Elles sont très dures à regarder, ces photos. Pour la plupart, elles datent d’une époque où j’étais petit garçon, donc je les perçois avec un esprit d’enfant — fasciné, mais effrayé. Elles sont difficiles et empreintes d’un réalisme que les images de faits divers récoltées aujourd’hui arrivent rarement à saisir. Elles n’ont pas été faites pour être consommées gloutonnement, pour satisfaire à un besoin de scoop. Elles l’ont été pour rappeler que quelque chose d’affreux s’est produit et elles font cela très bien.
Et puis il y a les légendes – « Le détective tient la main de la femme morte pour exposer la plaie à son poignet », une photographie d’une femme morte, encore pendue, la corde et sa tête n’étant pas visibles, juste son corps et sa main.
Dans Homicide, 9/13/34, case not available, la photographie représente un lit défait, un cadre de lit en fer, une paire de pieds munis de chaussures et de chaussettes blanches. Les jambes qui les prolongent plongent pour disparaître derrière le lit, leur propriétaire ne compte pas ; seuls ses pieds qui dépassent sont importants. Dans ces photos, les corps s’écroulent, n’importe comment, de manière grotesque — la mort ne laisse pas aux gens le temps de prendre une pose élégante comme dans les films.
La pièce est un espace industriel, le sol est peint d’un rouge brillant, un large panneau électrique est protégé par un treillis métallique. C’est un endroit assez étonnant pour y accrocher des photographies, mais la pièce résonne de la présence de ces images et celles-ci donnent un sens différent à l’espace qui les accueille.
Dans cette pièce, avec ces images, je commence à me demander qui se tient à côté de moi. Le temps que les autres spectateurs passent devant les images devient important. Les regardent-ils de près ? Qu’est-ce qu’ils en retirent ? Je me retrouve à regarder tout le monde d’un peu plus près et je me pose des questions.
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