Les Douches La Galerie présente jusqu’au 27 mai l’exposition Jean-Claude Gautrand : L’assassinat de Baltard.
« Quelques années plus tard je me souviens encore des fracas des poutrelles s’effondrant dans un nuage de poussière éclipsant, l’espace d’un instant, les rayons du soleil.
J’entends encore, interprétée par un habitant du quartier cette sonnerie aux morts accompagnant l’effondrement d’un des pavillons. Cette démolition qui mettait à bas une véritable basilique de fer m’a permis de réaliser une série d’images où lumières et matières se conjuguent pour composer un poème visuel qui est également un cri de révolte ». – Jean Claude Gautrand
Jean-Claude Gautrand n’a cessé de témoigner en photographies et en textes de ce qui n’est plus, de ce qui est voué à disparaître. Né en 1932, dans le Nord de la France, il a assez peu voyagé. Il a surtout photographié Paris, ses mutations, et s’est intéressé aux lieux qui portent la trace de l’Histoire : le village martyr d’Oradour-sur-Glane, le camp du Struthof, la fin du bassin minier, les blockhaus sur la côte Atlantique…
L’assassinat de Baltard immortalise la destruction des Halles de l’architecte Baltard, immense marché niché au cœur de la capitale dont les structures de verre et de fer disparaissent dans la poussière et la lumière de l’été. Jean-Claude Gautrand est le seul photographe à avoir suivi toute la destruction. Imaginez le Préfet de Paris autorisant la démolition du Grand Palais. Impensable ! C’est pourtant un drame similaire qui s’est joué dans la torpeur du mois d’août 1971. Et cela malgré les nombreuses protestations et manifestations des Parisiens. Douze pavillons, conçus par l’architecte Victor Baltard en 1856 et constitués de structures de fer et surmontées de verrières, allaient être détruits… Ces joyaux d’architecture industrielle du XIXème abritaient un gigantesque marché de gros : les fameuses Halles qui ont donné leur nom à ce quartier décrit par Emile Zola dans Le Ventre de Paris. Ce marché sera déménagé par la suite à la Villette et à Rungis. Jean-Claude Gautrand, suit l’intégralité de ce chantier, de la démolition des premiers pavillons à la restitution d’un des bâtiments à Nogent- sur-Marne, le Pavillon Baltard. A l’aide d’un appareil Rolleiflex et de films noir et blanc, il se rend chaque jour sur place, bravant les interdictions d’accès, grimpant sur les toits des immeubles, pour témoigner de ce qu’il a appelé L’Assassinat de Baltard et qui a fait l’objet d’un livre paru aux éditions Formule 13, en 1972. Cet ouvrage recevra la même année le Grand Prix du Livre de la ville d’Arles. Au début des années 2000, il a été sélectionné par Martin Parr et Gerry Badger dans le volume consacré aux Protest books au sein de ce qui est devenu une bible pour les grands amateurs de livres de photo, Le livre de photographies : une histoire.
Sylvie Hugues
Commissaire d’expositions
Jean-Claude Gautrand : L’assassinat de Baltard
Jusqu’au 27 mai 2023
Les Douches La Galerie
5, rue Legouvé
75010 Paris
www.lesdoucheslagalerie.com