Helena Georgiou : Transcender le temps et l’espace.
Helena Georgiou est une photographe chypriote. Après des études en design d’intérieur et en photographie, elle a suivi des cours à l’Université de Nicosie, puis à la Michigan State University, au MoMA à New York, et à la Harvard Extension School. Ses images, profondément influencée par l’intersection de l’architecture et de la photographie, s’attachent à capturer l’essence même des espaces architecturaux et leur impact sur la société. Récemment, Helena a élargi ses horizons en se consacrant à l’archéologie et à l’histoire à l’Open University of Cyprus, enrichissant ainsi son exploration de l’histoire humaine à travers la photographie.
Le travail de Helena est profondément poétique et se distingue par une mise en méticuleuse et un sens aigu de l’observation, couvrant un large spectre de sujets allant du portrait, à l’architecture, en passant par la photographie minimaliste. Chaque image raconte une histoire ou évoque une émotion, ce qui donne à ses photographies une qualité presque méditative.
En explorant des thèmes tels que le minimalisme, l’architecture, la conservation de l’environnement et l’expérience humaine, Helena met en lumière la capacité profonde de la photographie à créer des connexions et à raconter des histoires captivantes.
À travers son objectif, elle saisit l’essence de ses sujets, invitant le spectateur à explorer la profondeur et la complexité du monde qui nous entoure. Ses photographies capturent souvent des jeux d’ombre et de lumière qui ajoutent une dimension émotionnelle à ses images. Sa démarche transcende la simple technique pour toucher au poétique, et témoigne de son engagement à utiliser son art comme un vecteur de sensibilisation et de changement, faisant de ses contributions une part précieuse du domaine de la photographie contemporaine. En continuant à documenter le monde, Helena aspire à inspirer et émouvoir, offrant à ses spectateurs une invitation à découvrir la beauté, la complexité et les récits inscrits dans ses photographies.
Ses œuvres, marquées par une esthétique soignée et une maîtrise remarquable de la lumière, lui ont valu de prestigieuses distinctions, dont le World Sony Photography Award et trois prix du Parlement européen. Son travail est également régulièrement exposé à travers le monde.
Website : www.helenageorgiou.com
Instagram : @frau.nikon
Actualité : Elle a récemment publié un e-book sur la photographie. Il explore les techniques, et donne des conseils de tutoriels en photographie :
https://www.helenageorgiou.com/e-book.
Votre premier déclic photographique ?
Helena Georgiou : Mon premier déclic photographique a eu lieu lors d’un cours de photographie à l’université, alors que j’étudiais l’architecture intérieure. Nous explorions l’impact de l’éclairage et de la composition sur l’espace, et j’ai réalisé à quel point la photographie pouvait capturer l’essence d’un intérieur bien conçu. Voir comment une seule photographie pouvait mettre en valeur les textures, les lignes et l’ambiance d’un espace m’a fasciné. À ce moment-là, j’ai compris que la photographie n’était pas seulement un outil pour documenter des conceptions, mais une forme d’art à part entière—capable de révéler l’âme des espaces, cette forme de création me passionne.
L’homme ou la femme de l’image qui vous a inspiré ?
H.G. : Lorsque je capture des images, je trouve mon inspiration dans la résilience quotidienne et l’authenticité des gens. Une femme qui m’a profondément inspirée est une vendeuse de rue âgée que j’ai d’ailleurs photographiée. Son visage marqué par le temps racontait une vie pleine de défis, mais ses yeux brillaient d’une force tranquille et d’espoir. Cela m’a rappelée la beauté de la persévérance et l’importance de capturer ces moments d’émotion humaine authentique et d’expérience. De telles personnes m’inspirent à utiliser mon objectif pour raconter des histoires qui résonnent au-delà de la surface.
L’image que vous auriez aimé prendre ?
H.G. : Sans nul doute celle qui capture l’intersection entre l’émotion humaine brute et la beauté sublime de la nature. Imaginez une silhouette solitaire debout au bord d’une falaise à l’aube, surplombant une vaste vallée recouverte de brouillard. La lumière commence à percer les nuages, projetant une douce lueur dorée qui touche tout sur son passage. La silhouette, bien que petite dans le cadre, est le point focal—transmettant à la fois un sentiment d’isolement et de connexion avec le monde qui l’entoure. Dans cette image, je chercherais à capturer ce moment profond d’introspection et de respect qui accompagne la contemplation de quelque chose de plus grand que soi. Le contraste entre le paysage sauvage et vierge et la vulnérabilité délicate de la présence humaine parlerait des thèmes de la résilience, de la solitude et de la beauté durable de notre monde.
