Vendredi, deux photographes, Chris Anderson et Ashley Gilbertson, qui ont vu le pire de ce que les hommes sont capable d’infliger comme souffrances à leurs semblables ont réalisé une présentation émouvante au Paramount Theatre. Le travail qu’ils ont montré au Look3 ne consistait pas en photos de guerre, de famine, de déplacements de populations, mais de l’incidence de ces événements sur eux, sur leurs familles et dans le cas d’Ashley, sur les familles de soldats tués en Irak et en Afghanistan.
L’exposition de Chris Anderson, intitulée Son (Fils), référant à la fois à son jeune fils et à son propre rôle auprès d’un père malade, était visible dans une petite galerie juste en sortie de la rue piétonne. Pendant sa présentation, alors qu’il montrait ses photographies, il fût très éloquent en décrivant un moment sur un bateau de réfugiés haïtiens en train de couler en plein océan, quand l’Haïtien sur lequel il faisait son reportage lui fit remarquer qu’il avait bien fait de commencer à prendre des photos puisqu’ils allaient bientôt se noyer. À cet instant, quand il comprit que toutes les images qu’il faisait allaient être perdues avec lui, il sût qu’il voulait faire des photographies quoi qu’il lui en coûte. Ensuite, il expliqua que, juste avant qu’ils ne coulent, les gardes-côtes se montrèrent et les sauvèrent, lui permettant de pouvoir raconter cette histoire aujourd’hui.
L’histoire d’Ashley Gilbertson est un peu plus complexe. Son travail en Irak a été largement publié et a remporté de nombreux prix, mais son implication et sa compassion pour les soldats qu’il a photographiés là-bas, les vivants comme les morts, l’ont entraîné plus loin. Son projet actuel, dont il a amené quelques images à Look3, s’appelle Bedrooms of the Fallen (Les chambres des disparus). Ce sont des photos prises dans les chambres des maisons des soldats tués dans les guerres d’Irak et d’Afghanistan. Dans la plupart des cas, les pièces n’ont pas été touchées depuis que les soldats les ont quittées. Les tirages d’approximativement deux mètres sur trois étaient pendus à l’extérieur du Pavillon. Pendant son intervention, il parla de son expérience en Irak et des problèmes que rencontrent les hommes et les femmes qui reviennent de là-bas et d’Afghanistan. Il fit part également de sa colère envers le manque de moyens accordés au traitement du syndrome post-traumatique et d’autres désordres liés au stress, et il plaida ardemment auprès des membres de l’assistance pour qu’ils contactent leurs représentants au Congrès, leurs sénateurs, ou quiconque serait susceptible de mettre un terme à cette situation inacceptable. Avant qu’il n’ait terminé, il n’était pas difficile de voir qu’ Ashley lui-même souffrait des effets du temps qu’il a pu passer à photographier les combats.
Sunday Morning Coming Down
Même si j’ai éludé la bière du petit déjeuner, Johnny Cash sait ce que sont les dimanches matins après un long weekend. Dans ce cas, un weekend qui a commencé mercredi soir avec les images magnifiques de George Steinmetz qu’il a photographié à travers le monde, principalement pour National Geographic.
Ensuite, jeudi matin, j’ai passé une heure délicieuse à assister au brillant atelier de David Allen Harvey High mind/Low light (Esprit noble/Lumière basse). L’après-midi avait lieu l’ouverture de l’exposition World Press et à la tête des juges du concours de cette année, David Burnett était là pour souhaiter la bienvenue aux visiteurs. Dans le même immeuble avait lieu une exposition de LaToya Ruby Frazier, Notion of Family (Le sens de la famille). Frazier a aussi fait une présentation remarquable au Paramount samedi sur l’histoire de sa famille et comment celle-ci et sa vie à Braddock (Pennsylvanie) inspirent son travail.
Le vendredi matin, il y avait un show de Prime Collective accompagné de pan-cakes offerts au Random Row Bookstore. La combinaison était irrésistible pour un grand nombre de participants du festival. Le même jour, Mary Ellen Mark et son mari, le réalisateur Martin Bell ont présenté leur film Prom (Bal de fin d’année). C’est un regard amusant et instructif sur la vie des adolescents. Le soir prenait place la première soirée de projections au Pavillon, où étaient montrées les œuvres de 25 photographes. Deux d’entre elles m’ont marqué, le travail déjà long de six ans de Kendall Messick qui documente le projet de son voisin de bâtir un cinéma dans sa petite cave, et les « photographies qui éclairent l’amour du football en Afrique loin de l’esbroufe de la Coupe du Monde de l’été dernier » de Jessica Hilltout.
Samedi, un autre petit-déjeuner, sponsorisé par la firme BD (technologie médicale) qui, en compagnie de Canon et de National Geographic, est un des sponsors du festival. Son événement se tenait à la galerie qui présentait Hope for a Healthy World (Espoir pour un monde salubre), une sélection de travaux que la firme a sponsorisés. Le petit-déjeuner était suivi d’un débat mené par Mary Ann Golon sur la manière dont les photographes pouvaient faire avancer la problématique d’un monde en bonne santé.
Au Paramount, dimanche, Tonny Bannon, directeur de Eastman House, encouragea Steve McCurry à raconter l’histoire de sa dernière pellicule Kodachrome.
Pour finir, dimanche soir, il y avait une autre projection au Pavillon. Beaucoup de projets intéressants étaient présentés mais The Arab Spring de Yuri Kozyrev et les photos de Damon Winter sur Haïti après le tremblement de terre étaient particulièrement remarquables. Après tout cela, il ne restait plus qu’à aller prendre un verre de vin en attendant l’année prochaine où David Griffin et Vince Musi, qui font un travail remarquable pour assurer la programmation principale et présenter les photographes, seront les commissaires.
Robert McNeely