Une exposition au Museum of City of New York remet au goût du jour le travail de ce photographe américain sur la police de New York dans les années 70.
Ayant été déçu par la reconversion commerciale de deux photographes, Edward Steichen dit un jour à Leonard Freed qu’il devait rester un amateur, sans quoi son travail allait devenir inintéressant. « Soyez de préférence un chauffeur routier. » C’est avec cet œil inlassablement curieux que Freed – qui rejoindra Magnum en 1970 – se découvre un intérêt pour la police de New York. Plus précisément en couvrant la lutte pour les droits civiques afro-américains. Pour contrebalancer avec la mauvaise image et les surnoms grossiers dont les forces de l’ordre font l’objet, le photographe entreprend en 1972 un travail humaniste né d’une interrogation sur l’attitude du peuple envers ces policiers ; que lui a envie de connaître un peu mieux.
Freed mène par lui même ce projet sur plusieurs années, mais le Sunday Times de Londres, intéressé par un reportage, lui apporte au début son aide en lui débloquant l’accès aux coulisses du Police Department of New York. Il n’en faut pas plus à un photographe pour trouver son nouveau terrain de jeu : Leonard Freed se faufile dans les couloirs des bureaux de Police, suit les patrouilles, flâne aux heures de repos, assiste aux contrôles, aux interventions musclées ou bienveillantes, aux arrestations aussi. « On sent une vraie immédiateté dans ses photos, commente Sean Corcoran, le conservateur de l’exposition au Museum of City of New York. Aussi bien dans l’action que dans les moments calmes. On est au beau milieu de leur expérience de vie quotidienne. »
Période criminelle, mais aussi de camaraderie. A une époque où la pègre gangrène les allées de Manhattan, Freed a le talent de développer une relation de proximité avec les policiers qu’il côtoie. En les accompagnant un peu partout, il capte des scènes qui sauront rendre son travail unique. L’une d’elle, celle d’une policière jouant à un jeu d’enfant en compagnie de gamins de quartier, rend compte d’un New York rude mais toujours humain. Cet aspect culturel et social, omniprésent dans le travail artistique de Freed, a le mérite de rendre ce dernier objectif. Une objectivité présente dans le livre Police Work, paru en 1980, que le musée new-yorkais s’est tenu de garder dans son exposition. « Dans ces images, dit Sean Corcoran, les policiers n’apparaissent ni comme des méchants ni comme des saints. C’est un réel accomplissement. Le travail de Leonard Freed devrait être une source d’inspiration pour les générations actuelles de photojournalistes. » Une époque actuelle que le conservateur avoue censurée ou au contraire trop spectaculaire lorsqu’il est question de reportages en images sur la police.
Jonas Cuénin
Police Work de Leonard Freed
Jusqu’au 18 mars 2012
Museum of City of New York
1220 Fifth Avenue
New York
(212) 534-1672