L’image qui vous a le plus ému ?
H.G. : La photographie qui m’a le plus ému est celle d’une femme réfugiée tenant son nouveau-né tout en guidant sa petite fille par la main. L’image est à la fois déchirante et profondément inspirante. La force et la détermination de cette femme sont palpables alors qu’elle navigue dans ses circonstances difficiles, mais il y a aussi une vulnérabilité tendre dans son étreinte du nouveau-né et la manière protectrice dont elle mène sa fille. C’est un puissant rappel de la résilience de l’esprit humain et du lien profond de la famille au milieu de l’adversité. Ce moment a capturé l’essence de la lutte, de l’espoir et de l’amour d’une manière qui m’a profondément touchée.
Et celle qui vous a mis en colère ?
H.G. : En photographie, capturer des moments consiste souvent à transmettre des émotions, mais parfois ces moments peuvent être frustrants ou même exaspérants. Un exemple en particulier qui m’a mise en colère est celui où je photographiais un événement où se déroulait une histoire puissante—une histoire de lutte, de résilience et d’espoir. Je voulais en capturer l’essence, mais il y avait tellement de distractions et d’interruptions que je n’ai pas pu obtenir la photo que j’avais imaginée. La colère ne venait pas de la situation elle-même, mais de la réalisation que j’avais manqué une opportunité de documenter pleinement quelque chose de significatif. Cette expérience m’a appris l’importance de la patience, de la persévérance et parfois simplement d’accepter que chaque cliché ne soit pas aussi parfait que prévu.
Et quelle photo a changé votre monde ?
H.G. : Deux images puissantes ont profondément changé le monde : « The Falling Man » (2001) de Richard Drew et « La petite fille au napalm » (1972) de Nick Ut. « The Falling Man » capture un homme tombant du World Trade Center après les attentats du 11 septembre, offrant un aperçu émotionnel saisissant du coût humain de cette tragédie. Elle nous pousse à affronter la perte personnelle derrière les gros titres et reste un symbole obsédant des événements de ce jour. « La petite fille au napalm » montre Kim Phúc, une jeune Vietnamienne fuyant une attaque au napalm pendant la guerre du Vietnam. Cette image a révélé les dures réalités de la guerre au grand jour, influençant fortement le sentiment anti-guerre et façonnant notre perception de l’impact des conflits sur des vies innocentes. Ces deux photographies illustrent comment des images puissantes peuvent transformer la compréhension publique et la réponse émotionnelle à des événements historiques critiques.
Qu’est-ce qui vous intéresse le plus dans une image ?
H.G. : Sans hésiter, c’est l’histoire qu’elle raconte et les émotions qu’elle évoque. Je suis attirée par les images qui ont de la profondeur et une signification au-delà de leur surface. Pour moi, les photographies les plus convaincantes capturent un moment de vérité ou de beauté qui, en d’autres circonstances, pourrait passer inaperçu. Que ce soit la manière dont la lumière interagit avec un sujet, l’expression sur le visage d’une personne, ou la composition d’une scène, je suis fascinée par la façon dont ces éléments se combinent pour créer une narration puissante ou susciter un sentiment. Je trouve également beaucoup d’intérêt dans les détails subtils—comme les textures, les motifs et les contrastes—qui ne sont peut-être pas immédiatement évidents, mais ajoutent des couches de complexité à l’image. Ces nuances peuvent transformer une simple photographie en quelque chose qui résonne à un niveau plus profond. En fin de compte, ce qui m’intéresse, c’est comment une image peut se connecter aux spectateurs et provoquer la réflexion ou l’émotion, créant une expérience partagée entre le photographe et le public.
Quelle est la dernière photo que vous avez prise ?
H.G. : Il s’agit d’une très jolie ruelle étroite sur l’île de Samos, en Grèce. J’ai été captivée par la scène en raison de son charme méditerranéen—les couleurs vibrantes des bâtiments, l’architecture pittoresque, et le jeu de lumière et d’ombre. Elle était bordée de maisons traditionnelles et de pots de fleurs colorés et incarnait vraiment l’essence du caractère pittoresque de l’île. Ce que j’ai trouvé particulièrement intrigant, c’est comment la rue semblait inviter à l’exploration, chaque tournant promettant une nouvelle découverte, et comment la lumière chaude de l’après-midi mettait en valeur les détails de l’architecture. Cette photo m’a rappelée à quel point même une rue apparemment ordinaire peut contenir une richesse d’intérêt visuel et de beauté, et cela a renforcé mon envie de capturer des détails uniques des différents endroits.
