Rechercher un article

Nina Berman par Pauline Vermare

Preview

Une conversation avec la photographe Nina Berman— Bryant Park, New York, juin 2012
  


Pauline Vermare — Une semaine après le Memorial Day, vos essais Purple Hearts et Marine Wedding résonnent d’une manière sombre et opportune. Qu’est-ce qui vous a mené à traiter ces sujets ?
  


Nina Berman – Au départ, c’était juste une façon pour moi de m’opposer à ce que je voyais dans les médias grand public, qui était la marche en avant vers la guerre en Irak. Je me rappelle qu’en décembre 2002, je photographiais quelque chose à la Maison Blanche – je ne me souviens plus de ce que c’était – et j’ai vu toute la presse officielle se préparer pour la guerre, et je me suis dit, « Qu’est-ce qui se passe ? Est-ce que c’est vraiment en train d’arriver ? » Et alors quand la guerre a commencé en mars 2003, et que la couverture presse ressemblait beaucoup à une super-production d’Hollywood – c’est du moins comme ça qu’elle apparaissait à la télévision – je sentais qu’on me mentait et je voulais trouver un moyen de m’opposer à cela à mon échelle et de m’engager dans cette guerre autrement qu’en la regardant simplement à la télévision. On a rapidement pu comprendre qu’il n’y aurait pas d’enregistrement visuel des blessés ou des tués, qu’ils soient Irakiens ou Américains, et pourtant on pouvait lire sur, vous savez, « trois blessés aujourd’hui », et je voulais savoir, « qu’est-ce que ça veut dire, d’être blessé ? Peut-être que c’est quelque chose que je pourrais faire. » Et donc je me suis mise à la recherche de ces sujets. Et ensuite je me suis intéressée plus largement à la question de qu’est-ce que ça veut dire, quand vous êtes jeune, de vous consacrer à ce que vous pensez être votre rêve, qui va vous emmener loin de votre ordinaire, et alors, à un moment que vous n’avez pas choisi, d’être renvoyé brutalement à votre ancienne vie. Et puis il y a aussi d’autres éléments à ajouter : est-ce que vous rejoignez l’armée parce que vous êtes pauvre, ou parce que vous êtes patriote, et qu’est-ce que ça veut dire ?
  


PV : Est-ce que vous vous qualifieriez de photojournaliste ? 
  

NB : J’ai commencé la photographie tardivement, autour de mes 28 ans, c’était il y a longtemps maintenant… mon rêve était de devenir écrivain, en réalité. Et parce que la culture américaine voit ce mot, « photojournaliste », d’une certaine manière, je m’en suis défiée. Je veux vraiment faire passer mes idées dans mes photos, je ne crois pas à l’idée du spectateur objectif – et je ne pratique pas le genre de photographie frénétique qui veut « capturer le moment ». La plupart des gens voient les photojournalistes comme des photographes de guerre ou des paparazzi. Et je ne suis ni l’un ni l’autre. Donc je préfère me qualifier tout simplement de « photographe ».
  


PV : Où avez-vous grandi ? 
  


NB : D’abord dans le Bronx, et ensuite j’ai déménagé quand j’avais 8 ans pour la banlieue, dans le New Jersey.


PV : Pourriez-vous m’en dire plus sur la genèse du projet du Bronx Documentary Center ? 
  

NB : C’était ma manière de trouver de nouvelles sources d’enthousiasme dans New York. J’ai vécu ici longtemps, et quand vous habitez à New York, vous vivez dans votre propre quartier – ce voisinage, ce café, ces gens. Et je voulais casser ce petit univers, alors j’ai commencé à m’intéresser à ces jardins ; j’y revenais sans cesse, marchant dans ces espaces enchevêtrés. Alors j’ai commencé à circuler dans le Bronx, en regardant autour de moi, et dans le même temps, je crois que je venais de rejoindre Noor, en 2009, et Noor se concentrait sur le travail environnemental, alors j’ai commencé à me dire « ça va être mon propre petit projet – ce que je ferai quand je suis à New York et que je n’ai rien d’autre à faire ». Je n’étais jamais sûre que je pouvais faire une jolie photo, du genre prendre quelque chose et le rendre joli, alors je voulais relever ce défi créatif, voir si je pouvais y arriver, et alors j’en suis venue à vraiment apprécier certains de ces espaces. Donc quand Noor a fait ce projet sur le changement climatique, je me suis dit que j’allais travailler dur sur ce truc du jardin du Bronx, et j’ai découvert tous ces gens, et j’aime être dans ces endroits ; et puis c’est devenu l’enjeu, de rendre cet espace inextricable visuellement merveilleux. C’est aussi aller à l’encontre de l’idée que les gens se font du Bronx, non ? Parce que c’est cette idée du « big bad Bronx » (grand méchant Bronx), et si vous allez là-bas vous allez vous faire tirer dessus, et il n’y a rien de terriblement compliqué ici mais j’aime faire un travail qui peut avoir sa place dans la communauté, comme quand pour Purple Hearts j’ai voyagé avec les soldats partout dans le pays, et nous les avons amenés dans certains endroits. Le Bronx Documentary Center semblait alors être l’endroit parfait. Et si vous y allez, vous verrez – c’est vraiment une jungle urbaine !

Lire l’intégralité de l’entretien de Pauline Vermare dans la version anglaise de La Lettre…

Pauline Vermare is a Curatorial Assistant at the Robert Capa Archive, International Center of Photography, New York.

Bronx Garden – Nina Berman
Du 2 juin au 16 août 2012
Bronx
614 Courtlandt Avenue
(@ 151st St.) Bronx
New York 10451

Obama Train – Nina Berman
Jusqu’au 8 juillet 2012
at « Making History: Ray 2012 »
Frankfurt – Germany

Merci de vous connecter ou de créer un compte pour lire la suite et accéder aux autres photos.

Installer notre WebApp sur iPhone
Installer notre WebApp sur Android