L’exposition qui lui est consacrée à l’International Center of Photography retrace la carrière et l’œuvre de Roman Vishniac, photographe documentariste des communautés juives d’Europe durant près de quarante ans. Quelques unes de ses images, dont celle de cette enfant aux cheveux bouclés prostrée sur un lit de fortune, éveillent bien quelques souvenirs, mais l’homme demeure aujourd’hui presque inconnu du grand public. Dans la salle en sous sol de l’ICP, c’est une page terrible de notre histoire qui resurgit, mais avec elle des moments heureux d’avant et d’après guerre, les visages d’hommes et de femmes, les sourires et regards de dizaines d’enfants, immortalisés par un celui d’un grand empathique.
Né en 1897 dans une riche famille juive russe, Vishniac immigre à Berlin en 1920 après la révolution qui frappe son pays. En amateur, il parcoure et photographie, non sans une pointe d’humour, les rues de sa ville d’adoption durant les années 20 et 30. C’est là qu’il s’essaye aux rudiments du medium et expérimente les approches modernes de cadrage et composition. Avec la montée du nazisme, Vishniac commence à documenter les signes d’oppression sur le peuple juif, pour ce qui deviendra bientôt la toile de fond d’un travail commandé en 1935 par l’American Jewish Joint Distribution Committee. Un travail symbolisé par de nombreuses scènes et portraits inédits qui sont à découvrir à l’ICP.
En 1941, fuyant une nouvelle fois la guerre, il débarque à New York, où il ouvre bientôt un studio de portraits. Dans le même temps, il débute sa documentation de la vie communautaire juive aux Etats-Unis, pour des photographies qui se démarquent évidemment de celles réalisées en Europe. Une Europe qui attirera pourtant à nouveau Vishniac en 1947, poussé par l’envie de montrer au monde le traitement infligé aux juifs n’ayant pas pu s’exiler. Là, il photographie les camps de familles déplacées, les ruines de Berlin, les survivants de l’Holocauste, leur efforts pour reconstruire leur vie et le travail des organisations humanitaires. Des milliers de négatifs pris lors de ses incursions dans les communautés juives de Pologne, Lituanie, Lettonie, Hongrie, Roumanie et Tchécoslovaquie, qui, accompagnées de correspondances et documents personnels, représentent aujourd’hui la plus grande archive du genre.
Jonas Cuénin
Roman Vishniac, Rediscovered
Du 18 janvier au 5 mai 2013
International Center of Photography
1133 Avenue of the Americas at 43rd Street
New York NY 10036
USA
T 212 857 0045