Une image clé dans votre panthéon personnel ?
H.G. : Je trouve qu’il est difficile de mettre en avant une seule image clé car mon panthéon personnel est défini par une infinité de moments plutôt qu’une photographie exceptionnelle. Chaque image que je capture est le reflet d’un moment spécifique, une interaction unique entre la lumière, le sujet et l’émotion. Mon corpus d’œuvres, dans son ensemble, représente les diverses expériences et perspectives que j’ai rencontrées. C’est l’effet cumulatif de ces images qui résonne le plus profondément en moi, plutôt qu’une seule photographie. Cette approche souligne la profondeur et la richesse de mon travail et montre que je valorise l’impact collectif de mon travail.
Un souvenir photographique de votre enfance ?
H.G. : L’un de mes premiers souvenirs, qui me semble presque aussi net qu’une photographie, remonte à l’époque où j’avais environ sept ans. Je me souviens d’un après-midi d’été chez mes grands-parents, où la lumière du soleil entrait par la fenêtre de la cuisine, projetant des motifs sur le sol. Ma grand-mère préparait sa célèbre tarte aux pommes, et l’odeur remplissait la pièce. J’étais assise à la table de la cuisine, en train de colorier, et je me rappelle encore les couleurs vives des crayons et le bourdonnement doux de la vieille radio en arrière-plan. Ce qui est intéressant, c’est que ce souvenir est aussi détaillé qu’une photographie—chaque moment est gravé si nettement dans mon esprit, depuis la texture de la croûte de la tarte jusqu’à la manière dont la lumière dansait sur les murs. Ce moment est resté avec moi car il était si riche en détails sensoriels, et c’est quelque chose à quoi je pense souvent lorsque je cadre une photo ou que je cherche cette lumière parfaite. Il est fascinant de voir comment un seul moment peut être si impactant, et ce sont ces types de souvenirs qui m’inspirent à capturer l’essence de moments fugaces dans mes images.
Selon vous, quelle est la qualité nécessaire pour être un bon photographe ?
H.G. : Il me semble que la qualité la plus cruciale est un profond sens de la curiosité. Cette curiosité vous pousse à explorer et à observer le monde de manière unique, vous incitant à découvrir et à capturer des moments que d’autres pourraient négliger. Elle alimente votre désir d’expérimenter avec différentes perspectives, compositions, et techniques. Ce n’est pas seulement une question de voir ce qui est visible, mais de percevoir ce qui est caché les émotions non exprimées, les histoires inexplorées, les subtilités d’une scène. La curiosité vous encourage à poser des questions à travers votre photographie et à chercher des réponses dans les images que vous créez. Elle vous permet de rester engagé, inspiré et passionné, même dans les moments où la créativité semble stagner. Un photographe curieux est capable de transformer l’ordinaire en extraordinaire simplement en cherchant à voir le monde sous un autre angle.
Qu’est-ce qui fait une bonne photo ?
H.G. : Une bonne photo est un mélange harmonieux de plusieurs éléments. Tout d’abord, la composition joue un rôle crucial. L’utilisation efficace du cadrage, des lignes directrices et de la règle des tiers aide à guider le regard du spectateur et à créer une image équilibrée. La lumière est tout aussi importante ; elle peut créer une ambiance, mettre en valeur les détails et donner de la profondeur à une photographie. Cependant, les aspects techniques ne suffisent pas à définir une bonne photo. L’émotion et la narration sont ce qui élève véritablement une image. Une grande photo transmet souvent un sens de l’histoire ou du ressenti, capturant un moment d’une manière qui résonne avec les spectateurs. Cela peut provenir du sujet, de l’expression ou même de l’atmosphère. Enfin, la créativité et l’originalité jouent un rôle significatif. Une perspective unique ou une approche innovante peuvent faire ressortir une image et laisser une impression durable. C’est cette combinaison de compétences techniques, de profondeur émotionnelle et de vision créative qui rend une photo vraiment captivante.
La personne que vous aimeriez photographier ?
H.G. : Si je pouvais photographier n’importe qui, je choisirais Woody Allen. Ses contributions au cinéma et à la narration sont profondes et multifacettes, et réaliser son portrait serait un défi fascinant. Le style et la personnalité distinctifs d’Allen—un mélange de curiosité intellectuelle, d’esprit et de vulnérabilité—offrent un riche terrain à explorer à travers la photographie. Je serais intriguée de plonger dans les nuances de son caractère, capturant non seulement ses traits externes mais aussi les couches d’introspection et de créativité qui le définissent. Sa présence iconique et les subtilités de sa personnalité offriraient une occasion unique de créer une image reflétant à la fois son personnage public et les complexités privées qui ont façonné son œuvre.
