Ils s’appellent Marie-José et Claude Carret. Ils sont mariés. Ils sont photographes. Depuis 30 ans, ils sillonnent l’europe pour rencontrer les Roms.
“Ni Marie-Jo, ni moi-même, nous n’étions prédestinés à donner tant d’importance à la photographie. Le regard est devenu l’essence même de notre existence.”
Inutile de faire la distinction entre les photos du couple Carret afin de savoir qui des deux a pris quelle photo. Leur travail est en symbiose, ils se complètent. En tant que photographes, ils sont discrets. Ils essaient d’abord de créer une relation plus étroite, l’appareil photo reste à l’écart.
Grâce à leur approche , les personnes présentées sur les photos sont détendues et spontanées. De nombreuses prises reflètent le rayonnent du naturel et de la légèreté avec lesquelles l’instant a été capturé.
Les Carret ont rencontré la première famille rom en 1984 à Klenovec (un village en Slovaquie actuelle). À cette époque, ils sont arrivés en Tchécoslovaquie sans (avoir de) plan précis.
Ils voulaient photographier le pays dans son intégralité, donc le paysage, les traditions, mais aussi les minorités car ils avaient déjà de l’expérience dans ce domaine, ayant fait un projet avec les réfugiés politiques du Laos et du Cambodge vivant en Bretagne. Dès le premier contact avec les Roms en Slovaquie, les Carret se sont déplacés à Klenovec deux ou trois fois par an pendant les 10 années suivantes.
Ces Français inconnus au départ sont devenus des amis et les habitants ont commencé à les inviter aux mariages, fêtes, communions, funérailles…
La porte imaginaire s’est ouverte et ils ont pu apercevoir des cérémonies et des rituels, où, hors de l’aspect visuel souvent attractif en surface des choses, leur essence s’est également révélée. Peu à peu, les gens ont partagé avec eux des sentiments intimes et des moments de vie familiale ainsi que leur piété personnelle. Chaque fois, les Carret ont ramené les photographies. Très vite, ils sont devenus « des passeurs de mémoire » des habitants du village déjà défunts. De cette manière, les Carret sont entrés dans la conscience de la communauté visitée.
Au cours des années suivantes, l’intérêt du couple Carret pour la vie et la culture des Roms n’a pas faibli. Bien au contraire. En 1994, ils ont décidé de faire la connaissance de leur culture également dans d’autres pays. Ils ont commencé à se rendre chez les Roms en Hongrie, en Roumanie, en Moldavie, puis en Yougoslavie et en Ukraine. En documentant des groupes subethniques de Kalderare, Gabori et Lovars en Roumanie, ils ont établi des contacts avec des Roms à travers tout le pays.
Leur approche photographique est restée pourtant la même : une relation intime avec les personnes photographiées, partage, enregistrement des moments ordinaires et festifs de la vie. Comme le précisent les Carret en décrivant leur travail, ils ne cherchent pas à idéaliser les Roms à travers leurs photographies. Ils veulent plutôt briser les clichés stéréotypés qui les mettent en marge de la société. Ils recherchent des traits communs aux cultures particulières, il est possible de les trouver dans le quotidien et sa poésie presque imperceptible, ainsi que dans la vie sacrée et cérémoniale.
Adam Holubovsky, Eva Mazarova