John Olson: J’ai été incorporé et je suis allé au Vietnam dans l’infanterie. Mais quand je suis arrivé, je me suis fait transféré à Stars and Stripes, le quotidien que le ministère de la Défense avait mis à l’écart de l’armée.
Il y avait quatre journalistes et moi-même. Si j’avais vraiment voulu éviter la guerre et bien manger le soir à Saigon, j’aurais pu certainement le faire. Mais je voulais sortir, faire des photos et créer mon style. Les journalistes avaient conclu un marché avec moi: je pouvais aller où je voulais tant qu’ils n’avaient pas à m’accompagner .
J’ai pris des photos du jour de l’offensive du Têt qui débuta en février 1968 et le magazine Time en avait couvert un autre. Puis je me suis rendu à la bataille de Hué où les Marines avaient participé à leur premier combat de rue de la guerre. Ils ont souffert de très lourdes pertes. J’étais au Vietnam depuis plus d’un an. J’avais participé à de nombreux combats et je bénéficiais d’une certaine expérience. Le temps à Hué était très pluvieux et couvert, il y avait donc peu d ‘appui de l’artillerie et des forces aériennes que nous avions l’habitude de voir. J’ai réalisé que c’était une bataille difficile et que les victimes étaient très nombreuses.
Les Marines utilisaient tous les moyens en leur pouvoir pour évacuer leurs blessés et leurs morts. Un réservoir avait été transformé en ambulance. Je me souviens de la scène, mais je n’ai plus souvenir du moment exact où j’ai pris cette image. Je n’avais aucune idée de l’impact que l’image pourrait créer. Elle ne m’avait pas frappé comme quelque chose qui serait publié des centaines de fois. En réalité, quand j’ai vu l’article dans le magazine Life pour la première fois, j’ai été déçu. Aucune forme de photographie ne peut rendre justice à une bataille. Peu importe à quel point notre travail sera parfaitement réalisé, nous ne pouvons pas ramener chez nous 100% de ce que l’on ressent à se retrouver dans une situation comme celle-ci.
John Loengard: Qu’est-ce qui vous manque ?
[Pause] “La réalité qui nous dit que nous serons peut-être le prochain à mourir.
[Interview du 29 Octobre1993, John Loengard, imprimé dans son intégralité dans LIFE Photographers: What They Saw, un livre de presse Bullfinch publié en 1998. The Photograph, par John Olson avec l’aimable autorisation de The Life Gallery of Photography.]