Un livre de photographie indispensable ?
H.G. : Les Américains de Robert Frank. Publié en 1958, ce livre est une œuvre révolutionnaire dans le monde de la photographie. La représentation brute et candide de la vie américaine dans les années 1950 par Frank a défié les conventions de la photographie de l’époque et a influencé d’innombrables photographes depuis. Sa capacité à capturer l’essence d’une époque, d’un lieu et d’une culture avec une telle profondeur émotionnelle en fait un ouvrage incontournable pour tout photographe ou passionné de photographie. C’est un livre qui met en valeur non seulement la compétence technique mais aussi le pouvoir de la narration à travers les images.
L’appareil photo de votre enfance ?
H.G. : Il s’agit d’un appareil photo argentique 35mm, spécifiquement un Kodak Star que mes parents possédaient. C’était un simple appareil compact que nous utilisions lors des vacances en famille, des anniversaires, des fêtes et pour capturer les moments quotidiens. Je me souviens avoir été fascinée par le processus—charger le film, le bruit satisfaisant du mécanisme d’enroulement, et ensuite la longue attente pour voir les photos développées. Cet appareil photo n’était pas high-tech selon les standards d’aujourd’hui, mais pour moi, c’était magique. Il m’a appris à valoriser chaque prise, car le film était limité, donc il fallait que chaque photo soit murement réfléchie. Je crois que cette exposition précoce à la photographie a jeté les bases de mon approche en tant que photographe aujourd’hui. J’essaie toujours de capturer les moments avec le même sens de l’importance et du soin, même à l’ère du numérique.
Celui que vous utilisez aujourd’hui ?
H.G. : J’utilise actuellement un Nikon D750 et des objectifs 50mm et 24-105mm pour mon travail, mais, j’ai régalement réalisé que l’appareil photo n’est qu’un outil ce qui compte vraiment, c’est la vision qui se cache derrière. Celui de mon enfance était un simple point-and-shoot, et aujourd’hui j’utilise un modèle numérique sophistiqué, mais l’essence de la photographie reste inchangée pour moi. Ce qui motive mon travail, ce n’est pas l’équipement, mais l’histoire que je tente de raconter, l’émotion que je veux capturer, et la façon dont je vois le monde. Que j’utilise un appareil photo de pointe ou simplement un smartphone, mon objectif est toujours de trouver ce moment parfait, cette perspective unique, et de lui donner vie. Au fil des années, j’ai appris que ce n’est pas une question de mégapixels ou d’objectif ; mais la manière dont on utilise les outils à sa disposition pour exprimer sa vision créative qui est essentielle. L’appareil photo est important, mais c’est la personne derrière l’objectif qui fait véritablement l’image.
Comment choisissez-vous vos projets ?
H.G. : Je les choisis en fonction d’un mélange de passion, de but et de potentiel créatif. Je m’intéresse à l’histoire derrière le projet. Je me pose toujours la question : Quelle histoire raconter ? Comment ce projet peut-il contribuer à une conversation plus large ou offrir une nouvelle perspective ? L’aspect narratif est crucial parce que je crois que la photographie est un outil puissant pour raconter des histoires et créer des liens. En fin de compte, je choisis des projets qui m’enthousiasment et offrent une manière significative d’interagir avec le monde. Que ce soit un projet personnel ou un travail commandé, je suis motivée par le désir de créer des images qui inspirent, suscitent la réflexion et laissent une empreinte durable.
Comment décririez-vous votre processus créatif ?
H.G. : C’ est un mélange d’intuition, de recherche et d’expérimentation. Il commence généralement par l’inspiration, qui peut venir de n’importe quoi—un moment fugace, une musique, une conversation ou quelque chose que je vois dans la vie quotidienne. Une fois que j’ai une idée, je passe du temps à faire des recherches et à m’immerger dans le sujet. Cela peut impliquer l’étude du lieu, la compréhension du contexte culturel ou l’exploration des émotions que je souhaite transmettre.
Un projet à venir qui vous tient à cœur ?
H.G. : C’est une série documentaire photographique qui se concentre sur les traditions en voie de disparition des communautés rurales de ma région, y compris les professions qui sont en train de disparaître. J’ai toujours été fascinée par la manière dont le patrimoine culturel façonne les identités, et ce projet vise à capturer les histoires de personnes qui s’efforcent de préserver leur mode de vie face à la modernisation. Ce projet est important pour moi car il est lié à mes propres racines et aux histoires que j’ai entendues en grandissant. Je veux capturer la résilience et la beauté de ces communautés, en mettant en lumière leurs traditions, leur vie quotidienne et les défis auxquels elles sont confrontées. Mon objectif est de créer une archive visuelle qui non seulement célèbre leur culture, mais aussi sensibilise à l’importance de la préserver pour les générations futures.
