Le principe est simple. D’un côté, il y a Michael McCollom, designer, photographe et Afro-Américain. De l’autre, tous les gens à qui il a demandé de fouiller aujourd’hui dans leurs archives photo et d’y trouver un portrait qui illustre leur idée du style. Pas de la mode. Du style. Le phénomène quotidien.
Il a ensuite compilé l’ensemble, tel le commissaire d’un mode d’expression personnelle hybride qui a enflammé la jeunesse noire. Si les bottes sont faites pour marcher (Nancy Sinatra), les vêtements semblent faits pour vivre. Les images datent des années 1940 (une seulement) au milieu des années 90 et sont quasiment toutes posées. Parfois en studio, mais le plus souvent devant un photographe amateur — parent ou ami, selon l’âge et le contexte —, dans les rues, maisons, bars, parcs, et autres salles de prom. Ce sont un peu les selfies d’une autre époque.
Tous ont choisi, voire conçu, ces tenues grandiloquentes ou élégantes, et tous ont choisi d’être photographiés. “Here I am trying to be a print model”, commente Bethann Hardison, accoudée au mât d’un bateau en bois, coiffée d’un turban ocre et vermillon rappelant sa tenue. Elle regarde au loin.
Les années stars sont les sixties et seventies, on y fait des détours dans plusieurs villes des Etats-Unis et occasionnellement à Paris, en France. Cela fait partie du style. Chaque photographie est commentée par celui qu’elle reproduit. Ce sont des textes courts, inscrits directement sur les photos, comme dans les magazines. Certaines images pourraient avoir été publiées dans Vogue. Le style de jour et le style de nuit. Une photographie de Noami Campbell et trois magnifiques consœurs prise a la dérobée lors d’une séance photo d’Annie Leibovitz sème le doute. C’est un cahier de style, éclairé sans projecteurs.
Les commentaires regorgent de conseils et de règles de goût — souvent auto-imposées et d’une subjectivité révélatrice —, avec un soupçon d’auto-dérision. Michael McCollom donne le ton en début d’ouvrage avec un portrait de lui 1986, à New York. Il commente : “Okay, this one of those bad style decisions. I was still very cutting-edge; this photo was taken five years before Milli Vanilli appeared on the scene.” Il a une coupe afro asymétrique sur les cotés, courte sur le dessus et longue sur l’arrière. Sa moustache est trouée a la verticale en plein milieu. On devine “fashion” inscrit en capitales sur son pull blanc.
Certaines personnes reviennent, enfant, adulte, à différentes périodes de leur vie. Le style s’exprime dès l’enfance, a cru remarqué McCollom en enquêtant autour de lui. On retrouve aussi des motifs, parfois même des tenues, quand ce n’est pas carrément le “twin mode” dont parle la mannequin, ministre et maman Sharon “Magic” Jordan en commentaire d’une photo d’elle et de sa sœur, datée de 1971. Elles y sont habillées à l’identique, du pantalon aux boucles d’oreille. Les commentaires sont gorgés d’humour, jusque dans les titres des chapitres, échos enflammés a cette libération de motifs et de matières qu’est le style. Sage ou déluré.
Livre
The way we wore: Black style then
Photographies de Michael McCollum
Introduction par Geoffrey Holder
Publié aux Editions Glitterati Incorporated
160 pages
ISBN: 978-0-9891704-4-4
$30
http://glitteratiincorporated.com/products/the-way-we-wore-black-style-then-by-michael-mccollom