Enfin ! Une exposition qui ressemble à une exposition. Quand elle nous montre des œuvres photographiques qui ressemblent à des œuvres, l’optimisme revient. Et pourtant, le pessimisme de l’alerte qui apparait derrière chaque image devrait limiter notre engouement.
Rapidement, l’objet de cette exposition consiste à nous interroger sur le sort que nous souhaitons réserver à de nombreuses espèces animales en voie de disparition. Après avoir massacré (volontairement ou innocemment, le résultat est le même) des milliers d’animaux, nous découvrons avec stupéfaction que certaines espèces sont installées sur la pente de l’extinction.
L’objet est noble, mais les sujets et surtout leur appréhension photographique, de main de maître, ne s’imposent pas devant nous pour faire pleurer dans les chaumières. Chaque image nous interpelle directement, car chaque sujet de chaque image nous prend littéralement à partie. J’aime beaucoup l’approche d’Olivier de Kesauson, à propos ces photographies d’Alain Ernoult, : « … ce ne sont pas nous qui regardons les animaux, ce sont les animaux qui nous regardent. ». J’ajouterai : « et ils ne nous regardent pas n’importe comment. ».
Alain est un excellent photographe, toutes ses images sont techniquement très abouties. Les compositions supportent le message dans un environnement peaufiné pour ne rien laisser distraire du regard pendant la réflexion et l’échange entre le lecteur et l’œuvre qu’il découvre. Le matériel est vraiment sous le contrôle du photographe, même dans les conditions les plus extrêmes.
Alain est un photographe talentueux, toutes les rencontres avec ses sujets (bien vivants dans notre cas), ont pour seul objet le respect et la confiance. Ces deux évidences vont avoir pour unique objectif l’enregistrement d’une image, à l’instant précis où l’animal va interpeller les futurs contemplateurs de son portrait. Le talent, c’est un automatisme complet et précis des réglages matériels et humains qui vont permettre au créateur ce mouvement instinctif et millimétré pour attraper l’image, sans perturber les animaux.
Le résultat est au rendez-vous, nous avons tous vu de très belles photographies animalières dans des revues, des salons ou autres festivals (souvent dits animaliers). Certes, des images intéressantes, parfois pleines d’anecdotes, plus ou moins, émouvantes. Dans le cas de cette exposition, nous sommes au-delà de l’émotion. Le photographe est l’égal de ses sujets qui s’imposent eux-mêmes pour se montrer les égaux de tous les visiteurs qu’ils confrontent par leur regard unique que seuls quelques excellents auteurs photographes savent mettre dans la boite obscure.
Un mot pour féliciter le département de l’Hérault, à l’initiative de cette exposition, et l’ensemble des collaborateurs qui ont su mettre cet écrin intimiste. Pour permettre une mise en valeur des images en respectant les dialogues potentiels offerts par plus de 70 images, tous formats confondus. Un petit bonus pour la scénographie de bonne qualité, un peu perturbée (comme très fréquemment) par des impératifs d’éclairages peu compatibles avec les façonnages de présentation choisis.
Une véritable exposition de véritables photographies qui exige de véritables interrogations pour l’Homme d’aujourd’hui, sans créer de pseudo angoisses et autres agressions morbides.
Thierry Maindrault
EXPOSITION
Pierresvives
domaine départemental
907 rue du Professeur Blayac
34000 MONTPELLIER
du 06 octobre 2023 jusqu’au 27 janvier 1924
du mardi au samedi de 10h00 à 19h00