Patrick Remy, critique et directeur de Steidl France, nous dévoile sa bibliothèque idéale: « 10 livres ? Comment choisir ses dix livres préférés dans une bibliothèque qui doit en contenir …Combien ? Mon Dieu ! Je n’ai jamais compté, et toujours refusé de le faire. Ce n’est pas une course…Sans doute 3000, plus ?
Mystère, ce que je sais, c’est qu’une bibliothèque est toujours trop petite ! En choisir dix, relève du challenge, enfin les voici, les dix du moment…rien ne prouve que je changerai d’avis dans quelques heures.
Le premier, la première émotion, avouons le érotique, puis photographique : Femmes secrètes d’Helmut Newton (Robert Laffont), l’essence de l’art de Newton dont je reste un grand fan, collectionnant bien sur tous ses livres sauf Sumo, qui relève plutôt de la table basse !
Autre émoi adolescent, enfin presque, Going East de Max Pam, découvert quand je revenais d’Asie pour le Guide du Routard, un gars superbe… dont j’ai édité ensuite le livre Indian Ocean Journey (Steidl, 2000). Ensuite, l’un de mes premiers livres chez Steidl, Strip (1998), quand je le feuillète, je vois tous ses défauts, les choix hasardeux, tous ces photographies devenues obsolète, mais là aussi c’est sentimental, le début d’une grand aventure….
Slim Aarons, A wonderful Time (Harper & Row, 1974), c’est un ami américain, directeur artistique qui m’en a parlé la première fois, il y a plus de dix ans, ça doit être l’un des premiers livres que j’ai acheté sur Ebay (signé !), un univers composé que de beautiful people, de lieux incroyables, par un homme qui avait appris à plus se prendre au sérieux ! Loin, très loin, de l’univers de Slim Aarons : Boris Mikhailov et son livre Case History (Scalo, 1999), un livre que j’ai rejeté d’emblée, trop hard, trop trash…pourquoi photographier des clochards, nus parfois ? Et petit à petit à force de le feuilleter, de rentrer dans son univers, il est arrivé à mon panthéon, le livre requiem de la fin de l’empire soviétique, plus direct que des centaines de photo reportages !
Ensuite, côté japonais, il y a bien sûr Araki, lequel choisir ? Sans doute, Sentimental Journey, Winter Journey (1991) l’un des rares livres qui fait pleurer, sur les derniers jours de sa femme, Yoko, atteinte d’un cancer.
Puis Kishin Shinoyama, ce grand maître, que l’on oublie trop, parce qu’il a tous les styles, parce qu’il est commercial, mais qui a publié des livres incroyables, comme celui-ci : Shok (1992). Que des natures mortes sublimes de plats japonais traditionnel, dans un livre en or ! Un livre qui a influencé Araki et son Banquet.
Et enfin mes préférés sont toujours les derniers, voici mes toutes dernières acquisitions : Paul Graham, Films (Mack), le livre définitif sur la fin de l’argentique, Hotel Il Pelicano (Rizzoli), un hôtel italien mythique vu par Slim Aarons, John Swope et Juergen Teller, du glamour à l’état pur, et enfin : Helena Påls, För att / Because (Journal), une jeune photographe suédoise, un univers noir comme beaucoup de suédois, mais sensible !
Patrick Remy
