Depuis plus de trente ans, Noelle Hoeppe conduit une œuvre photographique radicale. C’est dans le New York des années 1980 que Noelle Hoeppe rencontre sa muse avec qui elle développe des rituels érotiques et chorégraphiques, sorte de course et de danse en noir et blanc qui l’initie à une recherche fondamentale sur le corps et l’organique. A partir de cette période, elle ne cesse d’explorer les volumes (notamment avec ses Blues Nudes) d’une féminité ancrée dans les puissances telluriques qu’elle confronte à une présence mystérieuse et fantomatique du corps masculin ( RX One). D’une production soignée, voire maniaque, les images en grands formats de Noelle Hoeppe ressemblent à des sculptures qui feraient de la photographie un médium aussi primitif que sophistiqué. L’évolution de son travail emmène le spectateur dans un vertige de sensations traumatiques et inquiétantes, comme avec Blood, pour au final s’épanouir dans un véritable univers organique : jamais on a vu autant de précision dans une description des membranes, des humeurs et des palpitations. Sous forme de plans rapprochés, les vues des mises en scènes littéralement innommables de Noelle Hoeppe font perdre pied au regardeur. Les Fluids sont comme un voyage au centre du corps, non pas abstrait mais indescriptible ; rien, sauf peut-être la photographie scientifique des astronomes,n’a jamais produit ce genre d’image. D’ailleurs, la dernière série de Noelle Hoeppe s’apparente à une image de l’éther ( X 23) : un au-delà des formes.
Michel Poivert