Cadavres exquis PP 2022
Dans la poussière des malles de famille dorment des trésors. Lorsque je suis tombée sur un album antediluvien en passe d’atterrir à la poubelle, le feuillettage de ses pages un peu moisies a fait défiler devant mes yeux des portraits surannés. Expressions rêveuses des femmes, poses contraintes des enfants, regard vague et perdu des hommes en partance pour la guerre, tout m’a appelé vers une fantasmagorie poétique. Ces visages à demi-ensevelis dans les sables du temps, presque plus personne ne pouvait les identifier pour moi. J’ai éprouvé le besoin de broder autour de chacun une dentelle de mots, de les exposer et en quelque sorte de les sauver de l’oubli.
La dénomination de cadavres exquis m’est venue après avoir commencé cette minutieuse reconstitution de paysages intérieurs. C’est un jeu inventé par les surréalistes au début du vingtième siècle. A l’origine il s’agit d’un papier plié que l’on se passe pour marquer une phrase sans savoir ce que les différents joueurs ont inventé au préalable. Ma grand-mère m’a appris à composer de fantasques histoires avec elle et mes cousins selon ce principe. Aujourd’hui j’ai recyclé ce concept en découpant de multiples livres de poésies, en prélevant des phrases et en les réassemblant au gré de ma fantaisie. Le résultat est un hommage à toutes ces influences et compose une œuvre qui m’est intime et chère, et que j’ai envie de partager.
Bienvenue dans mon ossuaire photographique.
Marion Godefroid-Richert
