Jean Daniel Lorieux : avoir un regard différent
Photographe emblématique de toute une époque, Jean-Daniel Lorieux s’inscrit dans la lignée d’artistes tels que Helmut Newton ou Guy Bourdin. Alors que ces derniers et quelques autres comme, Sieff et Bailey travaillent en studio et en noir et blanc, Jean-Daniel choisit, contre toute tendance, les plus beaux sites extérieurs de la planète, la lumière et le soleil des mers du Sud. Il apprivoise icônes, nymphes et naïades sur les plages dorées des Bahamas, des Seychelles et des Maldives. Rapidement sa renommée se fait internationale, il est essentiellement connu pour ses images inondées de soleil, devenu sa signature et marquant son style. Il aime le faste et le glamour, les mises en scène flamboyantes, les belles femmes, les lieux incroyables, les couleurs contrastées et la mer… jamais loin.
Au fils des années et durant plus de vingt ans, il a collabore avec les plus prestigieux magazines de mode et les plus grands couturiers, réalisant des shootings qui s’apparentaient à des super-productions de cinéma. Hélicoptère, porte-avions, privatisation de théâtre ou de château, le photographe ne se refusait rien.
Il réalisa également les campagnes publicitaires de nombreuses maisons de luxe telles Cardin, Dior, Lanvin, Paco Rabanne ou Céline, sans oublier la campagne d’affichage de Jacques Chirac pour les législatives de 1988.
Ses images sont comme des bulles fantastiques hors du temps, des instants teintées d’un érotisme chic et joyeux où l’humour tient toute sa place.
Il aime l’action, la beauté et surtout faire naître le désir et le rire afin de pouvoir faire une belle image qui apporte de la joie. Et joyeux, il l’est encore et toujours quoi qu’il arrive car pour lui vivre des instants difficiles donne de la force !
Il aime admirer les autres, qu’il s’agisse de Richard Avedon, dont il aimait entre autre l’élégance, Helmut Newton qu’il a bien connu ou encore Guy Bourdin qui avait un talent immense, ont toujours été très inspirants pour lui.
Après sa rencontre avec Warhol à New-York, il s’exerce à la peinture en reprenant la technique du peintre : prendre une photo et en faire le contour avec de la peinture ou un crayon. Il s’est ainsi mis à réinterpréter ses photos avec succès et s’impose dans le monde de l’art en tant que portraitiste pop-art.
Infatigable conteur, ses fibres créatrices sont issues de l’humour, de la beauté et de l’action.
Il a été fait chevalier dans l’Ordre des Arts et des Lettres par Philippe Douste-Blazy en 1997, décoré de la Légion d’honneur par Jacques Chirac en 2003, et de la médaille du Maintien de l’Ordre pour ses deux années de service pendant la guerre d’Algérie.
Ses œuvres s’exposent dans le monde entier, mais surtout aux États-Unis et en Europe.
Instagram : jeandaniellorieux
Website : https://www.jeandaniellorieux.com
Votre premier déclic photographique ?
Jean-Daniel Lorieux : A mon époque, nous n’avions que peu d’activités pour nous divertir et la photographie faisait partie de celles que nous avions la possibilité de pratiquer. Cependant, alors, loin de moi l’idée d’en faire mon métier. Je me destinais plutôt à devenir ingénieur des Arts et Métiers Jésuites. Mais au retour de la guerre d’Algérie, je me suis senti si chanceux d’avoir pu revenir en vie et en bonne santé, mes envies pour le futur n’étaient plus les mêmes. Les choses que j’avais vu et vécu m’ont beaucoup marquées. Je ne me voyais vraiment plus travailler comme ingénieur. Je suis donc parti passer un week end dans le château d’une amie de ma mère, qui lors de notre séjour nous raconta que quelques jours plus tard elle devait photographier Jean Gabin. Je découvris à ce moment là que la dame n’était autre que Cosette Harcourt qui me proposa de venir l’assister. Ce fut une expérience incroyable. Mais bien que réalisant la chance qui n’avait été offerte de travailler au Studio Harcourt, j’avais, après ce que je venais de vivre, envie de lumière et de soleil. De plus j’ai toujours eu de l’admiration pour les femmes et ma rencontre avec un joli mannequin danois m’a donné envie de faire de la mode. Voilà comme je suis arrivé à la photo.
