Ce mois-ci, l’Association Inimaginable* a sélectionné une photographie de Christophe Gallaire, issue de son reportage sur Mayotte, le 101e département français. L’image s’affichera dans les rues de Paris du 28 janvier au 3 février 2013.
Une image, une semaine, par mois
Christophe Gallaire : Territoire sous haute tension – Mayotte, le 101e département français
Mayotte, 101e et tout dernier département français (31 mars 2011), est aujourd’hui la 3e économie de l’Océan Indien, après La Réunion et Les Seychelles. Avec un taux d’accroissement annuel de sa population estimé à près de 6% par Jean-Louis Rallu, Mayotte compte 212 645 habitants selon l’INSEE (août 2012). La population mahoraise depuis 1985 a triplé. Avec ses 570 habitants au km2, Mayotte est le département français le plus densément peuplé après ceux d’Île-de-France. Par ailleurs, on estime aujourd’hui que les clandestins représenteraient près de la moitié de la population de Mayotte.
Selon un récent rapport sénatorial, ce territoire est au bord de l’explosion : la délinquance générale a augmenté de plus de 442% en dix ans (1998-2008).
L’année dernière, les autorités françaises ont expulsé 26 405 personnes de Mayotte dont 5 389 étaient des enfants, soit plus de 72 expulsions par jour. La seule prison de l’île, à Majicavo, est en surpopulation constante : 211 détenus pour 90 places. Sur 256 personnes incarcérées en mars 2010, 70% étaient des passeurs de kwassa-kwassa, ces embarcations de fortune utilisées pour la traversée de 70 km qui sépare l’île d’Anjouan (Comores) de Mayotte.
À Mayotte, comme le rappelle Pierre Tartakowsky, Président de la Ligue des droits de l’Homme, dans une lettre ouverte publiée le 19 octobre, « les informations funèbres se succèdent et se ressemblent : 16 juillet, 7 morts dont 4 enfants ; 16 août, décès d’un nourrisson au CRA [Centre de Rétention Administrative de Pamandzi, 60 places, en surpopulation constante] après interception d’un kwassa ; le 8 septembre, 6 morts et 26 disparus ; le 8 octobre, 3 morts et 13 disparus dans un naufrage. . . » L’année 2012 n’est pas Vnie et l’on dénombre 109 victimes dont 69 noyades par naufrages au large des côtes mahoraises.
Beaucoup de ceux qui ont la chance de survivre à cette traversée vivent dans une précarité extrême. Comme le dit très justement le Rapport de la mission interministérielle sur le développement du logement social à Mayotte (janv. 2011), « . . .il suXt d’observer les Wancs des collines de Mamoudzou et des communes voisines. Une urbanisation sauvage et insalubre y dévore sans contrôle les espaces encore libres, formant de véritables bidonvilles hébergeant bien souvent une population misérable en situation irrégulière, dans une immédiate proximité avec des logements plus résidentiels en collectif ou semi-collectif, et d’un habitat diUus de qualité en général moyenne ou médiocre. » Selon l’INSEE, les logements construits en matériaux précaires (bidonvilles) représentent 28% des 54 000 logements identiVés en 2007 et se développent des zones informelles dans lesquelles règne une forte insalubrité. En réalité, il se construit tous les jours des « bangas » (baraques) par dizaines. . .
L’Observatoire des mineurs isolés estime leur nombre à 2 922, selon le Rapport du sociologue David Guyot (janv. 2011) : « Le chiUre est moindre que d’autres annoncés [6000 à 7000] auparavant, mais il n’en reste pas moins considérable. »
Une enquête récente du SNUipp/FSU dénonce la situation catastrophique des écoles (normes d’hygiène et de sécurité, quasi-inexistence des moyens pédagogiques de fonctionnement. . .). Constat, partagé par M. François-Marie Perrin (Vice-Recteur) qui juge que l’accueil est convenable dans seulement 20% des écoles mahoraises. Les eUectifs scolaires dans le premier et le second degré à Mayotte connaissent une forte progression. 5 000 en 1973, 58 720 en 2003, les eUectifs s’élevaient, pour la rentrée 2011, à 82 293 élèves. En moyenne, chaque année, le système éducatif mahorais accueille 1 500 élèves supplémentaires dans le premier degré et 1 600 dans le second degré.
Christophe Gallaire
Christophe Gallaire fait ses débuts dans l’image par le cinéma et la sémiologie. La rencontre, fin des années 90, avec le photographe brésilien Renato Assis le réoriente définitivement vers la photographie.
Après avoir travaillé dans le milieu artistique (danse, musique…), il s’est engagé dans une approche documentaire plus humaniste centrée sur les violences et les exclusions.
Lieux d’Affichage :
– 125 rue du fbg du Temple (1 affiche) 75010 Paris
– 45 rue du fbg du Temple (3 affiches) 75010 Paris
– 103 rue de la convention (1 affiche) 75015 Paris
– 162 bis rue Lamarck (1 affiche) 75018 Paris
– 20 rue de Bellegrand / Pelleport (1 affiche) 75020 Paris
*Inimaginable est une association qui propose de développer et financer les projets des photoreporters qui traitent de l’actualité des Droits de l’Homme et des Discriminations. Trop de reportages ne voient pas le jour faute de financement et les images ne « circulent » pas suffisamment auprès du grand public, pour cela, Inimaginable trouvera auprès d’une plate-forme de financement participatif (KissKissBankBank) le budget de production pour la réalisation du projet et sélectionnera chaque mois l’image d’un photographe pour organiser une campagne d’affichage en plein cœur de Paris.
Tous les mois, Le Journal présentera en avant-première la sélection de l’image choisie par le comité de sélection composé de personnalités invitées par l’association.