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Poline Harbali

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« Je m’appelle Poline Harbali, j’ai 24 ans et j’étudie à l’Institut Supérieur des Arts Appliqués de Paris en spécialité Graphisme, photographie et illustration. Depuis l’adolescence je suis empreinte d’une quête identitaire relative à mes origines puisque je suis le fruit d’un métissage franco-syrien. N’ayant pas accès à mon patrimoine familial syrien pour des raisons politiques, j’ai toujours fouillé dans le passé de mon père très jeune, à travers des photos notamment mais aussi des traditions, religions et philosophies afin de me constituer, ou plutôt de construire les pièces manquantes. Cette première quête m’a conduite en faculté de philosophie pendant 3 ans. Trois années d’errance puisque voulant comprendre l’immigration de mon père, je me suis à mon tour exilée une première fois à Nantes, puis à Montréal au Canada, et à Barcelone en Espagne où j’ai terminé ma licence de phénoménologie esthétique. Très vite, j’ai compris que mon appréhension identitaire trouverait davantage réponse en mettant en pratique ma réflexion plutôt qu’en la laissant se suffire à elle même. J’ai donc commencé à travailler à partir de vieilles photographies de mes deux parents, comme pour chercher une concordance, une logique esthétique qui les réunirait. En les imprimant sur des tissus, en dessinant par dessus, en les brûlant etc…

Vue de Damas : Puis les événements du printemps 2011 et l’éclatement de ce que l’on appelle  » le Printemps arabe » ont tout remis en question. J’ai pu prendre contact avec ma famille à Damas via facebook pour la première fois et donc appréhender leur réalité et donc la mienne beaucoup plus sincèrement loin des rêveries et des histoires que je me racontais. J’ai demandé à ma cousine de m’envoyer des photos de la vie, non pas des événements qui se déroulaient mais plutôt des lieux de vie communs, une vue de sa fenêtre, des portraits de famille, des vues sur la ville, les places où elle aime se rendre afin travailler à partir de cette matière sensible. Re-photographier des photos. Un acte d’appropriation qui m’a permise non pas de rendre compte d’une réalité qui ne m’appartient pas vraiment mais plutôt de leur montrer de quelle manière je voyais tout cela, d’ici. On ne parle que de la ville en feu, le chaos, la haine et les photos que j’ai reçues étaient empreintes de douceurs. Chaque lieu, personne, place qu’elle m’envoyait avec sensibilité était ici mis en sang via les médias, qu’il le soit ou non sur place. Je voulais rendre compte de ce qu’il se jouait depuis la France.

Souvenirs d’un présente familial et autres douceurs : Puis il n’y eut qu’un pas entre les souvenirs paternels et ceux maternels, pas moins lointains, non pas par la distance, mais par le reste. Les histoires de famille forment et déforment les familles et j’ai voulu comprendre ce qu’il se cachait derrière, en particulier ce qu’il se passe durant les repas de famille, repas de Noël, dîner de retrouvailles etc… Un sourire d’un instant peut cacher une grimace. Et le 125ème de seconde de ma caméra ne me permettait pas de capturer ce que je voyais finalement. J’ai donc commencé à chercher des esthétiques qui rendaient compte de mes racines, des repas de famille où tout se joue et rien ne se dit vraiment. J’ai continué ce travail de re-photographier mes photos, après plusieurs actions comme immersion dans l’eau, les déchirures etc… J’y trouve alors beaucoup plus de sincérité, d’authenticité et même si les photos semblent revenir d’une guerre esthétique et morale, leur sensibilité embellit finalement une famille qui peut-être belle et sincère, même dans ses travers, ses défauts. La quête identitaire n’est pour moi finalement qu’un prétexte à la recherche tout court. Je ne trouverai peut-être jamais vraiment d’où je viens mais les réponses subjectives que je me construis puis dé-construis tour à tour me permettent d’avancer. »
Poline Harbali

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