César Chouraqui est un artiste à la croisée des mondes, où la musique, l’image et la narration s’entrelacent pour former un univers unique et profondément personnel. Polyvalent et audacieux, il incarne une nouvelle génération de créateurs pluridisciplinaires. Tour à tour comédien, réalisateur, photographe, producteur et musicien, au-delà de ces titres, il est avant tout un conteur moderne qui s’inscrit dans une tradition de visionnaires qui transcendent les frontières artistiques.
Ayant grandi dans une famille multiculturelle, il a su puiser dans ses racines une sensibilité particulière pour raconter des histoires visuelles et sonores qui résonnent bien au-delà des cadres habituels. Son travail, aussi bien influencé par le cinéma, la photographie que la musique, s’articule autour de thématiques universelles et contemporaines : la quête de soi, l’exploration des émotions, la technologie, et le rôle de l’artiste dans un monde en constante évolution.
Son approche de l’image et du son est instinctive et quasi obsessionnelle. Que ce soit dans ses clips musicaux ou ses projets personnels, il parvient à saisir l’essence de l’instant, à capter la fugacité du moment avec une précision et une justesse désarmante. Passionné par la photographie en noir et blanc, il est également fasciné par l’exploration des palettes de couleurs vives, jouant avec les contrastes pour créer des univers visuels qui allient simplicité et profondeur. Ce n’est pas seulement le style qui l’intéresse, mais la capacité à véhiculer une émotion brute et sincère à travers chaque image, chaque son.
L’un des aspects les plus fascinants de son parcours est son insatiable soif d’expérimentation. Loin de se reposer sur ses acquis, César Chouraqui s’aventure sans cesse dans de nouvelles collaborations artistiques, cherchant à pousser les limites de son art. Son travail avec des figures emblématiques de la musique, du cinéma et de la mode témoigne de son ouverture d’esprit et de sa capacité à s’immerger dans des projets qui dépassent les simples conventions. Son clip « 33 – Dax Remix » réalisé avec Philip Gay, illustre cette volonté d’explorer l’inédit, mêlant des techniques photographiques classiques à une esthétique contemporaine et audacieuse.
Mais ce qui le rend véritablement unique, c’est sa vision du monde. Pour lui, la création artistique est un moyen de questionner et de refléter la société, tout en insufflant une touche de rêve et de poésie. Il jongle avec le réel et le symbolique, et ses œuvres révèlent souvent une tension entre le tangible et l’intangible, entre la réalité brute et une certaine aspiration spirituelle. Son admiration pour des artistes comme Dépêche Mode et le photographe Anton Corbijn révèle cette dimension introspective et parfois mystique de son travail.
En somme, César Chouraqui est plus qu’un artiste multi-talents ; il est un explorateur de la psyché humaine, un bâtisseur de ponts entre les époques et les disciplines, et un témoin attentif de la beauté comme du chaos du monde contemporain. À travers ses créations, il invite à voir au-delà de l’apparence, à ressentir la profondeur de l’instant, et à redéfinir ce que signifie être un artiste aujourd’hui.
Instagram : @cesarchouraqui
Le(s) photographe(s) qui vous inspire(nt) :
César Chouraqui : La réalité c’est que j’ai mis longtemps à construire ma culture photographique car je ne la voyais pas comme corps de métier, mais plus comme un accessoire qui me permettait de ne pas oublier.
Les premiers Photographes qui m’ont inspiré sont ceux dont ma mère m’a parlé quand j’étais jeune, Richard Avedon, Nan Goldin, Irving Penn, Anton Corbjin (à qui je suis beaucoup revenu plus tard en construisant ma petite bibliothèque d’inspiration).
Je me suis, en grandissant, rapproché d’images qui m’apportaient un apaisement d’âme, qui connectaient avec des aspects de l’histoire de la terre et de l’humanité que je n’avais pas forcément eu l’occasion de voir et qui allaient chercher en moi une partie plus spirituelle dont j’avais grandement besoin.
C’est grâce au « Sel de la terre » que j’ai découvert le travail de Sebastiao Salgado, et dont j’offre à ma mère un nouveau livre tous les ans pour son anniversaire tant je suis obsédé par son travail, sur ce qu’est notre planète au sens large.
Celle qui a le plus ému :
César Chouraqui : En seconde, mon professeur d’histoire géographie a brièvement évoqué les événements qui ont amené au « massacre de Tian’anmen ».
Je me souviens que pour illustrer son propos, elle nous avait montré l’image de l’américain Jeff Widener « Tank Man » sur laquelle on peut voir un jeune homme en chemise blanche sac à la main face à quatre char de l’armée populaire de libération. Son langage corporel m’avait frappé. Pourtant impétueux dans son action (la répression aura fait 15 milles morts) il apparaît comme un dresseur en contrôle, serein, face à quatre énormes fauves. Le calme qui confronte la folie.
