YANG SHUN-FA (Taïwan, né en 1964)
La beauté submergée de Formose
La beauté submergée de Formose – Partie II de The Island Project – est une série d’images représentant des constructions immergées dans l’eau le long des côtes de Taïwan. En 2014, Yang Shun-Fa a commencé ses enquêtes photographiques de terrain le long de la côte taïwanaise. Lorsqu’il a vu pour la première fois ces maisons en briques au milieu d’étangs à poissons dans le comté de Chiayi, il s’est demandé : « Pourquoi quelqu’un construirait-il sa maison dans l’eau ? » Après des recherches approfondies, il s’est rendu compte que ce qu’il voyait est le résultat du comportement humain et du changement climatique. La surexploitation des eaux souterraines et l’élévation du niveau de la mer ont provoqué un affaissement du sol et une intrusion de l’eau de mer, qui ont tous deux rendu ces maisons inhabitables et le terrain inutilisable.
Les constructions abandonnées sont les conséquences de l’irrévérence humaine envers la nature ; elles représentent également la situation de Taïwan dans les relations internationales. Pour Yang, elles sont autant un avertissement qu’une métaphore : le mode de vie des habitants de la côte est en train de disparaître et Taïwan continue de lutter au niveau international. Il est désireux de révéler cette situation avec son travail. Seulement cette fois, par rapport à ses œuvres précédentes, il choisit d’être moins franc avec son style. Il attire les spectateurs avec des images « pittoresques » méticuleusement produites et les confronte à la sombre réalité qui se cache à l’intérieur.
De plus, Yang alimente le titre en mandarin de La beauté submergée de Formose – Taïwan Shui Mo – avec une touche linguistique, avec laquelle il soulève 3 points. Premièrement, il implique que Taïwan a coulé (水沒), écologiquement et politiquement. Deuxièmement, il se réfère à la forme et à l’esthétique des lavis d’encre (水墨) dans son choix de présentation de ces images. Enfin, il pose la question : « Est-ce que Taïwan est belle ? (« 美嗎? »), Qui ressemble à « 水沒 » et « 水墨 » lorsqu’il est prononcé dans le dialecte taïwanais. Et la réponse est pour le public à contempler.
Né en 1964, Yang Shun-Fa a grandi dans une famille d’agriculteurs à Tainan. Il connaissait les conditions difficiles de la terre et ce qu’il faut pour lutter dans un tel environnement. Après son service militaire, il est entré à China Steel Corporation et y travaille depuis. Il a appris la photographie au club photo de CSC et c’est là qu’il s’est plongé dans le monde de la création d’images. Depuis plus de 30 ans, il a produit des dizaines de projets, dont beaucoup ont été exposés dans de grandes institutions et festivals du monde entier, notamment le Musée des Beaux-Arts de Kaohsiung, le Grand Palais, Paris, la Biennale du Kosovo et la Maison Européenne de la Photographie, Taipei Fine Musée des Arts, Festival de photographie de Lishui, CO4 Taïwan Avant-Garde Documenta.
L’approche artistique de Yang a évolué d’un premier style pictural, à une expression plus subjective, puis à la photographie mise en scène et aux manipulations d’images numériques. Ses expérimentations se sont poursuivies tout au long des années 1990 et 2000. Ses réflexions sur l’atmosphère sociale de l’ère post-loi martiale de Taïwan ont été incorporées dans des projets de documentaire social, d’interventions artistiques, d’art de la performance et d’installations photo. Les travaux notables incluent Reconstructed Kingdom (1993-1997), Rampant Beasts (1998-2002), le projet d’intervention communautaire Embellishing Hongmaogang (2007), Home and Rootless (2004-2008) et The Island Project (2014-en cours).
Ces dernières années, il s’implique à documenter et à représenter son île bien-aimée de Taïwan. The Island Project a été conçu dans ce but en 2014 et Yang Shun-Fa se consacre actuellement sur cet objectif. The Island Project comprend quatre parties : Hommage à Chen Ting-Shih (Part I), The Submerged Beauty of Formosa (Part II), The Submerged Beauty of Formosa—Defending the Nation, the Land (Part III), Taiwan To-Go (Part IV).