Valeria Sarto : l’élégie du quotidien.
Il y a dans le travail de Valeria Sarto une lumière qui ne vient pas seulement du jour, mais du souvenir. Née à Miami Beach en 1998, installée entre Paris et sa ville natale, cette jeune photographe cultive un regard singulier, à la fois délicat et incisif, sur le monde qui l’entoure. Sa pratique, à la croisée de la photographie documentaire, de l’autofiction et de la mise en scène poétique, ne cherche pas à capter le réel dans sa crudité, mais à le transfigurer en résonance émotionnelle. Chaque image est une réminiscence, un instant suspendu où l’ordinaire devient précieux, presque sacré. Loin des artifices et des narrations spectaculaires, Sarto compose des fragments de vie baignés de nostalgie et d’ambiguïté. Les objets y sont chargés d’âme, les lieux deviennent des chambres d’écho pour des affects muets, et les corps — parfois absents — laissent une empreinte d’autant plus puissante. Dans ses séries, l’amour, la perte, l’absence ou le désir ne sont pas illustrés, ils affleurent doucement, à la surface d’un regard ou dans les plis d’un rideau. Influencée autant par le cinéma intimiste que par la photographie argentique, Sarto travaille avec un sens aigu de la composition, du grain, et de la lumière. Elle construit une œuvre introspective, viscéralement féminine, qui explore la mémoire, la vulnérabilité et la beauté des choses en voie de disparition. À travers elle, le banal devient lieu de révélation — et l’art, un refuge pour les émotions sans langage.
A travers son exposition On Memorabilia actuellement à l’Hotel des Académies et des Arts elle déploie un univers intime où les objets deviennent les vecteurs sensibles d’histoires enfouies. À travers une série d’images à la fois fragiles et puissantes, l’artiste explore la mémoire affective et la poétique du détail. L’occasion pour Valéria Sarto de se prêter au jeu de notre Questionnaire.
Instagram : @valeriasarto
Website : www.valeriasarto.com
Actu : Exposition « On Memorabilia » jusqu’au 20 avril 2025
Hôtel des Académies et des Arts
15, rue de la Grande Chaumière
75006 Paris
https://hoteldesacademies.fr/#exposition
Quel a été votre premier déclic photographique ?
Valeria Sarto : La chambre noire. J’ai appris la photographie en noir et blanc, et comment développer et tirer mes images en chambre noire. C’est ce processus qui m’a fait tomber amoureuse de la photo.
Le ou la photographe qui vous a inspirée ?
Valeria Sarto : Vivian Maier.
L’image que vous auriez aimé prendre ?
Valeria Sarto : Je traversais le pont Julia Tuttle vers Miami Beach quand j’ai vu une femme dans une voiture argentée vintage. Elle devait avoir environ 68 ans. Elle fumait une cigarette par la fenêtre, avec un rouge à lèvres rose vif et beaucoup d’eye-liner. La lumière était parfaite, douce et diffuse. J’ai regretté de ne pas avoir mon appareil photo… et de conduire.
Celle qui vous a le plus émue ?
Valeria Sarto : L’exposition Private Property de Helmut Newton à 10 Corso Como, à New York, en 2018.
Et celle qui vous a mise en colère ?
Valeria Sarto : Hmm… aucune ne me vient vraiment à l’esprit.
Le photographe qui a changé le monde ?
Valeria Sarto : Martin Parr.
Et celle qui a changé votre monde ?
Valeria Sarto : Tout simplement l’œuvre de Martin Parr dans son ensemble.
Qu’est-ce qui vous intéresse le plus dans une image ?
Valeria Sarto : Qu’elle soit un peu décalée, et que sa composition nous guide à travers elle au fil des détails qui racontent une histoire.
La dernière photo que vous avez prise ?
Valeria Sarto : Un homme marchant devant une vitrine bleu roi.
Une image clé dans votre panthéon personnel ?
Valeria Sarto : Une photo que j’ai prise d’un homme bronzé en speedo rouge sur une plage de Rio de Janeiro.
Un souvenir photographique d’enfance ?
Valeria Sarto : Le jardin derrière la maison de ma grand-mère.
Selon vous, quelle qualité faut-il pour être un bon photographe ?
Valeria Sarto : Un équilibre entre la maîtrise technique (ISO, vitesse, ouverture) et capturer une émotion.
Qu’est-ce qu’une bonne photo ?
Valeria Sarto : Une image qui vous montre quelque chose que vous n’aviez jamais remarqué.
Qui aimeriez-vous photographier ?