L’image que vous auriez aimé prendre ?
César Chouraqui : Celle-ci.
Celle qui vous a mis en colère ?
César Chouraqui : La photo de Kim Phuc par Nick Ut.
La qualité nécessaire pour être un bon photographe ?
César Chouraqui : Savoir ce qui est important. Je fonctionne très différemment en musique et en photographie. Mettre en place un projet visuel m’a toujours pris beaucoup plus de temps, car mon objectif est d’emmener le spectateur dans la symbolique que j’ai choisi de mettre en avant dans l’histoire que je raconte.
La musique est plus vibrante. Chacun ressent ce qu’il a envie de ressentir ; à partir du moment où elle est écrite, elle ne nous appartient plus. Je travaille d’ailleurs actuellement en partenariat avec la maison Balmain sur des vidéos clips, c’est intéressant de voir comment l’expérience de la chanson mise en images se répercute différemment sur les personnes qui m’accompagnent sur ce projet, et les choix auxquels il faut faire face lorsque nous voulons imposer un univers qui fonctionnerait pour tous les partis.
Quelle photo a changé le monde ?
César Chouraqui : J’imagine que les photos de David Seymour (Chim), Henri Cartier-Bresson, Lee Miller, Alfred Eisenstaedt ont dû changer la face du monde…
Et quelle photo a changé votre monde ?
César Chouraqui : Je me suis demandé ce que c’était le monde la première fois qu’on m’a montré ses photos.
Le secret de l’image parfaite ?
César Chouraqui : Celle qui a pour but d’enseigner.
Quelle est la dernière photo que vous avez prise ?
César Chouraqui : La photo de Khadija sous sa Burqa. J’étais en voyage au Kenya et je trainais en ville. Elle est venue m’aborder dans la rue parce qu’elle avait vu mon appareil et elle m’a dit « Prends moi en photo, je viens de m’acheter ma tenue »
J’en ai pris deux et je lui en ai laissé une. On a parlé un peu de ses enfants après, c’était sympa.
Votre premier appareil photo ?
César Chouraqui : Le Nokia 7650 je crois.
Celui que vous utilisez aujourd’hui ?
César Chouraqui : En ce moment, Instax mini 40, en réaction à mes projets de vidéo clips, j’essaye de voir ce que je peux faire avec moins. C’est un appareil d’instantanéité. Trouver une forme de spontanéité qui, comme je l’expliquais plus haut m’est plus naturel lorsqu’il s’agit de la composition. Et puis tu peux laisser un pola à quelqu’un de sympa dans la rue à l’occasion.
Comment choisissez-vous vos projets ?
César Chouraqui : Je viens d’un milieu où on n’a pas forcément la liberté de pouvoir choisir (l’acting). Mais j’ai appris au fil du temps que beaucoup de choses perdent leur valeur si elles sont guidées uniquement par des intérêts. Par conséquent, je privilégie l’instinct sur la réflexion. C’est un exercice difficile, car l’instinct est quelque chose de très personnel ; chacun a sa propre sensibilité, et il n’est pas rare que les autres essaient de vous réorienter quand ils ne saisissent pas votre vision. Souvent, les idées les plus prometteuses paraissent absurdes jusqu’à ce qu’elles soient réalisées et puissent se justifiées de manière tangible.
Comment décririez-vous votre processus créatif ?
César Chouraqui : L’instinct donc, puis la mise en place. Un peu à la manière des surréalistes et de leurs cadavres exquis. On balance les idées qui viennent sur le moment, on revoit tout ce qui a été posé, puis on garde le meilleur pour s’en servir comme base de travail. Concernant la photographie, je m’impose souvent des limites jusqu’à ce que je ressente que je ne peux pas aller plus loin. Récemment, j’ai réalisé des portraits de personnes rencontrées au détour de ruelles, en veillant à toujours demander la permission avant de les photographier. Je ne voulais rien prendre sans leur accord. Ce qui m’intéressait ici, c’était d’établir un contact avec les sujets, d’observer la confiance qu’ils pouvaient m’accorder en si peu de temps, ainsi que la réaction physiologique qui en découle. Une fois de plus, il s’agissait de préserver cette spontanéité que je peux parfois perdre en remettant en question mes premiers instincts.
Une image clé dans votre panthéon personnel ?