Votre drogue préférée ?
H.G. : En tant que photographe, si je devais penser à « ma drogue préférée » au sens métaphorique, ce serait la créativité. C’est la force motrice derrière mon travail et la source de mon inspiration. Comme une drogue qui stimule ou motive, la créativité m’énergise et alimente ma passion pour capturer des moments et raconter des histoires à travers mon objectif. C’est ce qui me pousse à être enthousiaste pour chaque nouveau projet et à explorer constamment de nouvelles idées.
La meilleure façon de déconnecter pour vous ?
H.G. : C’est de m’immerger dans la nature. Que ce soit en faisant de la randonnée en forêt, en passant du temps à la plage, ou simplement en me promenant dans un parc, être en plein air m’aide à clarifier mon esprit et à me ressourcer. C’est un changement de rythme rafraîchissant par rapport au monde souvent trépidant et numérique de la photographie. De plus, je trouve que m’engager dans des loisirs créatifs sans rapport avec la photographie—comme la lecture ou la cuisine—m’aide également à me détendre. Ces activités me permettent de m’éloigner des aspects techniques de mon travail et d’aborder la créativité sous un angle différent, ce qui peut être incroyablement revitalisant. Prendre le temps de déconnecter et de profiter de ces moments m’aide à revenir à mon travail avec une énergie renouvelée et de nouvelles perspectives.
Quelle est votre relation à l’image ?
H.G. : Ma relation à l’image est profondément liée à la fois à ma pratique professionnelle et à ma perspective personnelle. En tant que photographe, les images ne sont pas simplement des représentations visuelles—elles sont des outils puissants de narration et d’expression. Chaque image que je crée est un moment capturé dans le temps qui transmet des émotions, une histoire, et un contexte. Je les considère comme un moyen de communiquer des idées et de créer une connexion émotionnelle avec les spectateurs. Sur le plan personnel, les images ont une signification particulière pour moi, car elles reflètent souvent des souvenirs, des expériences, et des observations. Je trouve que la manière dont nous voyons et interprétons les images peut révéler beaucoup sur nos perspectives et le monde qui nous entoure. En somme, ma relation avec l’image est à la fois une relation de création et de contemplation. Je cherche constamment à capturer et à transmettre l’essence d’un moment à travers mon objectif, tout en réfléchissant à la manière dont les images influencent notre compréhension et notre perception de la réalité.
Par qui aimeriez-vous être photographié ?
H.G. : Si je pouvais choisir quelqu’un pour me photographier, j’adorerais être capturée par Annie Leibovitz. Sa capacité à créer des portraits saisissants et narratifs, ainsi que son approche unique de l’éclairage et de la composition, sont vraiment inspirantes. Elle possède un talent remarquable pour révéler la personnalité de ses sujets, et je suis fascinée par la manière dont elle raconte des histoires à travers ses images. Être photographiée par quelqu’un avec une telle vision serait non seulement une expérience incroyable, mais aussi l’occasion de me voir à travers un autre prisme créatif. Ce serait intéressant d’explorer comment une autre artiste interprète ma personne et comment son style pourrait révéler des aspects de mon caractère que je ne verrais peut-être pas habituellement dans mon propre travail.
Votre dernière folie ?
H.G. : Ma dernière folie a été une séance photo spontanée dans un parc d’attractions abandonné. J’ai décidé de photographier la nuit, avec un éclairage minimal et quelques accessoires créatifs. C’était une idée un peu folle—naviguer dans l’obscurité, faire face à une météo imprévisible, et travailler avec des configurations d’éclairage inhabituelles. Mais les résultats en valaient la peine ; j’ai capturé des images à la fois troublantes et magnifiques que je n’aurais pas obtenues avec une approche plus conventionnelle. C’était un rappel que parfois, sortir de sa zone de confort et embrasser le chaos peut mener à un travail vraiment unique et mémorable.
Une image pour illustrer un nouveau billet de banque ?
H.G. : Je suggérerais une image qui incarne à la fois le riche patrimoine et l’esprit progressiste de la nation. Par exemple, un design qui intègre un mélange d’éléments historiques et modernes—comme une représentation stylisée d’un monument significatif combinée à des motifs abstraits et innovants—pourrait être puissant. Cette approche rend hommage au passé du pays tout en symbolisant ses aspirations futures. De plus, intégrer des motifs et des textures complexes dans l’image peut renforcer les caractéristiques de sécurité du billet, assurant qu’il reste à la fois visuellement attrayant et sécurisé contre la contrefaçon. L’objectif est de créer un design qui résonne avec les citoyens, représente la fierté nationale, et résiste à l’épreuve du temps.
