Division of the Vision, chez Yossi Milo, est la première exposition aux Etats-Unis de l’intriguant artiste israélien Assaf Shaham, adepte des installations pluridisciplinaires. Ici, dans plusieurs séries assez opposées, il utilise plusieurs matériaux, dont la photographie, pour attirer l’attention sur le fossé entre la perception et la réalité dans les images fixes et mobiles. Clamant que “les rôles prescrits” d’artistes, d’appareil photo et de sujet limitent la possibilité de représenter la réalité, son travail tente ainsi de décomposer et reconfigurer ces rôles.
Dans certaines œuvres, Assaf Shaham prend des risques. Comme dans cette première série, Writer/Storytellers, qui s’attaque aux catégories sociales d’August Sander dans le célèbre Hommes du XXe siècle. En découpant, dans une édition du livre, les visages, les corps ou la totalité de ces personnages de photos célèbres, laissant parfois uniquement apparaître leur silhouette et recollant par la suite des bouts de découpes ici et là, Assaf Shaham va à l’encontre du raisonnement de Sander et de son portrait objectif de la société. Cette altération d’une des œuvres majeures de l’histoire du médium est évidemment culottée, mais les images sont elles assez fortes, provocatrices, aventurières et même presque drôles, comme souvent lors de collages.
Dans d’autres travaux, comme Medium, œuvre moins intense, l’artiste cherche plus à nouer des liens ou à s’amuser. Ici, une seule image suffit à elle-même : Assaf Shaham a remplacé l’une des images panoramiques standards sur une boîte de papier photo noir et blanc Ilford avec un célèbre cliché de Blow Up d’Antonioni, un film qui explore la relation entre le photographe et son sujet, et les questions de la capacité d’une image à révéler la vérité. Quant à Full Reflections, c’est une série de “scanogrammes”, terme emprunté à l’artiste, réalisée à l’aide de scanners de bureaux positionnés face à face. L’un d’eux projette de la lumière et l’autre capte ses effets. Assaf Shaham utilise ici des machines pour créer des images abstraites et colorées ressemblant à des tableaux de Mondrian ou Rothko avec l’esprit expérimental de Dada. Tout aussi intrigantes que la série consacrée à Sander, ces images-là paraissent alors plus récréatives, voire décoratives, mais elles gardent la volonté de se parer des propos engagés de l’artiste :
« Mon investigation est principalement centrée sur des appareils simples, produits en masse, facilement disponibles, tels que des calculatrices, des appareils photos, de montres… Je suppose que chaque appareil, matériel et mécanisme prédit son utilisateur – pour que l’utilisateur soit… déjà inclus dans le manuel d’utilisation … En introduisant des perturbations dans ce manuel, je suggère une manière de repenser son potentiel… »
EXPOSITION
Division of the Vision
Assaf Shaham
Jusqu’au 21 février 2015
Yossi Milo Gallery
245 Tenth Avenue
New York, NY 10001
212-414-0370