En Libye, la situation dégénère depuis le renversement et la mort du régime de Mouammar Kadhafi en 2011. Les milices s’affrontent et les djihadistes de Daesh étendent inexorablement leur influence, alors que le gouvernement, soutenu par l’ONU, tente de les contrer. La mort du photojournaliste néerlandais Jeroen Oerlemans, assassiné par un sniper de Daesh dimanche 2 octobre, prouve à quel point ce pays sombre dans le chaos.
Ce photographe indépendant de 45 ans était en reportage pour le magazine belge Knack et avait déjà couvert les combats en Libye. Auparavant, ce professionnel chevronné avait arpenté les fronts en Syrie, Afghanistan, Irak, Liban, Soudan, Israël et Palestine et suivi le périple des réfugiés pour rejoindre l’Europe. Avec son collègue, le photojournaliste britannique John Cantlie, ils avaient été capturés et pris en otage par des combattants affiliés à Daesh pendant une semaine en 2012 en Syrie et libérés par l’armée syrienne libre. John Cantlie a depuis été enlevé de nouveau et mis en scène dans des vidéos de propagande de Daesh.
A Syrte, alors qu’il couvrait un combat entre les forces du gouvernement d’entente nationale et le groupe Etat Islamique, Jeroen Oerlemans a été frappé par plusieurs balles dans le torse, a annoncé Reda Eissa, un porte-parole du gouvernement, cité par le New York Times. Il n’a pas dérogé aux règles de sécurité, portait un gilet par balles, un casque et était clairement identifié comme un journaliste, a indiqué Joanie de Rijke, une journaliste qui voyageait avec lui. « Nous n’avons pas pris plus de risques que les autres », a-t-elle précisé à Associated Press.
L’affrontement fut violent, puisque 8 soldats libyens et 50 djihadistes ont également été tués. Depuis le mois de mai, les milices soutenant le gouvernement affrontent l’Etat Islamique pour reprendre la ville de Syrte, mais quelque 200 djihadistes sont encore présents.
C’est le troisième journaliste assassiné cette année en Libye et le deuxième à Syrte. Selon le Comité de Protection des Journalistes (CPJ), 10 journalistes ont été tués en Libye depuis 2011.
Jeroen Oerlemans avait travaillé pour le média néerlandais De Volkskrant et publié son travail dans Newsweek, Time, The Guardian, International Herald Tribune, The Sunday Times et le Courrier international.
Il devait rentrer à Amsterdam ce lundi. Il laisse derrière lui 3 enfants et sa compagne.
Il avait été récompensé par le jury du World Press Photo en 2007 pour un cliché pris dans le sud du Liban. Son directeur exécutif, Lars Boering, s’est dit « dévasté » sur Facebook. « De nouveau, nous perdons un des meilleurs et nous perdons aussi une personne pleine de bonté. »
Cécilia Sanchez