Après avoir passé les portes du Fort Mason Festival Pavilion jeudi après-midi, ce que je vois d’abord, c’est la lumière. Le bâtiment est vaste, ouvert et élevé avec des puits de lumière et des baies vitrées géantes tout au long qui diffusent partout une douce lumière d’ambiance. En fin d’après-midi, on voit le soleil descendre par les fenêtres du côté ouest, sculpter les contours des stands et dramatiser les préparatifs de dernière minute pour la nuit d’ouverture.
Je suis ici pour les débuts de Photofairs San Francisco, un salon d’art international consacré à la photographie. Trente-quatre galeries de quatorze pays et vingt-deux villes participent, montrant un large éventail de travaux d’artistes anciens et récents. Outre le travail dans les galeries, les tables-rondes, les signatures de livres et les conférences d’artistes, il y a une exposition intitulée Insights: New Approaches to Photography since 2000 qui m’intéresse particulièrement.
Ce n’est pas un secret que le monde de l’art est envahi par les images. Les musées retirent des peintures de grands artistes de leur inventaire, et une génération plus ancienne de collectionneurs a pu ainsi accrocher à ses murs une quantité inépuisable d’œuvres. La photographie, qui est le plus reproductible des médiums, est aussi confrontée aux questions que soulève une source infinie d’images. Alexander Montague-Sparey, co-commissaire de l’exposition, a quelques idées sur la question et dans sa section d’installations il a choisi de montrer surtout des artistes multimédias qui utilisent la photographie dans leur travail plutôt que des photographes traditionnels travaillant uniquement dans ce médium. Les œuvres qu’il a choisies sont en majorité des pièces uniques plutôt que des éditions. Les résultats deviennent évidents lorsque vous parcourez cet espace. Commencez, par exemple, par le travail de Meghann Riepenhoff qui a montré des tirages au cyanotype. L’un est drapé comme un tissu, posé sur une plate-forme surélevée reposant sur le sol, pas une “image” au sens traditionnel, mais une image frappante. Un autre exemple est le tirage de Mehedi Abdolkarimi sur plusieurs surfaces rabotées. Il se modifie avec chaque mouvement et chaque reflet de la lumière. Je pense que vous l’avez compris, c’était une exposition sophistiquée destinée à un public sophistiqué.
La sophistication était évidente dans les galeries aussi. La Galerie M97 de Shanghai montrait le travail de Wang Ningde, des œuvres qui dépendent d’un éclairage dirigé depuis le haut, jetant des ombres complexes qui composent une image. C’est difficile à décrier : ce que l’on voit, ce sont les effets de la photographie, les ombres qu’elle projette plutôt que la photo elle-même. East Wing, une galerie de Dubaï a montré l’œuvre de Jojakim Cortis et Adrian Sonderegger, des artistes qui construisent des miniatures élaborées de photographies célèbres, puis photographient ces miniatures et les tirent à une échelle plus grande que les images originales: ils démontrent ainsi l’artifice de leur travail et créent un paradis pour les théoriciens du complot- si c’est là votre manière de penser.
Andriesse Eyck d’Amsterdam montrait le Caire de Lidwein van de Ven, une très grande affiche montée directement sur le mur, faisant référence à la qualité inamovible des affiches du Printemps Arabe, tandis que la galerie de Berlin Camera Work abritait une collaboration unique entre le photographe Michelangelo di Baptista et l’artiste Tina Berning. Di Baptista a fourni à Berning un seul et unique tirage que Berning a alors été libre d’interpréter comme elle le voulait, en traçant des lignes et en peignant sur la surface du tirage, en soulignant les traits de la femme photographiée – graphique et efficace.
Pour sûr, y avait beaucoup de beauté traditionnelle aussi. La Galerie Photo 12 a montré un merveilleux Polaroid sur feuille d’or de Giovanni Gastel, il y avait une étonnante photo de Sarah Moon en tirage Fresson chez Peter Fetterman et un très rare et beau tirage contact au platine palladium de Georgia O’Keefe par Alfred Stieglitz chez Edwynn Houk. Il y avait beaucoup d’autres exemples comme ceux-ci dans les galeries, des photos venant de partout dans le monde. C’était une exposition très riche.
J’ai passé deux jours merveilleux et j’aurais bien aimé rester plus longtemps. Il faudrait voir en personne tant de ces belles choses. Il ne s’agit plus seulement de tirages photographiques encadrés accrochés au mur: ce qui est intéressant en photo de nos jours, ce sont les cent manières dont les photographes vous montrent la physicalité de l’objet photographique, comme des bords écornés ou plusieurs petits tirages cousus ensemble qui démontrent que l’image est une chose réelle. En fin de compte, je crains de n’avoir omis plus de choses que je n’en ai dites. Il y avait trop à voir et trop à entendre, un problème que je suis heureux d’avoir. Toutefois, si vous voulez voir d’autres aspects du salon que les images qui accompagnent ce compte-rendu, il y a un excellent catalogue en ligne qui peut être trouvé à Photofairs San Francisco.
Pour démontrer leur engagement, Photofairs San Francisco a déjà réservé le Mason Center pour 2018. Je l’ai marqué dans mon calendrier pour y être.
Andy Romanoff
Andy Romanoff est un photographe et rédacteur basé à Los Angeles.
PHOTOFAIRS à San Francisco
Du 27 au 29 janvier 2017
Fort Mason Mason Festival Pavilion
2 Marina Blvd
San Francisco, CA 94123
USA