ce que je suis, dans toute ma complexité, et «Peau» cette étiquette corporelle, ce costume, dont je dépends et qui me résume visuellement.
Je ne voulais pas traiter le sujet par du nu, mais plutôt être à la lisière entre le monde extérieur, qui nous entoure, et ce que nous sommes à l’intérieur. La peau est une image. C’est une fragile tenue, un accoutrement sur mesure, elle est tout ce que nous vivons, et tout ce que nous imaginons par-dessus. Elle est tout ce qui nous cache, nous protège, nous dénude ou nous transperce.
À travers cette « épaisseur » et cette texture imperceptible, je voulais écrire l’histoire d’une poursuite, celle de moi-même. Une fiction narrative dont le fil conducteur est un homme mais aussi une femme qui s’entrecroisent, qui se trouvent, qui se soignent dans un monde extravagant aux accents baroques, un passé ré-enchanté, désiré, un peu brouillon comme ma mémoire. Je voulais métaphoriquement mettre en scène ces sensations d’être dans l’entre-deux, les angoisses d’intrusion, les blessures abstraites, le pouvoir du miroir, le sentiment d’appartenance à un groupe, les masques que l’on porte ; toutes ces impressions qui font notre personne, ces multiples couches qui font notre complexité.
Cette série s’intitule « Moi- -Peau » avec deux tirets symbolisant des points de suture entre ces deux mots, car il y a toujours des blessures pour s’accepter dans cette peau.