Valeria Sarto : Leonardo DiCaprio.
Un livre photo indispensable ?
Valeria Sarto : Il y en a trop pour n’en citer qu’un.
Votre appareil photo d’enfance ?
Valeria Sarto : Un Vivitar.
Et celui que vous utilisez aujourd’hui ?
Valeria Sarto : J’alterne entre le Canon AE-1, le Hasselblad 500cm et le Contax 645.
Comment choisissez-vous vos projets ?
Valeria Sarto : Au cœur.
Comment décririez-vous votre processus créatif ?
Valeria Sarto : Concentré et paisible, parfois erratique.
Un projet à venir qui vous tient particulièrement à cœur ?
Valeria Sarto : J’ai été sollicitée pour un livre sur Miami et le sud de la Floride, avec plusieurs photographes locaux. Étant originaire de Miami Beach, c’était très spécial pour moi d’en faire partie.
Votre drogue favorite ?
Valeria Sarto : L’herbe.
La meilleure façon de vous déconnecter ?
Valeria Sarto : Flotter dans l’océan et partir en road trip à travers les parcs nationaux.
Votre rapport personnel à l’image ?
Valeria Sarto : J’aime toutes sortes d’images.
Par qui aimeriez-vous être photographiée ?
Valeria Sarto : Arturo Bamboo.
Votre dernière folie ?
Valeria Sarto : Gratter des tickets de loterie et croire que je vais gagner 50 000 dollars.
Une image pour illustrer un nouveau billet de banque ?
Valeria Sarto : Des étoiles, des lunes et des planètes.
Si vous n’aviez pas été photographe ?
Valeria Sarto : Aucune idée.
Votre plus grande extravagance professionnelle ?
Valeria Sarto : Voyager pour prendre des photos.
Une question qui pourrait vous déstabiliser ?
Valeria Sarto : Il faudrait vraiment y aller fort pour me déstabiliser.
La dernière chose que vous avez faite pour la première fois ?
Valeria Sarto : Déménager dans un nouveau pays.
La ville, le pays ou la culture que vous rêvez de découvrir ?
Valeria Sarto : L’Australie et la Nouvelle-Zélande, en long, en large et en travers.
L’endroit dont vous ne vous lassez jamais ?
Valeria Sarto : Miami Beach — chez moi.
Votre plus grand regret ?
Valeria Sarto : Petite, je prenais des cours de théâtre et on m’a proposé d’aller à Los Angeles. Ma mère a pensé que c’était une arnaque, alors je n’y suis jamais allée. C’en était probablement une, mais ç’aurait été cool d’aller à LA quand même.
Sur les réseaux, préférez-vous Instagram, Facebook, TikTok ou Snapchat, et pourquoi ?
Valeria Sarto : Instagram, parce que c’est centré sur la photo, et c’est un peu l’original (après Facebook, mais quand même).
Couleur ou noir et blanc ?
Valeria Sarto : J’utilise plus souvent la couleur, mais je trouve plus de charme au noir et blanc.
Lumière naturelle ou artificielle ?
Valeria Sarto : La lumière du jour.
La ville la plus photogénique selon vous ?
Valeria Sarto : N’importe où qui semble figé dans le temps, pas encore modernisé.
Si Dieu existait, lui demanderiez-vous de poser ou feriez-vous un selfie avec lui ?
Valeria Sarto : Je lui demanderais de poser pour moi.
Si je pouvais organiser votre dîner idéal, qui serait à table ?
Valeria Sarto : Martin Parr, Kate Moss, William Eggleston, David Lynch, Man Ray, Vivian Maier, Sarah Meister, Anna Wintour.
L’image qui illustre pour vous l’état du monde aujourd’hui ?
Valeria Sarto : Il y a sûrement une meilleure image, mais je choisirais celle de mon exposition On Memorabilia : Fed Up in Paris.
Qu’est-ce qui manque le plus au monde d’aujourd’hui ?
Valeria Sarto : Plus de spiritualité, et de conscience de soi.
Si vous deviez tout recommencer ?
Valeria Sarto : Je ne changerais rien.
Que voudriez-vous que l’on dise de vous après coup ?
Valeria Sarto : Que les gens se sont sentis bien après m’avoir rencontrée, et libres d’être eux-mêmes avec moi.
La chose la plus importante à savoir sur vous ?
Valeria Sarto : Je ne suis pas de ceux qui “détestent tout le monde”. Au contraire, j’aime les gens, de différents horizons.
Un mot de la fin ?
Valeria Sarto : Il y a de la beauté en toute chose, même dans ce qui est laid.