Georges Salameh est né au Liban, a habité en France, puis en Sicile et vit aujourd’hui en Grèce. Isolitudine est une série qui compile ses images de Sicile entre 2005 et 2017. L’Œil de la Photographie s’est entretenu avec le photographe.
Comment la photographie est-elle entrée dans votre vie ?
C’est un portrait de l’oncle de mon père, un portrait recoupé dans un journal hollandais de 1937 que j’ai retrouvé́ en vidant la maison de mes parents en 2010. C’est l’une des rares photos de lui car il était toujours derrière la plupart des photos et films 8mm de la famille. Cette photo retrouvée a provoqué en moi cette même question : comment la photographie est-elle entrée dans ma vie ? Soudain cette scène émergea du fin fond de ma mémoire : une après-midi d’été́, dans sa chambre noire, à l’âge de huit ans, il m’offrit mon premier appareil photo : un Kodak Instamatic. Ce souvenir n’est pas une image mais un geste, un acte d’amour.
Quel est l’appareil que vous préférez utiliser et pourquoi ?
Je n’ai pas de préférence, j’ai travaillé́ avec tous types d’appareils et de format photographique. Mais depuis 2005 j’utilise presque exclusivement un Mamiya II, un choix au départ encombrant, mais depuis un bon moment, un outil idéal pour ma démarche de plus en plus « lente » (étendue sur de longues périodes).
Qualifieriez-vous votre démarche comme sensorielle et impulsive ou au contraire rigoureuse et minutieuse ?
Je produis des images sans une idée bien définie, d’une manière assez spontanée et sensorielle. L’inspiration vient souvent durant de longues heures de marche. Parfois d’une manière inattendue, quelque chose émerge, un souvenir, une image, un son ou une phrase lue, une expérience d’un lieu ou une impression de déjà-vu. Quelque fois aussi ces promenades servent à travailler un matériel déjà̀ acquis. La marche devient plutôt un processus et un prétexte d’introspection. Pour notre joie et notre santé, la marche est une forme de défi à la vitesse et au bruit, elle intensifie la curiosité́, encourage l’humilité́, et provoque la méditation
Comment votre projet Isolitudine a-t-il débuté ?
Isolitudine est le conte de mon « auto exil » et mon refuge sicilien. Cette définition n’est pas nécessairement péjorative, c’est un moyen de prendre du recul et me situer en dehors de cette période transitoire de 12 ans passée en Sicile pour pouvoir la contempler, et commencer à raconter une expérience de l’autre, de l’étranger en moi.
Quelle est la photo dont vous êtes le plus fier dans cette série ?
Je ne suis pas attaché à une photo en particulier, mais plutôt à ce qu’elles forment toutes ensembles.
Propos recueillis par Joséphine Faisant
Joséphine Faisant est une auteure spécialisée en photographie. Elle vit et travaille à Athènes, d’où elle déniche les talents locaux.
https://georgessalameh.blogspot.com/
