Extrême Orient…
Si Loin Si Proches…
Écrit par Odile Andrieu
Avant tout, j’ai une pensée particulière pour nos amis qui ont dû annuler leurs manifestations avec les risques que cela comporte, pour les plus connus des festivals comme pour les plus petits, qui ont déjà investi en temps et en argent.
Avec Stéphane Damant, commissaire d’exposition et spécialiste de la photographie asiatique, nous avons réuni des artistes d’Extrême-Orient et des artistes internationaux pour rédiger cette phrase photographique. Cette phrase reprend sans cesse le sujet en question, le sujet tel qu’il évolue dans les différents paysages qu’il rencontre. Le duo espagnol Albarran & Cabrera, à retrouver au musée de Vendôme, se rappelle la légende de Krishna, qui, en ouvrant la bouche, fait découvrir à sa mère toutes les choses de l’univers. Ils mettent en question la réalité telle que nous la connaissons et la met à l’épreuve de nos observations, qui peuvent être parfois biaisées.
Au manège Rochambeau, plusieurs artistes s’attardent sur leurs propres perceptions. Maki Umaba prend sa gémellité en question. Avec sa sœur jumelle, elles sont Futari (deux personnes en japonais) et pourtant la photographe japonaise pense depuis très jeune en termes de « nous ». À travers l’objectif, elle alterne portraits et autoportraits avec sa sœur grâce auxquels elle trouve, paradoxalement, son identité propre. La photographe Coréenne Mi-Yeon, au travers d’images sérigraphiées et d’impression sur papier washi, découvre l’altérité. Elle raconte que lorsqu’elle était à l’école primaire, elle s’est rendu compte que ses camarades pensaient eux aussi en termes de « Je » et étaient le centre de leur propre monde. Cette rencontre photographique et philosophique s’inspire directement de l’ouvrage de philosophe Martin Buber, qui tout comme Mi-Yeon, réfléchi au « I and Thou » (Je et Tu).
Alors que ces deux dernières prennent leurs identités et leurs perceptions en question, d’autres voyagent pour y découvrir de nouvelles choses. L’île de Kyushu est une région volcanique « naviguant entre éclat et apaisement ». Pour la photographe Laura Bonnefous ces paysages révèlent nos « Failles », celles des hommes et de la Terre. Avec des couleurs claires et sensibles, s’enchainent portraits et paysages d’une fragilité qui nous fait révéler nos propres failles. Les failles de l’être humain prennent aussi naissance dans la découverte de la mort. Le spa de Tamagawa photographié par l’autodidacte Tokyote Tsutomu Yamagata, se situe dans une région montagneuse pleine de rochers radioactifs dans le nord du Japon. Alors qu’il se préparait à la mort de son père atteint d’un cancer, il entend parler de cette vallée. Les malades du cancer viennent s’allonger sur ce sol chaud, non pas pour espérer y guérir, mais pour « se préparer à la paix éternelle chez eux ». Cette vallée représente pour les japonais une brèche entre la vie et la mort.
L’association du festival tel qu’il existe depuis quinze ans et d’une thématique liée à la biodiversité et au monde du vivant, « Les Végétales », ainsi que les nouveaux lieux partenaires donnent naissance à CONVERGENCE. Sont ainsi présentés aux Promenades Photographiques Jean Paul Texier et Cyrus Cornut. Le travail de Jean Paul Texier s’intitule « Monde agité », et paradoxalement, il met en scène des fleurs, délicates et immobiles. Ces moments de vie figés nous rappellent la danse effrénée d’Isadora Duncan avec son voile en Mousseline.
Cyrus Cornut lui ne met pas en scène la nature, et se perd dans la forêt. (Lost in the Forest). Il s’incruste dans ce décor dans lequel il est un étranger, lui homme de la ville. Il témoigne d’une nature mouvante, qui se contorsionne, s’étouffe et nous rappelle que nous ne sommes rien sans elle.
Avec le soutien de l’Office de Tourisme de Vendôme et de la région Centre Val de Loire, l’ambition de ce projet est de faire découvrir le territoire Vendômois et ses spécificités haut de gammes gastronomiques patrimoniales, touristiques et culturelles. J’écrivais en 2019 : « Dans la course à l’accélération, il est indispensable de lentement revenir à la pensée, à la réflexion, à l’action mûrie pour sauvegarder nos cultures plurielles… reprendre son souffle pour jouir de la vie quotidienne, se réjouir des partages, réfléchir en conscience aux conséquences nos actes… ». Il me parait aujourd’hui encore plus indispensable de prendre ce temps nécessaire à la solidarité.
Odile Andrieu
Directrice Générale et Artistique des Promenades Photographiques
Promenades Photographiques 2020 – 16ème Édition
30 Expositions dans 10 lieux
De juillet à septembre 2020
Vendôme et alentours