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Mexique : El Silencio esta habitado, de Luis Enrique Aquilar

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Ciudad Juarez, au nord du Mexique, est en une des medias depuis plusieurs décennies. Elle a pendant longtemps été une mégapole hantée pour les femmes, qui y mouraient en nombre exorbitant pour une raison jamais élucidée. Il y a une vingtaine d’années, elle est plus gracieusement devenue un pôle magnétique pour les Mexicains qui y venaient en hordes pour trouver du travail, résolus a saisir les opportunités que ses infrastructures promettaient.

La réalité s’est avérée moins dorée, puisque les maquiladoras jouent de la concurrence des travailleurs venus d’Asie pour imposer des salaires dramatiquement bas – autour de 100 dollars par semaine dans une ville où le coût de la vie frôle celui des Etats-Unis voisins. A cette fragilité sociale s’ajoute l’impitoyable guerre de la drogue, qui dissémine la population au rythme effréné de 300 corps par mois pour les plus sanglants. La tension est palpable, permanente et cruelle, imposant le silence à une population qui n’en accepte pas moins de vivre et de rester dans cette ville qu’elle a choisie malgré la précarité, malgré la présence inévitable de la mort. Le contexte a inspiré de troublants reportages photographiques, souvent dominés par la couleur criarde du sang.

Rares sont ceux qui l’ont abordée avec une esthétique calme. Seulement récemment, deux photographes mexicains ont tenté de dépasser cette iconographie pesante en s’intéressant aux habitants de la ville et de sa périphérie et aux raisons qui les poussent à rester. Le premier est Alejandro Cartagena, dont une partie des photographies étaient exposées au Bronx Documentary Center au mois de janvier ; le second est Luis Enrique Aquilar, photographe et directeur du centre culturel Gimnasio de Arte y Cultura de San Cristobal de las Casas, dans le Chiapas.

Ce dernier joue de la confrontation entre paysages et portraits. D’un côté – même si la juxtaposition n’est pas littérale – se déploient les paysages assourdis par l’abandon, par l’expansion inachevée qui grignote le désert environnant, par l’industrie frêle : les cheminées dressées des usines semblent fragiles face a la monumentalité de l’environnement, montagnes inébranlables malgré la violence humaine ; la croix rouge dressée sur le toit d’un supermarché est immanquable, mais il semble que ville infinie a ôté a son métal le pouvoir de résonner. Ce n’est ni la voix explosive des cartels ni la voix corrosive des industries qui intéresse Aquilar, mais celle des habitants, celle des espoirs qu’ils expriment dans des attitudes franches, profondes et spontanées, quand il leur demande de poser au milieu dans cet environnement qu’ils appellent “chez soi”.

www.luisenriqueaguilar.com

http://alejandrocartagena.com

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