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Les photographies libanaises retrouvées d’Émile Boulos

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Batroun est une ville et une région. Porte du Nord-Liban, plutôt épargnée par les seize ans de guerre civile, on dit que ses habitants n’ont pas été contaminé par les évènements et cela se ressent en les côtoyant. De cette localité, beaucoup d’images circulent sur les réseaux sociaux. Des pieds dans l’eau, des stand-up paddlistes à l’horizon ou des couchers de soleil. Devenue station balnéaire, on y retrouve un bord de mer unique. Criques, sources d’eau froide et longues plages de sables ou de galets. On sait que les Phéniciens y ont construit un port dont il reste un rempart, qu’au XIVe siècle avant Jésus-Christ, on a écrit son nom en akkadien mais l’histoire de Batroun reste encore à écrire. Le temps fera les choses. Pour l’illustrer et spécifiquement la période 1950-1970, l’époque ou le Liban se faisait appeler encore la Suisse du Moyen-Orient, les images d’Émile Boulos, découvertes par l’archiviste et collectionneur Alfred Moussa, feront certainement l’affaire.

La petite fille d’Emile étudiait la photographie avec Alfred. Un jour, elle se confie à lui. Son grand-père est le fameux Emile. Alfred et Emile se rencontrent et une relation de confiance s’installe. En visitant le studio délaissé  d’Emile, Alfred propose de récupérer et développer les négatifs. Il les empile dans une camionnette, type transport de fruits et légumes, direction Kaslik, l’université et son bureau ou les images seront petit à petit dévoilées. Premier photographe professionnel de la ville, aujourd’hui décédé, tous les habitants sont passés dans son studio ou derrière sa caméra au moins une fois. Des archives uniques. Des portraits studio par milliers. Les arrière-grands-parents, les grands-parents et parents. Les enfants de cousins et neveux. Des visages rayonnants de lumière dans ces photos en noir et blanc, toutes prises en chambre photographique. Un transsexuel, une bonne sœur et des prisonniers. Un fumeur de Narguilé, une danseuse et des motos qu’on aimerait chevaucher en bord de mer.

Un long et difficile travail de recherche reste encore à réaliser pour savoir où et quand chaque photo a été prise. Mais voici une première publication qui rappelle le tandem Hashem El Madani / Akram Zaatari et la Fondation Arabe pour l’Image. Être collectionneur et archiviste de photographies, c’est être garant de la mémoire d’un pays. L’histoire du Liban s’écrit et se réécrit encore tous les jours, la découverte de ces documents uniques en est encore un énième exemple.

 

Sabyl Ghoussoub 

Sabyl Ghoussoub est journaliste et photographe et a été entre 2011 et 2015 directeur du festival du film Libanais à Beyrouth.

 

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