En marge de l’édition 2024 du Łódź Fotofestiwal, notre correspondante Laurine Varnier a rencontré Anna Maria Zegar et Ewa Cecylia Januszewska, toutes deux étudiantes en deuxième année à l’Ecole de photographie de Łódź.
C’est un dimanche soir de juin où une fine s’abat. L’Artinkubator, ce grand bâtiment aux briques rouges, témoin d’un lointain âge d’or industriel de la ville, vient de fermer. Nous sommes à Łódź (prononcé Woudje), au centre de la Pologne. Anna Maria Zegar et Ewa Cecylia Januszewska sirotent une bière (polonaise) à la terrasse d’un bar au fond de la cour. Elles sont en deuxième année à l’école de photographie de Łódź.
Ewa, coupe au bol, vend des livres au festival photo de la ville. Toutes deux sont des habituées de l’évènement. Anna, au regard pétillant, vient d’une petite ville près de Rzeszów (prononcé Résovie) non loin de la frontière ukrainienne. La ville l’attire : l’ambiance, ses multiples rencontres possibles… C’est son père qui lui offrit, enfant, son premier appareil photo. C’est sa passion pour les gens qui la poussa à continuer. Ewa, elle, est une fille de la capitale. Pour la première fois, elle quitte le domicile familial et vit seule dans sa chambre d’étudiante à Łódź. La photographie argentique a été sa première école : « Cela m’a appris à cadrer, à mieux construire mes photos en les imaginant mentalement ». Ces images mentales, elle les dessine dans un carnet qui l’accompagne partout.
Łódź, un révélateur artistique
Anna et Ewa se connaissent depuis un an et on ressent en les écoutant une véritable complicité amicale et artistique. « On fait des choses très différentes », explique Ewa en faisant défiler sur son téléphone le feed d’Instagram de son ami. « Il y a une véritable confiance dans notre classe, complète Anna. » « Au début, on était tous un peu isolés, chacun dans notre monde. Maintenant, on se consulte les uns les autres pour nos travaux, toujours en étant francs. »
Plus jeune, Anna se sentait isolée des jeunes de son âge : « Lorsque j’ai un appareil photo en main, le stress s’évapore : je me sens épanouie. » Elle n’hésite pas aujourd’hui à contacter directement des modèles qui lui plaisent sur les réseaux sociaux pour leur proposer un shooting. « J’aime apprendre à connaître les gens avant de les photographier. Souvent, on prend un café ensemble pour établir un premier lien. J’ai tout mon temps, le but est aussi de les mettre à l’aise. »
Des projets, ces deux jeunes photographes en ont plein ! Ewa aimerait photographier chacun de ses camarades pendant leurs années d’études à l’école de photographie de Łódź puis sur un temps long. Son autre projet est plus personnel : son père a toujours été strict avec elle, très occupé par son travail. La jeune femme a grandi dans un environnement assez religieux vis-à-vis duquel elle a pris ses distances. « Dans cette série de photos consacrée à mon père, j’essaye de montrer sa personnalité stricte. » Un certain ordre, presque millimétrique, se dégage de ses clichés.
Construire une œuvre photographique : le travail d’une vie
La question du temps travaille beaucoup Anna : « Je me cherche et je profite de mes études pour me construire ». Elle aime sa ville d’adoption, Łódź, cité au passé industriel et aux tristes hivers. Les cases, ce n’est pas pour elle : elle expérimente le portrait, photographie sa mère et raconte des histoires avec ses photos. Ewa et Anna sont unanimes, elles veulent vivre dans un endroit connecté à la Pologne. Si Ewa a eu l’occasion de voyager, elle ne se sent réellement à sa place qu’en Pologne, pays qu’elle a dans son viseur.
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