Le festival breton La Gacilly entame sa sixième année de collaboration avec la ville de Baden en Autriche. A cette occasion, L’Œil de la Photographie s’est entretenu à Baden avec ses directeurs, Lois et Silvia Lammerhuber, sur la prochaine édition qui s’ouvrira en juin.
Quand et comment est née cette coopération entre La Gacilly et Baden ?
LOIS : J’étais un ami de Jacques Rocher, rencontré à Paris. En 2017, j’ai fait un livre sur les baobas, qui fut présenté à La Gacilly. J’ai trouvé que le festival était vraiment de qualité et que ce serait formidable de l’organiser à Baden. J’en ai parlé à Jacques et il est venu voir la ville. Baden est une ville thermale historique, qui fut longtemps la retraite d’été de la famille Habsbourg. Jacques a apprécié et nous avons décidé de faire un essai pendant trois ans. Nous en sommes maintenant à la sixième année.
Chaque année, le festival se déplace de la Bretagne à Baden. Comment adaptez-vous la scénographie à votre ville ?
LOIS : C’est compliqué car Baden a de grandes infrastructures, c’est une vieille ville patrimoniale où tout est protégé. Mais chaque année, nous parvenons à adapter les expositions à ce patrimoine. Nous avons la nécessité de compléter la programmation au fur et à mesure que Baden s’agrandit. Nous présentons les expositions de La Gacilly (une vingtaine d’expositions) et nous en ajoutons une dizaine de notre côté. Cette année, nous allons mettre en avant les photographes autrichiens, avec deux photographes clés : Horst Stasny et Rudolf Koppitz.
Y a-t-il une relation historique entre Baden et la photographie ?
LOIS : Pas que je sache. Mais il y a un lien avec Napoléon !
SILVIA : Le lien, c’est Lois. Le fait qu’il vive et travaille ici est la principale raison pour laquelle la photographie et ce festival sont venus à Baden. Mais de fait, l’Autriche n’est pas un pays aussi photographique que la France ou l’Allemagne. Nous avons très peu de médias spécialisés, les photographes ont peu l’occasion de montrer leur travail et d’en vivre. Mais l’intérêt du public s’avère très important ici, parce que c’est à l’extérieur et, bien sûr, gratuit.
Quel type de public attire La Gacilly Baden ?
LOIS : Tout type de public et pas forcément uniquement le monde de la photographie. Sur les 280 000 visiteurs de l’édition précédente, je dirais que seulement 20 000 sont des photographes. Le reste est constitué de personnes intéressées par la découverte de notre monde et de notre environnement.
SILVIA : C’est un point très important pour nous. Les habitants de Baden acceptent très bien le festival et sont très curieux de chaque édition.
LOIS : Nous sommes très fiers que La Gacilly à Baden soit l’un des rares festivals décarboné. Cela fait maintenant trois ans que nos émissions sont neutres et nous avons reçu des dons de particuliers de Baden pour y contribuer. C’est une preuve d’engagement importante pour nous.
Quels sont les grands thèmes de cette édition ?
La Gacilly se structure systématiquement autour de deux thèmes : l’un concerne la condition humaine et chaque édition se concentre sur une nouvelle zone géographique. Cette année, nous mettrons en avant le Bangladesh, le Pakistan, l’Afghanistan et l’Iran à travers dix expositions de photographes originaires de ces régions. L’autre moitié est consacrée à l’état du monde, en se concentrant sur les interférences humaines avec ce monde.
Expliquez-nous ce projet photographique bilatéral entre les écoles du Morbihan en Bretagne et celles de Basse-Autriche ?
Ce projet est très important parce qu’il met en avant les générations futures. Seize écoles de Basse-Autriche et autant de France travaillent ensemble sur un thème qui, cette année, est « les ouvertures ». Ils sont présentés côte à côte sans qu’il n’existe de lien entre les deux pays, ils reçoivent le même dossier mais travaillent séparément. C’est toujours beau de voir que la pensée de ces jeunes va dans la même direction. Ils embrassent les mêmes valeurs.
Que se passera-t-il lors de la Longue nuit de la photographie ?
LOIS : Nous célébrons la naissance de la photographie, en août 1839. Il y aura un dîner de gala, puis une nuit sur scène avec des prix, des conversations pour réfléchir à la photographie et des présentations de photographes tels que Brent Stirton, George Steinmetz, Hans Silvester et Sarah Caron. Cet événement fait partie des journées médias, auxquelles participent une centaine de journalistes et de photographes venus de toute l’Europe.
Y a-t-il d’autres événements ou activités satellites ?
LOIS : Il y a des expositions à Tulln, Celje et Bratislava ainsi que le Global Peace Photo Award au Parlement. Ce n’est pas directement lié à La Gacilly – notre collaboration avec le Parlement remonte à onze ans – mais cela se passe souvent pendant le festival. Nous avons organisé ce prix avec Photographische Gesellschaft (PHG) en partenariat avec l’UNESCO, le Parlement autrichien, l’Association autrichienne des reporters parlementaires, l’Institut international de la presse (IPI), le Prix allemand de la photographie pour la jeunesse, la Fondation World Press Photo, le POY LATAM, LensCulture et le Groupe d’assurance de Vienne. L’IPI nomme une personne qui parle des conditions du journalisme, puis cinq lauréats reçoivent le Global Peace Photo Award et l’un d’entre eux reçoit le prix de l’Image de la paix de l’année, d’une valeur de 10 000 euros, des mains du lauréat du prix Nobel de la paix de l’année concernée.
SILVIA : Nous avons créé ce prix il y a dix ans afin d’apporter quelque chose à la photographie autrichienne, de la rendre plus visible et plus internationale.
Quels sont vos points forts pour l’édition de cette année ?
SILVIA : Si je devais en choisir deux, je dirais la photographe iranienne Maryam Firuzi et le photographe autrichien Rudolf Koppitz.
LOIS : Pour moi, ce serait Stephan Gladieu et Véronique de Viguerie. Le travail de Sarah Caron est également très important, elle a eu accès à toutes sortes de zones en Afghanistan. Beaucoup de grands noms sont impliqués, comme Abbas et Paul Almasy. Les jeunes sont également très créatifs : Alisa Martynova, Maxime Taillez, Chloé Azzopardi. Ils sont si nombreux qu’il est difficile de faire un choix.
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