Dans le cadre du 10e mois international de la photographie à Moscou Photobiennale 2014, le Musée des arts multimedia de Moscou présente une rétrospective de l’oeuvre de l’éminent photographe et théoricien russe de la photographie et du remarquable pédagogue Alexander Lapin (1945-2012).
On trouve des oeuvres de Lapin dans les collections du Musée des beaux-arts Pouchkine à Moscou, du Musée des beaux-arts de Boston, à la Corcoran Gallery of Art à Washington et dans de nombreuses galeries et collections privées. Il participa à nombre d’expositions de par le monde : Russie, Allemagne, Suède, Danemark, Finlande, France, Grande Bretagne, Etats-Unis etc. Il fut pendant cinq ans, de 1992 à 1997, membre de la commission chargée de l’attribution des prix d’Etat dans le domaine des arts figuratifs auprès du président de la Fédération de Russie.
Alexander Lapin est un brillant historien de la photographie et un grand connaisseur des bases de la composition classique. Ce virtuose de la technique de la prise de vue et du tirage fait preuve dans son œuvre d’une étonnante propriété : il sait à la fois rester fidèle aux canons classiques et les enfreindre à tout bout de champ.
Le début des années 80 fut une époque de stagnation totale ; pourtant le pressentiment des changements à venir était déjà dans l’air… Malgré la simplicité de ses sujets, Lapin sut exprimer cette époque de manière convaincante et métaphorique et la montrer comme aucun autre.
Le mot « photographie » évoque en nous avant toute chose la magie de la lumière. En russe, on utilise parallèlement au mot « photographie » la variante russe de ce mot grec — svetopis, ou « peinture par la lumière ». C’est à l’aide de la lumière que Lapin crée la dynamique et la tension intérieure de ses images. On ne trouvera probablement cette lumière froide et détachée chez aucun autre photographe russe. Chacune de ses photos est précieuse en soi, chacune est un discours existentiel dénué de tout esprit critique et de toute émotion.
Alexander Lapin fut un excellent pédagogue. Il eut pour élève à différentes époques Igor Moukhine, Guennadi Bodrov, Alexandre Sorine, Pavel Smertine et d’autres. La photographie fut la grande passion de sa vie et il la partageait généreusement avec ses élèves et amis. Lapin savait raconter la photographie et il est l’auteur de deux manuels fondamentaux maintes fois réédités : La photographie comme… et Le plan et l’espace ou La vie en carré.
« Je pense que même le grand Bresson ne pouvait tout prendre en compte au moment de la prise de vue. C’est après que tout se passait : parmi les dizaines de photos prises, il pouvait en choisir une ou même n’en choisir aucune. L’acte créateur du photographe ne se termine pas au moment où il appuie sur le bouton, il commence seulement. Le processus créatif le plus difficile, c’est l’analyse du résultat de la prise de vue. C’est à ce moment-là que votre culture, votre goût, votre finesse de compréhension et votre talent prennent toute leur importance», aimait répéter Lapin. De toutes ses photos, il n’en signa qu’un petit nombre. Grâce à sa femme et compagne Elena Lapina, le public pourra voir ces images dans le cadre de la Photobiennale 2014. C’est la première grande exposition d’Alexander Lapin en Russie et, malheureusement, l’auteur n’est plus là pour la voir.