Artiste visuel né en 1966 à Honolulu (Hawaï, USA) Paul Pfeiffer manipule les images pour mieux nous démontrer que, souvent, les images nous manipulent. Le Guggenheim de Bilbao (Biscaye, Espagne) organise sa plus grande exposition à ce jour en Europe.
Est-ce que nous faisons l’image ou est-ce l’image qui nous fait ? Pfeiffer utilise les diffusions quotidiennes de spectacles sportifs, de divertissements télévisés ou de concerts géants, en les rééditant après en avoir modifié ou supprimé certains éléments. Les scènes qui nous sont alors données à voir flirtent avec le surréalisme ou l’absurde. Elles mettent en évidence une autre perception du monde et le pouvoir qu’ont les images pour transformer le spectateur en consommateur.
Depuis plus de vingt ans, Pfeiffer se sert des outils traditionnels de retouche photo ou de montage, en coupant, joignant, masquant des parties d’images ou de films révélant ainsi les systèmes qui influencent et orientent la mémoire collective.
« Même si la société nous dit que la production doit être canalisée pour perpétuer ses institutions, nous savons que le pouvoir de la créativité qui nous anime n’a pas besoin d’être contrôlé par les institutions de la société. »
Dans les œuvres présentées nous retrouvons les acteurs de la Pop culture – vedettes de la musique, stars de cinéma, sportifs célèbres, en tant que symboles de la culture de masse, et dont les corps et les visages sont admirés jusqu‘à la vénération. Les expériences de foule conduisent à des réactions émotionnelles qui négligent l’individu en le reléguant à un groupe, et entraînent un sentiment artificiel d’appartenance. Mais avec Pfeiffer, la relation habituelle avec le public est détournée. Par les techniques de diffusion d’abord, l’artiste procède à des changements d’échelle au moyen de mini écrans perchés en hauteur, ou au contraire par d’immenses formats. La miniaturisation permet au spectateur d’avoir conscience de sa propre présence et de l’incongruité du spectacle ainsi minimisé. À l’inverse, la série Les quatre cavaliers de l’apocalypse est constituée de tirages photos géants, représentant des joueurs de la NBA, isolés, en quasi lévitation sous les paniers de basket, sans ballon et sans autres joueurs sur le terrain. Leurs gestes deviennent ainsi des chorégraphies abstraites, et leurs attitudes semblables à des icônes exposées à la foule. Pfeiffer cherche à analyser comment les spectateurs-consommateurs sont façonnés par les images qui saturent notre monde contemporain. Tout le long du parcours des visiteurs, les appareils qui projettent les photos et les films sont visibles, mis en évidence même en tant que dispositifs, comme pour désamorcer l’attraction que les images produisent sur notre cerveau.
Jean-Jacques Ader
« Prologue à l’histoire de la naissance de la liberté » de Paul Pfeiffer, au musée Guggenheim de Bilbao du 30/11/24 au 16/03/25- Commissaires : Clara Kim et Paula Kroll (L.A.) avec Marta Blàvia (Bilbao) Infos : https://www.guggenheim-bilbao.eus/fr
Publication du catalogue « Prologue to the story of the birth of freedom » par Mack books et le MOCA (L.A.).