Le métier que vous n’auriez pas aimé faire ?
H.G. : En tant que photographe, je m’épanouis dans la créativité et les expériences dynamiques, donc les rôles plus routiniers et axés sur les chiffres, comme comptable ou employé de banque, ne seraient probablement pas les mieux adaptés pour moi. Bien que ces rôles soient cruciaux et précieux, je me nourris de la nature artistique et dynamique de la photographie. J’aime explorer de nouvelles perspectives, capturer des moments uniques, et me challenger constamment avec différents projets. Les métiers qui manquent de cette variété et de cette stimulation créative seraient moins épanouissants pour moi.
Votre plus grande extravagance professionnelle ?
H.G. : Sans doute le nombre de voyages que j’entreprends pour mon travail. Au cours du dernier mois, j’ai été fréquemment sur la route, explorant divers lieux pour capturer des perspectives uniques et des moments authentiques. Bien que cela puisse être exigeant, ces voyages sont essentiels pour ma photographie, car ils me permettent de me connecter avec différentes cultures et paysages qui enrichissent mon portfolio. L’investissement en temps et en ressources est considérable, mais c’est une partie vitale pour produire un travail vraiment captivant et diversifié.
Quelle question vous agace ?
H.G. : Les questions sur l’équipement photo que j’utilise peuvent parfois détourner l’attention des aspects créatifs de mon travail. Bien que le matériel soit important, je crois que l’essence même de la photographie réside dans la vision et la narration derrière les images. Je préfère discuter des concepts et des techniques qui animent mon travail plutôt que de me perdre dans les détails techniques de mon appareil photo.
Quelle est la dernière chose que vous avez faite pour la première fois ?
H.G. : Expérimenter la photographie à double exposition. J’avais toujours admiré les possibilités créatives de combiner plusieurs images en un seul cadre, mais je ne l’avais jamais essayé moi-même. Pour commencer, j’ai étudié différentes techniques et pratiqué avec les réglages de l’appareil photo ainsi qu’avec des méthodes de retouche numérique. Le processus consistait à capturer deux images distinctes—l’une d’un portrait et l’autre d’un paysage—puis à les fusionner pour créer une histoire visuellement captivante. La première fois que j’ai vu le résultat final, où les textures du paysage se fondaient harmonieusement avec les contours du portrait, j’ai ressenti une immense satisfaction. Cette nouvelle technique a enrichi ma palette créative et m’a incitée à réfléchir plus profondément à la manière de transmettre des récits complexes à travers mes images.
La ville, le pays ou la culture que vous rêvez de découvrir ?
H.G. : Marrakech, au Maroc, est ma destination de rêve en raison de ses couleurs vibrantes et de son riche patrimoine culturel. Les marchés animés de la ville, son architecture complexe, et ses scènes de rue vivantes offrent des possibilités photographiques infinies. Des palais traditionnels minutieusement décorés aux paysages époustouflants des montagnes de l’Atlas et du désert du Sahara, Marrakech promet une toile diversifiée et inspirante pour capturer à la fois l’essence de la culture marocaine et la beauté naturelle du pays.
Le lieu dont vous ne vous lassez jamais ?
H.G. : La Grèce et en particulier ses îles. Le mélange unique de paysages époustouflants, d’histoire riche, et de culture vibrante offre une inspiration sans fin pour ma photographie. Chaque île a son propre caractère—qu’il s’agisse des falaises dramatiques de Santorin, des rues blanchies à la chaux de Mykonos, ou de la beauté tranquille des plages de Crète. La lumière changeante et la manière dont elle interagit avec le paysage, du bleu profond de la mer Égée aux architectures locales colorées, ne cessent de me captiver. Chaque visite révèle de nouveaux détails et perspectives, faisant de chaque retour une aventure nouvelle.
Votre plus grand regret ?
H.G. : Au début, j’étais très concentré sur le perfectionnement de certaines techniques et styles que je savais efficaces, mais j’ai parfois manqué l’occasion d’explorer d’autres chemins créatifs. Avec le recul, je regrette de ne pas m’être davantage poussée à expérimenter différents genres ou méthodes non conventionnelles. Cependant, je considère cela comme une leçon précieuse qui m’a appris l’importance de sortir de ma zone de confort et d’embrasser les risques créatifs. Aujourd’hui, je cherche activement des opportunités pour me mettre au défi et essayer de nouvelles approches, ce qui a été incroyablement enrichissant pour mon parcours en tant qu’artiste.
