Prendre le temps, se relaxer, observer, tranquillement.
Prendre le temps de s’étendre et rêvasser, prendre le temps et pratiquer une photographie lente, prendre le temps hors du temps.
Ce travail, de la même manière que les autres séries d’ambrotypes que j’ai pu réaliser auparavant est basé sur de multiples paradoxes.
Des images de rêveurs et de nature; rien de nouveau ni de sensationnel, juste une vision intimiste d’individus blottis dans leur solitude. Les sujets photographiés ainsi que le procédé lent et laborieux s’opposent à un monde rapide et facilement lassé. Quelques rares plaques de verres contre un flot continu et infini d’images numériques. Des photographies sur un support noble que l’on observe au creux de ses mains pour plus d’une unique seconde. De longs temps de pose face à la photographie instantanée. Organique contre abstrait, incertitude contre exactitude.
Sans tomber dans la nostalgie, ce contraste avec l’ère moderne nous montre à quel point nous sommes allés loin, à quel point nos vies sont devenues exigeantes d’un renouvellement incessant.
Et si des images romantiques, mêlant nature et contemplation, devenaient sensationnelles et rares?
Si ce procédé n’est pas une fin en soi, son utilisateur prend parti et réalise un acte quasi-politique, en refusant le rythme de la vie actuelle et en acceptant les sacrifices d’un protocole photographique ancien.
Non seulement, j’apprécie d’observer la profondeur du regard d’un modèle rentrant tout au fond de lui-même en se concentrant sur sa propre immobilité, mais j’y vois une méthode thérapeutique, tant pour la personne qui pose que pour le photographe.
Le jour où j’ai quitté les villes pour changer une existence qui devait l’être, je me suis naturellement concentré sur le procédé du collodion humide, plus adapté à photographier une vie simple, immobile ou non. Cette technique convient à un certain rythme, ses défauts et ses irrégularités illustrant parfaitement un environnement incertain, poétique et bucolique…
Eric Antoine, né en 1974. Il vit à – France