Une exposition qui questionne sur la notion fondamentale du chef-d’œuvre.
Sylvie Aubenas, conservateur général et Marc Pagneux, collectionneur et expert ignorent volontairement les parcours classiques auxquels nous sommes habitués. Il est ainsi inutile de rechercher une chronologie ou une thématique. Les commissaires affichent délibérément leurs choix : une sélection de 100 photographies qu’ils considèrent comme des chefs-d’œuvre. Ce ne sont pas les images les plus connues, les plus belles, les plus chères qui sont montrées, mais celles qui présentent un intérêt scientifique, formel, historique.
Les photographies exposées sont toutes issues de l’immense ensemble de la BnF dont le nombre d’œuvres est difficilement quantifiable : « estimé raisonnablement à cinq ou six millions d’épreuves ». L’exercice du choix fut donc un « pari risqué ».
La première œuvre exposée, est un dessin photogénique de William Henry Fox Talbot, Feuille de vigne (1839); la dernière est un portrait réalisée par Alexandrine, la femme d’Emile Zola : Médan. Autoportrait avec son chien Pimpin (1895). Quel est le lien entre ces 2 images ?
Le tirage doit être d’une qualité exceptionnelle et la photographie doit avoir une histoire d’entrée dans la collection hors du commun. Ainsi, la mythique photographie de Gilles Caron prise le 6 mai 1968 a été acquise dès le mois de septembre suivant auprès de la galerie Le mur ouvert, ce qui rappelle le rôle de vigie du conservateur.
Correspondances esthétiques, formelles ou intellectuelles.
L’exposition procède par associations. Une photographie figure à côté d’une autre, un cinéaste commente une image. Des groupes sont parfois constitués. L’un autour de la couleur, l’autre autour de la thématique du mouvement. Des associations formelles reconstituées, comme la Vague brisée (1857) de Gustave Le Gray et la Mer de glace (1860) d’Auguste-Rosalie Bisson.
L’autre belle innovation est d’avoir proposé le commentaire des œuvres non pas à des spécialistes, mais à des cinéastes, scientifiques, écrivains et même à des ministres. Et là aussi, c’est un régal. Nous retrouvons des noms aussi divers qu’Anish Kapoor, Roberto Alagna, David Lynch, Anne Pingeot ou encore Isabelle Autissier, Olivier Py, Henri Puig… Tout ce petit monde se rassemble autour de photographies. Et chacun, à sa manière, réinvente l’image, lui donne une histoire supplémentaire qui va au-delà de la collection et de l’histoire de l’art. En regardant la photographie de Weegee, Lovers (1954) où l’on voit le bras d’une femme enlacer le dos d’un homme. David Lynch écrit : « She was telling him that a storm is coming »…Et ainsi se font les grandes histoires !
Sophie Hedtmann
La Photographie en 100 chefs-d’oeuvre
Jusqu’au 17 février 2013
Commissaires de l’exposition : Sylvie Aubenas et Marc Pagneux
L’exposition bénéficie du soutien de la Fondation Louis Roederer, elle a été réalisée à l’occasion du 10ème anniversaire du partenariat entre la Fondation et la BnF. Et c’est d’ailleurs, Frédéric Rouzaud, le directeur général de Roederer et président de la Fondation qui a commenté la photographie de Talbot (La feuille de vigne).
Bibliothèque nationale de France
Galerie François 1er
Quai François-Mauriac
75013 Paris
France
Catalogue
La photographie en cent chefs-d’oeuvre
Sous la direction de Sylvie Aubenas et Marc Pagneux, 2012
Prix : 39 euros