Ilias Georgiadis rencontre la photographie en 2009, à 19 ans, au moment où la Grèce sombre dans une crise économique et politique profonde. Contrairement à beaucoup de jeunes grecs qui se sont alors exilés à Londres ou Paris, Ilias fait le choix de rester à Thessalonique. C’est de là qu’il s’engage dans une quête d’images dont le but, dit-il, est « de ne pas me sentir étranger à moi-même, ni à l’univers ».
Cette recherche à la fois intime et cosmique, se manifeste dans une écriture contrastée, urgente et intense qui rappelle à certains égards celle du mouvement éphémère Provoke du japon des années 1968-69. Et c’est aux frontières de la lisibilité qu’Ilias Georgiadis expérimente la beauté du naufrage : grattant les négatifs, empilant les mots sur les images, explorant le grain du noir…
Faire un livre comme le rescapé ferait une barque de sauvetage pour « se tenir au milieu, entre la vie et la peur de la mort, inévitable », survivre et rejoindre la rive des autres. Le photographe présente son oeuvre comme un voyage, voire comme une déshérence marquée par le désir et par la perte. Une mélancolie qui le rapproche de Théo Angelopoulos.
L’exposition propose une scénographie qui reflète ce parcours existentiel et met en avant son processus narratif, les allers-retours entre l’image et l’écrit, le proche et le lointain.
Deux livres naîtront de ces dix années de travail : Over-State (Blow-up press) et Vialattea (Origini edizioni). Outre les soixante tirages, ces deux livres seront consultables à la galerie.
Au-delà de l’aspect en apparence lyrique de son travail, Ilias Georgiadis est très attentif à la précision de l’éditing, au traitement des négatifs, à la matérialité des images. Ne laissant rien au hasard, il pratique sans complaisance une sélection très rigoureuse de ses photographies, attentif à une forme de matérialité porteuse de sens.
« J’aime beaucoup les accidents photographiques, ceux des images, et les erreurs qui peuvent survenir. Ces marques que l’on voit sur les clichés se sont produites parce que je vis trop longtemps avec les négatifs. Obsédé par le désir de les regarder. Parfois, l’envie me prend aussi de générer les accidents, dans des processus que je peux contrôler, alors j’essaie. différentes choses. Pour moi, ce genre de matérialité — celle qui transcende l’image — est importante parce que j’aspire à transmettre les moments de vulnérabilité et d’imperfection. Toutes ces marques ajoutent une couche extra-fine qui exprime cette vulnérabilité. Une mélodie qui décrit métaphoriquement comment nous pouvons être en paix avec la mort à venir ». (Ilias Georgiadis)
Le Larvoratoire photographique
Fondée en 2018 pour pratiquer, partager et créer des images numériques et argentiques, l’association Profondeur de Champ a investi en 2020 un espace remarquable (une ancienne cordonnerie) dans le centre-ville de Douarnenez pour en faire un lieu de médiation, de rencontres photographiques et d’expositions.
Ilias Georgiadis : Black Thread
du 4 au 28 août 2021
Le Larvoratoire photographique
20 rue Anatole France
29100 Douarnenez