César Chouraqui : Je ne sais pas si c’est une image clef, mais j’aime particulièrement la photo de ces deux jeunes femmes en blanc devant des maisons roses à Venice Beach. Comme je l’ai mentionné, j’aime avoir le contrôle, orchestrer les scènes et savoir où je vais. Cette image m’a démontré que la mise en scène ne nécessite pas toujours une préparation élaborée ; c’est là toute la magie de la photographie par rapport à la vidéo. Saisir une scène banale au bon moment, peut produire des résultats saisissants et, à elle seule, raconter une histoire. J’ai capturé cette photo au détour d’une ruelle des canaux, après que mon associé, Thomas Desarnaud, ait souligné : « Elles sont très élégantes, celles-là. » Un peu comme un William Eggleston, qui privilégie souvent une seule image, j’ai eu l’impression que la mise en scène tant recherché se révélait à moi, avec le mouvement des robes, le décor et les couleurs en parfaite harmonie. La même réflexion s’applique à la photo de la maison, également prise dans les canaux. Si vous regardez attentivement, vous apercevrez un raton laveur mort au premier plan, en bas à droite. Ça m’a touché, car j’adore les animaux et un raton laveur est évidemment mignon. Pourtant, cette situation m’a semblé intéressante, car elle illustre encore une fois le concept de mise en scène: une petite maison bourgeoise, située dans l’un des quartiers les plus prisés de Los Angeles, avec sa pelouse impeccablement entretenue, devient le théâtre tragique des réalités de la vie. Une telle ironie peut que surprendre et mettre en scène ça sert à ça.
Qu’est-ce qu’est une bonne photo ?
César Chouraqui : Ce n’est pas vraiment ce qu’elle est, c’est ce qu’elle raconte.
Un projet à venir qui vous tient à cœur ?
César Chouraqui : Rien à voir avec la photo. C’est la sortie de mes deux albums, celui de mon projet perso « César Chouraqui and The Idem Colony » et celui du groupe « MKCC » que j’ai formé avec Morgan Kibby. J’ai toujours été très fan du travail de Morgan, notamment son premier groupe « M83 ». C’est une chance de pouvoir bosser avec une artiste aussi talentueuse que complète.
Votre drogue préférée ?
César Chouraqui : Le luxe.
Le meilleur moyen de déconnecter pour vous ?
César Chouraqui : Partir, loin. On dit qu’on emmène toujours nos problèmes dans nos bagages. Moi, pas trop.
Quelle est votre relation à l’image ?
César Chouraqui : Je comprends la forme de pouvoir dont certains parlent qui m’inspire personnellement de la crainte. On sait que la prolifération des images aujourd’hui pose des questions cruciales sur la vérité. Elles peuvent créer des attentes irréalistes et engendrer des sentiments d’insatisfaction. Il est précaire l’équilibre qu’elle induit entre l’aspiration et la désillusion. Je dirais une quête d’équilibre oui : entre fascination et lucidité, entre ce qu’elle nous montre et ce qu’elle nous cache. La portée de son message.
Qu’est-ce qui vous intéresse le plus dans une image ?
César Chouraqui : Bah justement, l’histoire qu’on s’en fait.
Votre plus grande qualité ?
César Chouraqui : Je l’ai hérité de mes parents. Je suis très loyal.
Une image pour illustrer un nouveau billet de banque ?
César Chouraqui : Dark Vador qui soulève l’empereur pour le jeter dans le vide.
Par qui aimeriez-vous être photographié(e) ?
César Chouraqui : Anton Corbjin c’est le bon clin d’œil.
Un livre photo indispensable ?
César Chouraqui : Genesis.
Le métier que vous n’auriez pas aimé faire ?
César Chouraqui : J’ai travaillé 6 mois dans un grand restaurant en tant que runner. Le premier jour, j’ai dû apporter une énorme pièce de viande à la table d’orientaux qui portaient de magnifiques tenues traditionnelles. En sortant de la cuisine, je me suis pris les pieds dans un tapis, la pièce de viande à voler au travers de la salle pour venir s’écraser à leurs pieds. Les éclaboussures de sauce ont ruiné leurs belles parures. Je n’ai jamais été promu serveur. Tu m’étonnes. (Rires)
Votre plus grande extravagance :
César Chouraqui : Pour un de mes premiers concerts j’ai demandé aux RP d’une grande marque de vêtements d’habiller tout le groupe de la tête au pied comme si on faisait Wembley. C’était dans un rade miteux et il y avait 19 personnes dans le public. Seulement 2 passaient là par hasard, les autres étaient des membres de nos familles.
Quelle question pourrait vous déstabiliser ?
César Chouraqui : Je suis allé à une soirée récemment pour le lancement d’un film américain. On m’a demandé au premier degré lors d’une interview si je préférais la baguette ou les bagels. J’ai trouvé ça tellement con que je n’ai pas su quoi répondre et j’ai bégayé jusqu’à lâcher un pauvre « baguette, because i’m french ». Je crois que l’ultime premier degré me déstabilise.
Quelle est la dernière chose que vous avez faite pour la première fois ?
