Avec la fermeture du site d’échange de fichiers Megaupload par le FBI et le ministère de la Justice américaine s’est amorcé un nouveau pas vers la lutte contre le téléchargement illégal d’images, mobiles ou fixes. A leur insu, les internautes qui avaient stocké leurs photos de vacances ou de famille se sont aussi vu retirer l’accès à des milliers de photographies personnelles, jusqu’à nouvel ordre.
La fermeture (définitive ?) d’un des plus importants sites de partage mondial ne remet peut-être pas en cause le stockage d’images sur internet, mais pose la question de leur pérennité physique. Des milliers d’internautes s’étaient habitués à stocker leurs images personnelles sur des sites du même type par souci de place sur leur ordinateur. Ceux qui avaient souscrit un abonnement à Megaupload se voient aujourd’hui, et pour le moment, renoncer à leur consultation ou leur utilisation. Perdre ces images revient à voir brûler ses négatifs, si l’on parle d’argentique, ou bien voir mourir pour X raison son disque dur externe contenant des années de travail ou de souvenirs. « Megaupload était un outil formidable, raconte Cristina Moreno, 26 ans, enseignante à New York et utilisatrice régulière. On pouvait y stocker à moindre coût un tas de fichiers personnels comme des vidéos, des présentations PowerPoint ou bien des photographies. J’ai choisi d’y héberger des images pour mes amis ou ma famille car j’imaginais qu’elles y resteraient longtemps. Aujourd’hui, elles se sont toutes simplement envolées. »
Stockage et accès universel
Avec la fermeture du site, c’est aussi une série chère à Cristina Moreno qui vient peut-être de se volatiliser : depuis le récent décès de sa grand-mère, la new-yorkaise avait débuté un mémorial en images en souvenir de cette dernière, qu’elle avait naturellement hébergée sur Megaupload. « De cette façon, tous les membres de ma famille pouvaient consulter ces photographies, grâce à internet et où qu’ils soient dans le monde. Aujourd’hui, le même problème se pose, vais-je pouvoir retrouver ces images ? » En hébergeant sur le site pas moins de 2Go de photographies de vacances, de famille ou de concerts, soit approximativement un millier de photographies, sans en détenir d’autres copies sur son ordinateur, l’inquiétude de Cristina Moreno semble légitime. « Je payais 25 dollars par mois, donc je suis vraiment irritée, clame-t-elle. On me doit de l’argent. Le gouvernement n’a-t-il pas d’autres soucis dans ce pays que le partage de fichiers ? » Megan Brady, une autre utilisatrice, 27 ans et libraire à Lansing, dans l’Illinois, se gardait elle de payer une quelconque somme. Elle voyait dans la gratuité du service, pour le coup plus limité, une vraie chance pour stocker en ligne et diffuser le même type de photographies et en faisait un outil privilégié. « Heureusement que j’ai gardé une copie sur mon ordinateur de la plupart de mes images à but professionnel ! », dit-elle.
Et à l’avenir ?
Megan Brady n’en démord pas : « Je suis très en colère par le fait que Megaupload ait été censuré de la sorte. Même si je comprends la nécessité de stopper le téléchargement illégal, il y a un certain nombre de personnes qui utilisaient le site de façon honnête. J’accepterai la mesure si je peux simplement retrouver mes photographies personnelles. » C’est dans ces conditions que le site a annoncé la perte de son nom de domaine (www.megaupload.com) mais que vendredi il est réapparu sous une forme très restreinte via des serveurs aux Pays-Bas (http://109.236.83.66), annonçant le début d’une bataille informatique. Pour les utilisateurs stockeurs de photographies en ligne, qu’ils soient pessimistes à l’idée de retrouver leurs images, comme Megan Brady, ou en espérance, comme Cristina Moreno, le procédé ne semble pas être en danger puisque d’autres sites du même type proposent ou proposeront à l’avenir les mêmes services. Ce fait de société n’altèrera sûrement pas la production d’images ou leur diffusion massive sur internet. La vraie question qu’il soulève renvoie à leur conservation physique sous forme de fichier numérique, le stockage en ligne étant annoncé comme l’une des innovations informatiques futures. Combien de copies de ses images chaque photographe doit-il effectuer? Doit-il les conserver dans plusieurs disques durs et/ou en ligne ? Comment estimer la durée de vie d’une image numérique si l’on prend en compte les risques des différents problèmes informatiques susceptibles d’être rencontrés ? Des questions que chaque amoureux du medium est en droit de se poser.
Jonas Cuénin