Morteza Niknahad : Modernité et tradition
Morteza Niknahad s’inscrit dans une lignée d’artistes iraniens contemporains qui cherchent à préserver et à transformer l’héritage culturel de leur pays dans le contexte de la modernité. Ses œuvres se caractérisent par une esthétique raffinée et poétique, qui résonne avec des thèmes spirituels et philosophiques tout en abordant des sujets sociaux et politiques.
Niknahad utilise souvent la photographie comme un moyen d’exprimer des récits profondément personnels et culturels. Sa maîtrise du clair-obscur et de la composition donne à ses images une atmosphère énigmatique et contemplative, laissant place à des interprétations multiples. En superposant des symboles, des textures et des éléments graphiques issus de la culture persane, il crée un dialogue visuel qui questionne les identités et les valeurs en mutation dans le monde d’aujourd’hui.
Exposé dans nombreuses galeries –dont actuellement à la Galerie 20 Thorigny à Paris– et festivals internationaux, son travail attire l’attention pour sa capacité à capturer des émotions universelles à travers un prisme culturel unique. Morteza Niknahad est également engagé dans des initiatives visant à promouvoir la photographie et l’art visuel en Iran, contribuant à un mouvement qui cherche à faire entendre la voix des artistes iraniens sur la scène mondiale.
Instagram : @morteza.niknahad – @galerie20thorigny
Quel a été votre premier déclencheur pour la photographie ?
Morteza Niknahad : La découverte. J’ai toujours été engagé dans la recherche et l’exploration. Les images fixes peuvent être pleines de mystère. Le spectateur ne voit qu’une partie d’une scène, qu’elle soit fictive ou documentaire. Si on ne lui donne pas d’informations précise, il cherche à comprendre ce qu’il voit, et les questions surgissent les unes après les autres.
Les personnes curieuses n’arrêtent jamais de poser des questions, elles se transforment simplement d’une chose à une autre.
L’homme ou la femme en image qui vous a inspiré ?
M.N. : Ma mère a toujours été une source d’inspiration pour moi.
La photo que vous auriez aimé prendre ?
M.N. : La question est un peu floue pour moi, mais dans la mesure où je la comprends, ma réponse serait que j’aimerais aller dans les endroits les plus sombres de la terre et y faire de la photographie avec une caméra de vision nocturne. Ou soyons honnêtes, je voudrais être un photographe de la liberté, j’aimerais photographier la liberté de mon peuple.
La personne qui vous a le plus influencé ?
M.N. : Je ne peux pas citer un nom spécifique, mais j’ai des noms épars en tête : Marcel Proust, David Lynch, Abbas Kiarostami, Tarkovski, Bahman Mohasses, les marins du Golfe Persique… Ils sont nombreux. Chacun à sa manière.
Quelle photo a changé le monde ?
M.N. : Aucune photo ne change le monde ; le monde est une entité brute. Une photo peut seulement l’émouvoir.
Et quelle photo a changé votre monde ?
M.N. : Je ne sais pas, peut-être les photos d’un photographe japonais, mais j’ai des doutes.
Quelle est la dernière photo que vous avez prise ?
M.N. : Je photographie tout le temps, mais la dernière était de l’anniversaire de mon neveu. Je documente la vie de ma famille. Il y a une peur là-dedans aussi, la peur d’oublier les événements, d’oublier les gens. Les photos enregistrent et rappellent tout. J’ai besoin de ces rappels, même s’ils sont amers.
Un souvenir de photographie de votre enfance ?
M.N. : Je gardais toujours mon argent de poche pour développer mes négatifs. Les photos de famille que nous avons sont celles que j’ai prises dans mon enfance.
D’après vous, quelles qualités sont nécessaires pour être un bon photographe ?
M.N. : Je ne suis pas très d’accord avec le classement de bon ou mauvais. Je pense que ce qui doit apporter de la profondeur à notre photo vient de l’arrière de l’appareil. Le problème de nos photographes est qu’ils pensent qu’ils n’ont qu’à regarder les photos et changer leurs appareils. Nous avons besoin de photographes sages.
Qu’est-ce qui fait une bonne photo ?
M.N. : Construire et développer une vision personnelle du monde.
Un livre de photographie essentiel ?
M.N. : La Chambre claire de Roland Barthes.
Votre appareil photo d’enfance ?
M.N. : Un Yashica.
Celui que vous utilisez aujourd’hui ?
M.N. : Un Sony 7C.
Comment choisissez-vous vos projets ?
M.N. : En fait, ce sont les projets qui viennent à moi. Ils surgissent en fonction de ma compréhension du sujet, de la compréhension mutuelle, et de ma disposition mentale pour ce projet.
Comment décrivez-vous votre processus créatif ?
M.N. : Il commence par la compréhension du sujet. J’étudie toujours ce sujet, que ce soit dans les sources écrites, l’observation de l’environnement, ou les conversations avec des gens. Je l’appelle vivre avec l’idée : on marche avec elle, on prend un café, on parle, on dort ensemble… Elle finit par imposer sa forme à vous.
Quel est le projet futur qui vous tient le plus à cœur ?
M.N. : Le projet actuel et futur qui m’est cher est une série intitulée Vents Noirs, sur les Iraniens d’origine africaine.
Votre drogue favorite ?
M.N. : La mer et le voyage.
Si vous n’étiez pas photographe ?
M.N. : Je serais peintre.