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Michel Philippot –Balade à Phnom Penh

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C’est étrange d’arriver dans une ville en deuil, dans un pays qui porte déjà un passé si funeste. Il est impossible en arrivant à Phnom Penh de ne pas penser que cette ville fut vidée de ses habitants en deux jours pour être déportés, torturés, assassinés par millions et pourtant, rien n’est visible de ce sinistre passé. Cette ville, ses habitants sont comme partout ailleurs en Asie dans une permanente activité de survie.

C’est la troisième fois que se tient à Phnom Penh un Festival de photographie, ce n’est plus seulement une expérience, c’est l’affirmation d’une originalité soutenue par son Directeur Artistique, Christian Caujolle, et celle du Centre Culturel Français local. L’idée de départ est de faire naître des vocations, d’affirmer celles qui se sont déjà manifestées par des rencontres, des échanges. L’idée n’est pas neuve, mais sa pratique et sa mise en œuvre sont plus difficile, particulièrement dans un pays sans tradition photographique particulière, à l’environnement culturel passéiste, sans moyens financiers et qui a aussi, malheureusement, d’autres urgences. Pourtant, aujourd’hui, treize photographes étrangers et dix photographes cambodgiens sont exposés dans des lieux à large lisibilité, comme pour la première fois, à l’Université Royale de PP ( 15.000 étudiants). Des photographes qui travaillent par binôme sur un même thème vont, non pas se confronter, mais faire connaissance. Le nom de cette expérience porte le nom évocateur d’ « Intersection ». C’est une des spécificités de ce Festival, pas de workshop, pas de parole de maître à élève, tout est à apprendre de son alter ego photographe.

Nous sommes arrivés avant l’ouverture officielle de la manifestation, et nous avons eu la possibilité de visiter la plupart des lieux d’expositions. C’est avec le sourire que j’écris que, sous 32° à l’ombre, l’ensemble manifeste, fraîcheur, sérieux, engagement. Montrer des photos d’auteurs comme Raphaël Dallaporta, les mines antipersonnelles dans un pays qui en est encore infesté, montrer la série Kent Klich sur Gaza après les attaques israéliennes, si efficace dans sa discrétion à décrire l’horreur de la guerre dans un pays comme le Cambodge qui a tant souffert des conflits internes et externes, tout cela tient de la prouesse. Les photographes cambodgiens surprennent par l’acuité de leur regard sur leur pays, sur eux mêmes, les magnifiques portraits de Sovan Philong, tout en dignités, les étranges clichés de Chhi Taigchhea en noir et blanc sur l’architecture de la Faculté Royale de PP, les stupéfiants et pudiques études de Heng Ravut sont autant de bonnes surprises que la démonstration que la photo est un fantastique moyen de connaissance. Il fallait être hier soir pour une projection en plein air à l’Eglise française de PP, au milieu d’une foule de gamins et d’adultes attentifs pour être définitivement séduit par ce Festival.

Michel Philippot

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