Cette exposition se veut une lecture du regard que pose Lartigue sur le monde. La qualité de ce regard réside peut-être moins dans la légèreté et la grâce – pourtant l’une et l’autre recherchées à tout moment par cet artiste – que dans la conscience sensible d’une soudaine relativité des choses entre elles. L’époque où l’enfant commence à photographier est comme déstabilisée dans ses lois ordinaires de gravité et de perspective. Tout va désormais tellement vite que tout devient aussitôt immatériel, indécis, sujet au hasard. L’exposition réunit ainsi quelque 200 photographies sur le thème de l’instant qui passe, de la brièveté du bonheur et de la fragilité de la vie et montre que l’art du photographe est autant l’évocation du bonheur qu’un combat de tous les instants contre la pesanteur et la mort. – Florian Rodari
« Écrire, peindre, photographier, ces choses-là me consolaient à peu près complètement. » constate Lartigue. […] Journal intime, photographie et peinture tentent de s’opposer à l’évanouissement du temps qui passe. […]Malgré l’invention des images en relief, en couleurs et animées qui ressemblent à la vie, Lartigue regrette de ne pas pouvoir enregistrer pour les conserver à jamais les odeurs, les sons, les sensations. […] Il déplore avoir échoué à capter la lumière du soleil, l’atmosphère, les couleurs, les odeurs.
Curieusement, sa conscience aigüe de la fragilité humaine (fragilité qu’il éprouvait intimement), comme sa vision précoce de notre impuissance face à ce qui nous dépasse, fuite du temps, mort certaine, lois de la pesanteur qui rendent les chutes inéluctables, violence des éléments, le transformeront en lutteur acharné décidé à combattre l’impossible. Faisant de sa fragilité même sa force, il bataillera pied à pied, avec son appareil photo et son stylo, contre ces fatalités incontrôlables qui le dépassaient, bâtissant sans relâche ses barrages – c’est-à-dire ses photographies – pour retarder la déroute finale, et réussissant en effet, par la beauté de ses images à réaliser ce qu’il désirait si passionnément : rendre éternel le bonheur de certains instants.»
Martine d’Astier – Extrait du catalogue : «Un mundo flotante» – Morir no es mucho más que olividar
EXPOSITION
Un monde flottant
Jacques Henri Lartigue
Du 17 juin au 25 septembre 2016
Théâtre de la Photographie et de l’Image – Charles Nègre
27, boulevard Dubouchage – Nice
Une exposition imaginée par Florian Rodari
produite et réalisée par la Fondation « La Caixa », en collaboration avec la Donation Jacques Henri Lartigue, Ministère de la Culture – France.
www.lartigue.org
Commissaires : Martine d’Astier, Marie-France Bouhours et Florian Rodari