Pour David Szauder, artiste hongrois basé à Berlin, la mémoire humaine s’apparente au disque dur d’un ordinateur. Tous nos souvenirs sont triés, classés dans des dossiers et des sous-dossiers que notre cerveau accumule tel un catalogue géant de fichiers jpeg. Si sur le moment, chaque détail semble clair et distinct, au moment de les retrouver quelques années plus tard, enfouis loin dans notre tête, il n’est pas rare que nos souvenirs soient altérés, abîmés, comme un fichier d’ordinateur corrompu. Ils ont subi le classique bug informatique.
David Szauder n’est pas le premier à envisager une anomalie informatique comme une possibilité visuelle intéressante à exploiter. Quand le geek aux yeux cernés par une nuit à encoder un programme y verrait le signe d’une erreur et par conséquent d’un travail de longue haleine à recommencer, les artistes y ont vu une nouvelle forme d’esthétisation des images à l’ère numérique. Même le rappeur américain auto-centré Kanye West a eu recours à cette tendance pour son clip “Welcome to Heartbreak”, où il apparaît tout en compression numérique ratée, le visage pixelisé et fluo. On parle alors de Glitch Art ou de DataBending.
Pour manipuler ses images et donner cette impression de bug, David Szauder a utilisé une application pour Androïd qu’il a lui même mise au point, Touch.gl, application qui participe au mouvement de Glitch Art. Elle lui permet de provoquer des anomalies dans les images, sans pouvoir les maîtriser. Le résultat donne ces portraits surréalistes, un peu comme, parfois, nos propres souvenirs, finalement.