Les photos d’Henri Dauman nous replonge plusieurs décennies en arrière pendant l’âge d’or des grands magazines américains. L’ère est à la fabrication de la belle image. Cadrages astucieux, angles novateurs, approches créatives, c’est dans la technique photographique que se trouve la clé. Fabricant d’ « icônes ». Henri Dauman perd de ce fait le statut de photojournaliste pour acquérir celui de photographe.
La vie d’Henri Dauman est assez étonnante. Il n’a pas encore 10 ans que le drame frappe sa famille. La milice intervient avec zèle dans toutes les habitations où vivent les juifs. C’est la rafle du Vel’d’hiv’ .
Sa mère le cache courageusement alors que le reste de la famille sera déportée vers Auschwitz. La fin de la guerre se passera dans une famille normande à quelques kilomètres des plages du débarquement qu’il vivra au plus près. Dès 1945, avec sa mère, il revient à Paris dans son Montmartre natal. La vie reprend doucement avec tendresse, malgré l’absence son père mort dans les camps de concentration.
En 1946, les journaux font le gros titre sur une affaire douloureuse: « Le pharmacien de la rue Ramey ». Un apothicaire douteux empoisonne une dizaine de personnes avec des drogues frelatées. Henri est touché en plein cœur. Parmi les victimes se trouve sa mère, celle qu’il la sauvé et choyé pendant la guerre.
Il est orphelin et sera placé dans diverses familles. Fuyant les orphelinats, il rejoint à New York le dernier membre vivant de sa famille.
L’AMERIQUE
Il débarque aux États-Unis le 14 décembre 1950. Il n’en repartira jamais. Le jeune Henri Dauman rêve de cinéma mais se décide, par vocation, à devenir photographe. Autodidacte et débrouillard, le petit frenchy séduit et convainc.
Petit à petit, il élargit son carnet de commandes.
Se définissant comme un « One-Man Agency », il revendique sa liberté d’action et refuse tout poste fixe. Il fera d’ailleurs de cette liberté du photographe, une morale et un combat.
Henri Dauman a écrit l’une des pages du photojournalisme américain. Sa carrière a commencé comme correspondant à New York pour France Dimanche, Le Figaro, Paris Match, puis il devient l’un des reporters les plus prolifiques de LIFE Magazineou NewsWeek.
Marilyn Monroe, Brigitte Bardot, Jacqueline Kennedy, Andy Warhol, Elvis Presley ont été, entre autres, des « modèles » de choix. Mais il est aussi le témoin des grandes avancées sociales américaines en couvrant notamment les mouvements Civic Rights, voire les guerres du Vietnam ou d’Indochine. Il suit les Kennedy jusqu’aux funérailles et Nikita Khrouchtchev dans une tournée mondiale historique.
Dans son appartement de l’Upper East Side, des milliers de négatifs, autant de planches-contacts et des centaines de tirages « vintages » reposent silencieusement.
Méticuleusement archivés dans des boîtes ordonnées et annotées, il est temps de les ouvrir et de raconter l’histoire. Un demi-siècle d’événements historiques, des informations visuelles précieuses et rares se trouvent là devant nous.
EXPOSITION
Henri Dauman, The Manhattan Darkroom
Du 4 novembre au 4 décembre 2014
Palais d’Iena
9, Place d’Iena
75016 Paris