L’homme ou la femme d’image qui vous inspire ?
Jean-Daniel Lorieux : J’ai eu la chance de voir Avedon à Paris durant un de ses shooting. L’homme était élégant, le travail se passait dans la bonne humeur. Cela m’a confirmé que c’était cela que je voulais faire. De voir également les couvertures de Vogue, Harper’s Bazar, toutes montraient des femmes qui riaient et qui vous faisait rêver. Tout cela m’a motivé à devenir photographe de mode.
Par ailleurs, Pierre Cardin fut également quelqu’un de très inspirant et surtout celui qui m’a, d’une certaine manière, le pieds l’étrier en me confiant une de ses campagnes sans même savoir ce que j’étais capable de faire.
Celle qui vous a le plus ému ?
Jean-Daniel Lorieux : Beaucoup d’images m’ont ému et m’ont donné envie de faire ce métier. Parmi eux, Avedon bien sur, Guy Bourdin et le génialissime Hiro.
Et celle qui vous a mis en colère ?
Jean-Daniel Lorieux : Les photos ne me mettent jamais en colère. Elles expriment quelques choses. Alors, bien entendu, dans certains cas, le sujet peut mettre en colère, mais certes pas l’image.
Un souvenir photographique de votre enfance ?
Jean-Daniel Lorieux : Toutes les photos de famille faites chez Harcourt.
Sans limite de budget, quelle serait l’œuvre d’art que vous rêveriez d’acquérir ?
Jean-Daniel Lorieux : Bien qu’ayant été élevé dans un cadre où la peinture classique était reine, mon choix se porterait cette fois sur un Warhol.
Selon vous, quelle est la qualité nécessaire pour être un bon photographe ?
Jean-Daniel Lorieux : Tout dépend du créneau photographique, mais de manière générale pense qu’il est nécessaire et ce particulièrement dans la mode, de donner de la joie et de la bonne humeur avec style. La vie est de plus en plus difficile, elle est un combat de chaque instant, alors si en tant que photographe nous pouvons donner un peu de bonheur, cela me parait essentiel.
Quelle est selon vous la différence en la photo de vos débuts et celle que l’on pratique aujourd’hui ?
Jean-Daniel Lorieux : A mes débuts, je passais trois semaines par mois aux quatre coins du monde à photographier les plus belles femmes dans des endroits merveilleux. Nous avions le temps et surtout des budgets. Aujourd’hui tout se fait dans la précipitation avec des budgets souvent ridicules.
Quel est le secret de l’image parfaite, s’il existe ?
Jean-Daniel Lorieux : L’image parfaite n’existe pas bien entendu. Ils y a celles qui vous touchent et vous émeuvent, et il y a les autres.
La personne que vous aimeriez photographier si vous le pouviez ?
Jean-Daniel Lorieux : La liste de ceux que j’aimerais photographier est très longue, bien que ce ne soit pas mon exercice de prédilection. Néanmoins, j’adorerais refaire un photo-shoot avec Mick Jagger que j’admire beaucoup et que j’ai eu la chance de photographier à ses débuts.
Un livre de photos indispensable ?
Jean-Daniel Lorieux : Spontanément je dirais un de ceux qui parlent du travail de Hiro. Mais il y a également beaucoup d’autres très beaux livres
L’appareil photo de votre enfance ?
Jean-Daniel Lorieux : FOCA
Celui que vous utilisez aujourd’hui ?
Jean-Daniel Lorieux : Ceux que l’on m’offre. (Rires)
Votre drogue préférée ?
Jean-Daniel Lorieux : Le fou rire
La meilleure façon de vous déconnecter ?
Jean-Daniel Lorieux : D’arriver à la plage.
Quel est votre rapport personnel à l’image ?
Jean-Daniel Lorieux : Je préfère être derrière l’objectif que devant.