En termes de réseaux sociaux, êtes-vous plus Instagram, Facebook, Tik Tok ou Snapchat et pourquoi ?
H.G. : Instagram est mon réseau social principal pour présenter mon travail. Son format centré sur l’image est idéal pour les photographes, car il me permet de présenter mon portfolio de manière claire et engageante. L’accent mis sur les images et les vidéos sur la plateforme me permet d’atteindre un public qui apprécie l’art de la photographie. De plus, les fonctionnalités d’Instagram comme les Stories et Reels offrent des moyens créatifs de partager des contenus en coulisses, des vidéos de processus, et d’interagir avec les abonnés. Bien que j’apprécie Facebook pour ses capacités à créer des communautés et à offrir la possibilité de créer des albums détaillés, je trouve que l’accent mis par Instagram correspond plus directement à mes besoins en tant que photographe. L’interface de Facebook peut être un peu encombrée, et son algorithme tend à prioriser le contenu textuel et les liens partagés plutôt que les publications visuelles.
Couleur ou noir et blanc ?
H.G. : Le choix entre la couleur et le noir et blanc dépend vraiment de l’histoire que vous voulez raconter. La couleur peut apporter de la vivacité et transmettre l’atmosphère d’une scène, facilitant ainsi la connexion avec le spectateur à un niveau sensoriel. Elle est idéale pour mettre en valeur les détails et créer un sentiment de réalisme. D’un autre côté, la photographie en noir et blanc enlève la distraction des couleurs, permettant au spectateur de se concentrer davantage sur la composition, la texture et la forme. Elle peut donner un caractère intemporel et classique à vos images et met souvent en avant l’impact émotionnel du sujet. En fin de compte, il ne s’agit pas de savoir lequel est meilleur que l’autre, mais de savoir lequel sert le mieux le but de l’image et le message que vous voulez transmettre. Parfois, une histoire est mieux racontée en couleur, tandis que d’autres fois, le noir et blanc est plus puissant. Tout est une question de choix conscient en fonction de l’effet que vous souhaitez obtenir.
Lumière naturelle ou lumière artificielle ?
H.G. : La lumière naturelle est mon choix préféré, car elle apporte une qualité dynamique et authentique à mes images. La lumière changeante tout au long de la journée ajoute de la chaleur et de la profondeur, créant des résultats authentiques et flatteurs. J’aime la façon dont la lumière naturelle capture la véritable essence d’une scène, révélant des détails et des textures que la lumière artificielle ne peut souvent pas égaler. Bien qu’elle soit imprévisible, la beauté unique et la spontanéité de la lumière naturelle en font un élément clé de ma photographie.
Quelle ville pensez-vous être la plus photogénique ?
H.G. : Il y en a deux pour moi. Paris, célèbre pour son imagerie romantique et emblématique, avec des monuments comme la tour Eiffel, Notre-Dame, et le Louvre, ainsi que des rues charmantes et des vues pittoresques de la Seine. Sa lumière douce et dorée et sa vie de rue vibrante renforcent son attrait photogénique. Et, Vienne qui offre une élégance raffinée avec son architecture grandiose, comme le palais de Schönbrunn et la cathédrale Saint-Étienne. Ses quartiers historiques bien préservés, ses parcs sereins, et le fleuve Danube créent une beauté classique et majestueuse.
Si Dieu existait, lui demanderiez-vous de poser pour vous, ou opteriez-vous pour un selfie avec lui ?
H.G. : Si Dieu existait, je pense que j’opterais pour une approche plus profonde et contemplative plutôt qu’un simple selfie. Je voudrais prendre le temps de comprendre l’histoire derrière une telle présence extraordinaire. Une photographie posée pourrait capturer un moment de grâce et de signification, permettant une exploration plus approfondie de la nature divine et du message qu’elle pourrait transmettre. Un selfie, bien que personnel et immédiat, ne rendrait peut-être pas justice à la gravité et au mystère d’une telle rencontre. Au lieu de cela, un portrait soigneusement élaboré pourrait refléter la révérence et l’émerveillement que ce moment inspirerait. Ce serait l’occasion de créer quelque chose qui résonne à un niveau plus profond, capturant non seulement une image mais l’essence d’une présence extraordinaire.
Si vous pouviez organiser votre dîner idéal, qui serait à la table ?
