Quand vous dites « sauveur » en russe, il n’y a pas beaucoup de différence entre les deux mots : spasatel (« secouriste » ou « pompier ») et spasitel (« sauveur », « rédempteur », « Jésus Christ »), mais les connotations sont opposées. Les secouristes arrivent en général après que quelque chose de grave soit arrivé, souvent ils ne font que récupérer des cadavres, et ne peuvent prévenir la tragédie, seulement traiter ses conséquences.
À l’origine, il est appelé « Le livre du secouriste ». Le livre est un document officiel que tous les secouristes de la fédération russe reçoivent après avoir passé leur diplôme. Chaque possesseur de ce livre doit le remplir à la main, y mentionner tous les accidents dans lesquels il a été impliqué en tant que membre des secours dans sa carrière. Il devient une sorte d’enregistrement de l’expérience de toute une vie, passée à voir des gens souffrir et mourir presque tous les jours. J’ai fait moi-même partie d’une équipe de secouristes pendant trois ans, et je fais toujours cette erreur de dire « sauveur » à la place de « secouriste ». The Book of Savior (Le livre du sauveur) retranscrit ce qui change dans votre attitude, lorsque vous êtes confronté à la mort chaque jour, montrant les manières dont les secouristes protègent leurs esprits et leurs cœurs de cette dure réalité et soulignant les endroits qui restent vulnérables.
Jana Romanova est née en Russie en 1984. Diplômée en journalisme à l’Université de Saint Petersburg, ses projets documentaires ont été présentés dans de nombreuses expositions en Europe et en Russie ces deux dernières années. Notemment au Backlight Festival (Finlande), Encuentros Abietros (Argentina) ou à Fotovisa Krasnodar (Russie). Elle a reçu de nombreux recompense pour ses travaux. Depui 2011, elle enseigne la photographie documentaire à la Faculté de photojournalisme de Saint Petersburg.