César Chouraqui : Me détendre quand je n’avais rien à faire. J’adore ne rien faire mais j’ai du mal à me détendre dans le processus. Je me suis longtemps dit « merde, je passe à côté d’un truc là » maintenant je préfère me dire « ça attendra ».
La ville, le pays ou la culture que vous rêvez de découvrir ?
César Chouraqui : Le Japon.
Le lieu dont vous ne vous lassez jamais ?
César Chouraqui : Mon lit, et un studio de musique.
Votre plus grand regret ?
César Chouraqui : Ma sœur m’a dit un jour : « nothing that meant for you passes you by ». J’essaye de m’y accrocher.
Coté réseaux sociaux, quelle est votre préférence ?
César Chouraqui : Instagram pour suivre l’actualité du PSG et pouvoir envoyer des messages en direct à des gens dont j’aime le travail. J’ai récemment posté en Story la photo d’un livre de Salgado dédicacé que j’ai offert (en bon obsessionnel) à la tante de Morgan, surement Genesis d’ailleurs. Il m’a envoyé un remerciement 10 min plus tard, c’était peut-être un assistant qui était payé pour faire ça mais ça m’a fait ma journée.
Êtes-vous plutôt couleur ou N/B ?
César Chouraqui : J’aime les deux. Je crois que je préfère le noir et blanc mais j’ai l’impression que c’est la facilité car peu importe la photo, le N&B la rend plus spectaculaire. Je suis passé du noir et blanc à la couleur pour un de mes derniers clips d’ailleurs, (33 – Dax Remix) réalisé avec Philip Gay, pour explorer ce que la fusion des deux pouvait apporter. Nous avons utilisé un procédé similaire au « Duotone ».
C’est une technique qui a été largement utilisée pour les pochettes d’albums emblématiques de jazz à l’époque de la stéréo, offrant une nouvelle dimension colorée à des enregistrements initialement publiés en mono. Dans ce cas précis, il s’agissait d’un remix d’Olivier Dax (Dax Rider, Ceronne, Toxic Avengers) d’un titre que j’avais sorti il y a trois ans. Nous avons jugé pertinent de réutiliser le clip original et de l’associer à cette approche photographique. De plus, ce titre constituait un clin d’œil à Olivier, qui m’avait offert le remix, et à qui j’avais avoué mon admiration pour Dépêche Mode. Cette technique a été utilisé par Anton Corbijn, le photographe emblématique du groupe, sur un des clips. Le clin d’œil était amusant. La boucle était bouclée.
Lumière du jour ou lumière de studio ?
César Chouraqui : Jour. J’enregistre en ce moment à Los Angeles, chaque fois que je peux, je sors photographier la ville. La lumière du jour est écrasante, elle résume à elle seule cette ville « bouillonnante ».
Si je pouvais organiser votre dîner idéal, qui serait à table ?
César Chouraqui : Bill Burr pour les blagues, Brad Pitt pour dire qu’on est pote, Dieu pour nous rendre des comptes. Ah oui, et Hayden Christensen en Anakin putain.
Selon vous, qu’est-ce qui manque dans le monde d’aujourd’hui ?
César Chouraqui : Le monde a toujours manqué de bienveillance.
Si vous deviez tout recommencer ?
César Chouraqui : Je prendrais plus de risque. Quitte à me rendre ridicule.
Que souhaitez-vous que l’on dise de vous ?
César Chouraqui : J’aimerais bien qu’on se rappelle de moi comme quelqu’un de vraiment bon. C’est dur d’être vraiment bon.
La chose essentielle que l’on doit savoir sur vous ?
César Chouraqui : Que lorsque j’avais 14 ans, j’ai été président d’un forum Star Wars qui regroupait 3500 personnes.
Si Dieu existe lui demanderiez-vous de poser pour vous, ou prendriez-vous un selfie avec lui ?
César Chouraqui : Je me rappelle cette scène dans « The Secret Life of Walter Mitty », la scène entre Walter (interprété par Ben Stiller) et Sean Penn, qui joue le rôle du photographe beau gosse et sauvage. Lorsque Walter essaie de comprendre pourquoi Sean ne prend pas la photo du léopard, Sean lui explique que certaines choses sont mieux vécues que capturées. Notamment quand ces moments flirtent avec le divin.
Vie ta vie pleinement, ne fige rien dans le temps. Just do it. One life… etc…
Je suis très friand de ce genre de scène tire larmes, néo spirituel. Bref, face à Dieu je ferais mon Sean. Je regarderais. Et peut-être lui poserais-je 2-3 questions (n’est pas Sean qui veut) c’est Dieu quand même.
Un dernier mot ?
César Chouraqui : Qui a des places pour Oasis à Wembley ?