H.G. : J’aime cette question car elle me rappelle mon film préféré, Midnight in Paris de Woody Allen. Si je pouvais organiser mon dîner idéal, ma liste d’invités comprendrait :
Henri Cartier-Bresson – Pour discuter de son approche révolutionnaire de la capture du « moment décisif » et explorer ses vues sur l’art de la photographie et son pouvoir de figer le temps.
Albert Camus – Pour plonger dans des conversations philosophiques sur la vie, l’art, et la condition humaine. Ses réflexions existentialistes offriraient des perspectives profondes sur le monde et la créativité.
Salvador Dalí – Pour expérimenter l’imagination surréaliste et fantaisiste de l’un des artistes les plus emblématiques du XXe siècle. Sa présence ajouterait sans aucun doute un élément de fascination et de ludisme à la soirée.
Manos Hadjidakis – Le compositeur grec connu pour sa musique évocatrice et émotionnellement résonnante. Ses compositions pourraient fournir une bande-son magnifique à nos discussions, alliant expression artistique et profondeur culturelle.
Ensemble, ce mélange extraordinaire d’esprits ferait de cette soirée un moment riche en échanges stimulants, en inspiration artistique, et en une touche de surréalisme. Ce serait un mélange unique de photographie, de philosophie, d’art, et de musique, créant un dîner véritablement inoubliable.
L’image qui représente pour vous l’état actuel du monde ?
H.G. : C’est une question réfléchie. Pour moi, l’image qui représente l’état actuel du monde serait probablement un mélange frappant d’espoir et de défis. Imaginez un paysage divisé : d’un côté, des scènes de dégradation environnementale et de troubles sociaux—calottes glaciaires qui fondent, camps de réfugiés bondés et manifestations pour la justice. De l’autre côté, des moments d’une beauté profonde et de progrès : des gens qui se rassemblent pour lutter contre le changement climatique, des technologies innovantes en développement, et des actes de bonté qui créent des ponts. Cette dualité reflète la nature complexe de notre époque, où des luttes significatives coexistent avec des efforts inspirants pour un changement positif. Cela capture la tension entre le besoin urgent d’agir et la résilience durable de l’esprit humain. En tant que photographe, on peut trouver cette dualité captivante, offrant un récit riche sur l’état du monde aujourd’hui.
Selon vous, qu’est-ce qui manque dans le monde actuel ?
H.G. : Dans le monde actuel, je pense qu’il nous manque une connexion plus profonde et plus nuancée avec l’expérience humaine. Avec la prévalence des médias numériques et des réseaux sociaux, il y a une quantité écrasante de contenu, mais il manque souvent d’authenticité et de profondeur. En tant que photographe, je crois qu’il y a une opportunité unique de capturer et de mettre en avant les moments bruts et authentiques qui pourraient autrement passer inaperçus.
Ce qui manque, c’est un accent collectif sur les histoires qui se cachent sous la surface—les moments quotidiens de vulnérabilité, de résilience et de beauté qui définissent notre humanité. En se concentrant sur ces aspects, la photographie peut combler les fossés entre les gens, favorisant l’empathie et la compréhension à travers des expériences et des cultures diverses. Il ne s’agit pas seulement de capturer des images, mais de raconter des histoires qui résonnent à un niveau plus profond.
Si vous deviez tout recommencer ?
H.G. : Je me concentrerais sur la construction d’une solide base en narration dès le début. Bien que les compétences techniques et l’équipement soient importants, l’essence d’une photographie percutante réside dans la capacité à transmettre une narration captivante à travers les images. Je passerais plus de temps à comprendre le contexte émotionnel et culturel des sujets que je photographie, visant à capturer non seulement leur apparence mais aussi leur essence et leurs expériences. De plus, j’explorerais des genres et des styles divers dès le début pour élargir ma gamme créative et découvrir ce qui résonne vraiment avec moi.
Ce que vous aimeriez que les gens disent de vous ?
H.G. : J’aimerais qu’ils disent que ma photographie capte l’essentiel de ce qu’ils sont, ou alors que mes images racontent des histoires qui résonnent avec eux sur un plan personnel. En fin de compte, j’espère que mon travail inspire des émotions et de la réflexion, et que les gens me voient comme une personne qui est dédiée à créer des moments significatifs et authentiques à travers mon objectif.
Un dernier mot ?
H.G. : Pour moi, la photographie est plus que de simples prises de vues ; il s’agit de capturer les fils invisibles qui nous relient tous. J’espère que mon travail résonne avec les spectateurs et leur rappelle la beauté et la profondeur du monde qui nous entoure. Merci de me permettre de partager ma perspective et ma passion.