Parcours étonnant que celui de l’Espagnole Marta Gili.
Diplômée de philosophie et d’éducation, avec spécialisation psychologie clinique, elle dirige depuis cinq ans le Jeu de paume. Critique d’art et commissaire d’exposition, elle est l’auteur de nombreux livres et catalogues.
• J’y suis arrivée de manière fortuite puisque j’ai fait des études de philosophie et sciences de l’éducation à Barcelone.A 19 ans, j’avais un petit boulot à l’Institut d’Estudis Fotogràfics de Catalunya (Institut d’études photographiques de Catalogne). Puis, lorsque j’ai commencé à travailler en tant que psychologue, j’ai repris le principe d’un confrère qui demandait à ses patients d’apporter leurs photos de famille, pour “déclencher” la séance en leur faisant commenter les images. Toujours dans le cadre professionnel, j’ai organisé des séminaires où j’invitais des photographes, puis on m’a demandé d’en préparer un à la Primavera Fotogràfica de Barcelone, l’équivalent du Mois de la Photo à Paris. Je suis ensuite devenue critique pour différents journaux espagnols (El País, La Vanguardia, Avui…).
• Le Jeu de paume est un lieu passionnant… J’y ai beaucoup appris depuis mon arrivée, il y a quatre ans et demi. Mon rôle consiste à trouver un équilibre entre les tâches administratives – nécessaires – et l’élaboration d’expositions, de publications, d’activités culturelles et éducatives… La programmation s’articule autour de “L’image en jeu”, une signature désormais associée au musée et qui décrit bien notre volonté de mettre en rapport la photographie historique et les images contemporaines, afin que la première éclaire les secondes, et inversement.
• A la suite d’un article, dans lequel j’étais particulièrement virulente sur un photographe exposé à la Fundació “la Caixa”, à Barcelone, le directeur du musée m’a téléphoné : il ne comprenait pas la teneur de mon papier et, sous forme de défi, m’a demandé de m’occuper de la programmation des expositions de photographie dans un petit espace très central, à Barcelone. J’y ai d’abord travaillé en free lance, avant de quitter définitivement mon métier de psychologue. Je suis aujourd’hui reconnaissante envers cet homme…
• Les oeuvres qui m’intéressent sont celles qui mettent en tension les valeurs culturelles, sociales, politiques et esthétiques de notre récit historique et de notre contemporanéité. Concrètement, en photographie, il s’agit d’images qui induisent un rôle actif du spectateur, qui donnent à réfléchir et qui incitent à s’intéresser au hors
champ.
• Je n’envisage pas la photographie comme quelque chose de générique car, à mon avis, il n’existe pas “une photographie” au singulier, mais de multiples pratiques autour de l’image et plusieurs déclinaisons de la représentation. Ainsi, la photo est de plus en plus riche et en même temps de plus en plus banale. L’avenir de l’image se trouve peut-être dans la reconstitution de récits, dans la confrontation de discours divergents et aussi dans l’aversion pour les récits figés ou fermés.
Propos recueillis par Sophie Bernard – Images Magazine n° 46 – Mai-Juin 2011
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