« Je t’aimerai dans les rues du monde », a écrit Marco Pesaresi dans son journal. Après avoir longuement vécu et exploré le monde, il est revenu pour partager son lieu, celui qui était le plus intime et personnel, le plus exubérant et tendre, sa terre natale.
Grâce au don de ses archives par sa famille à la municipalité de Savignano sul Rubicone et à notre collaboration avec la photothèque Marco Pesaresi, nous avons réussi à nous immerger dans le monde de Marco, en ouvrant une sorte de boîte de Pandore et en découvrant pour la première fois son projet Rimini dans son intégralité, une accumulation de négatifs, de journaux intimes, de poèmes et de notes inédites qui permet de réfléchir aux mutations intervenues au fil du temps et de restituer une vision historique et contextualisée de la Riviera des années 1990. La version revisitée nous permet de présenter les œuvres de Marco sous un nouveau jour, mettant en lumière et élargissant les aspects du domaine qui ont été explorés dans l’exposition de 2003.
En ouvrant les boîtes qui contenaient les négatifs, en étudiant les planches contact et en analysant soigneusement chaque détail, nous sommes entrés dans les histoires qui se déroulaient autrefois devant l’objectif de Marco. Les contrastes nets en noir et blanc, les premiers plans, les flous, les interminables jeux d’ombres peuvent sembler être un artifice esthétique, mais lui ne pense pas en ces termes.
Au lieu de cela, Marco capture l’essence des moments et des atmosphères de certains lieux, s’éloignant des contraintes de la narration et de l’obligation d’expliquer. Il charge les décors de sensibilité de manière expressive, les capte dans leur flou émotionnel et se laisse guider par son intuition.
Comme Rimini est son œuvre autobiographique la plus suggestive, elle est tout aussi pleine de contrastes que la vie elle-même. Dans son ensemble, complexe assimilable à un travail de recherche ethno-anthropologique, on perçoit une forte dichotomie entre les mondes dépeints qui s’apparente presque à une bipolarité de la photographie. D’un côté, ce que nous voyons, ce sont de fortes interactions humaines : nous visitons une Rimini énergique et palpitante qui est devenue un symbole d’été, de liberté et d’euphorie juvénile, une destination idéale pour ceux qui recherchent le plaisir, la musique et le divertissement, célèbre pour ses fêtes qui continuent jusqu’à l’aube. Mais à la fin de la fête, ou pendant l’hiver, ce que nous voyons est une réflexion plus profonde, souvent mélancolique, sur la relation entre les gens et les lieux, révélée par des images où manque la légèreté emblématique de la Romagne. Entre ces deux mondes, thématiquement si éloignés mais géographiquement si proches, se situe la vie quotidienne de la province avec ses coutumes et ses traditions.
Comme dans une voiture engagée dans une course folle qu’on ne peut arrêter, Marco parvient à piéger en un instant l’infinie mélancolie qui transparaît sur les visages des acteurs de ce cercle inlassable, bruyant et euphorique. Il mène une exploration anticonformiste et existentialiste d’espaces marginaux, de thèmes délaissés et d’activités improbables, assumant une attitude d’ouverture, de curiosité et de disponibilité envers le sujet photographié. Ce qui rend son approche spéciale, c’est l’absence totale de jugement, qui lui permet de saisir des nuances, des émotions et des détails qui seraient autrement difficiles à saisir.
Marco Pesaresi va au-delà de tout préjugé, au-delà de la mise en scène du corps, au-delà des us et coutumes de la plaine, des frontières géographiques et générationnelles, le tout pour rendre hommage à sa terre et nous rencontrer au-delà de la mer.
Jana Liskova
Commissaires : Mario Beltrambini & Jana Liskova
Dates : 24 juin – 24 septembre 2023
Emplacements:
Ala Isotta, Musée Fellini, Castel Sismondo, Rimini
du mardi au dimanche 10h-13h / 16h-19h
tous les mercredis et vendredis de juillet et août : 21h00 – 23h00
Sala Allende, Palazzo Martuzzi, corso Vendemini 18, Savignano sul Rubicone
Samedi et dimanche 10h-13h / 16h-19h