Votre plus grande qualité ?
Jean-Daniel Lorieux : De perdre la mémoire.
Votre dernière folie ?
Jean-Daniel Lorieux : J’en ai eu beaucoup. Alors peut être que me réveiller encore tous les matins (que je sois seul ou en charmante compagnie) me semble être une folie.
Une image pour illustrer un nouveau billet de banque ?
Jean-Daniel Lorieux : Le Dollar de Andy Warhol.
Le métier que vous n’auriez pas aimé faire ?
Jean-Daniel Lorieux : Ingénieur
Et si vous n’aviez été photographe, quel aurait pu être votre métier?
Jean-Daniel Lorieux : Mon rêve aurait être de devenir réalisateur.
Votre plus grande extravagance professionnelle ?
Jean-Daniel Lorieux : Sans hésiter, je vous dirai que ce fut d’avoir retranscrit en une cinquantaine d’images et filmé le chef d’oeuvre russe de Mikhaïl Boulgakov « Le maitre et Marguerite », avec dans le rôle de Marguerite, la délicieuse Isabelle Adjani. C’est de loin ma production la plus chère.
Quelle est, selon vous, où s’arrête la photographie et où commence la photographie d’art ?
Jean-Daniel Lorieux : Il m’est difficile de répondre à cette question. La limite entre les deux est très complexe. Qu’est ce qui est de l’art et qu’est ce qui n’en est pas ?
Une photo d’art doit montrer une originalité, il doit se passer quelque chose de particulier qui aurait été préparé ou non, dirai-je. En ce qui me concerne, je n’ai jamais eu la prétention de vouloir faire de la photographie d’art. J’ai juste eu de la chance que certaines personnes aiment mon travail et qu’il soit exposé dans certaines galeries à travers le monde.
La ville, le pays ou la culture que vous rêvez de découvrir ?
Jean-Daniel Lorieux : Tétiaroa l’ile principale de Tahiti qui a appartenu à Marlon Brando.
L’endroit dont vous ne vous lassez jamais ?
Jean-Daniel Lorieux : N’importe quelle plage.
Votre plus grand regret ?
Jean-Daniel Lorieux : Ne pas avoir eu la chance de travailler avec certaines des tops modèles de années 90 comme Tatjana Patitz, Jerry Hall ou Helena Christensen.
En termes de réseaux sociaux, êtes-vous plutôt Instagram, Facebook ou Tik Tok et pourquoi ?
Jean-Daniel Lorieux : Je laisse faire mes équipes.
Couleur ou N&B ?
Jean-Daniel Lorieux : Couleur bien sur.
Lumière du jour ou lumière artificielle ?
Jean-Daniel Lorieux : Lumière du jour, mais très travaillée.
Quelle est la ville la plus photogénique selon vous ?
Jean-Daniel Lorieux : Venise.
Si Dieu existait, lui demanderiez-vous de poser pour vous ou opteriez-vous pour un selfie avec lui ?
Jean-Daniel Lorieux : Je lui demanderai de poser bien sur.
Si je pouvais organiser votre dîner idéal, qui serait à table ?
Jean-Daniel Lorieux : Ce serait un pique nique sur la plage avec Jean Marais, Jean Cocteau, Isabelle Adjani, Pierre Cardin, Paco Rabanne, Azzedine Alaïa, Richard Avedon, Hiro, Picasso, David Hockney, Wahrol, Jean Dormesson, Françoise Sagan… et tellement d’autres qu’un seul diner ne suffirait pas.
L’image qui représente pour vous l’état actuel du monde ?
Jean-Daniel Lorieux : L’image qui me vient est celle de nuages devant le soleil.
Qu’est-ce qui selon vous manque au monde d’aujourd’hui ?
Jean-Daniel Lorieux : La vie devenant plus difficile et combative, le monde ne rit plus assez.
Si vous deviez tout recommencer ?
Jean-Daniel Lorieux : je referais pareil sans hésiter.
Un dernier mot ?
Jean-Daniel Lorieux : Plus qu’hier et moins que demain !
