La Fondation Magnum a été fondée en 2007 à New York. Entité indépendante de l’agence, elle s’appuie sur les valeurs historiques de ses membres pour soutenir la photographie documentaire a échelle internationale. La création à Londres d’une branche de la Fondation, et à Paris d’un fonds de dotation que la vente organisée par Sotheby’s devrait permettre de transformer en fondation, répondent à une volonté de diversifier les activités autour d’une philosophie fédératrice. Chefs de cette orchestration : Susan Meiselas, photographe de l’agence qui préside la branche new-yorkaise ; Julien Frydman, ancien directeur de Magnum Photos Paris ; Marco Bischof, documentariste et fils du célèbre photographe de l’agence ; et Martine Franck, qui a déjà œuvré à l’établissement de la Fondation Henri Cartier-Bresson à Paris et dont la mort récente est une lourde perte pour la Fondation Magnum tant son engagement a été déterminant dans sa création. Leur intention, globalement, est de collecter et de contextualiser un patrimoine afin de dresser une histoire vivante et raisonnée de la photographie documentaire. L’approche se veut donc tout d’abord historique, par l’archivage, la numérisation et la valorisation de ressources diverses : photographies vernaculaires, ordres d’éditeurs, lettres, planches contact, interviews vidéo et audio, films, fonds photographiques privés. Tous ces documents contribuent à définir l’évolution d’un langage visuel complexe, en remontant à l’après Seconde Guerre Mondiale, et permettent de mettre en perspective la facon dont on regarde et raconte l’Histoire selon les lieux et les époques. La mise à disposition de ces archives aux chercheurs et dans une certaine mesure au grand public et leur constante actualisation relève d’une volonté de rendre accessible et visible l’existence d’une narration visuelle qui continue d’évoluer aujourd’hui dans ses formes et ses structures. Si l’édition et l’exposition restent des véhicules clés de la diffusion photographique, de nouvelles formes apparaissent, mêlant différents médias et plate-formes, et la Fondation encourage ces nouveaux développements. La Fondation de New York, coordonnée par Emma Raynes, directrice de programme, est particulièrement active sur ce terrain, distribuant chaque année près de 100 000 dollars à une nouvelle génération de photographes. Crée en 2010, l’Emergency Fund est une bourse permettant aux auteurs de financer leurs déplacements et leurs besoins quotidiens dans le cadre d’un sujet sous-médiatisé touchant à l’injustice sociale. Entre 10 et 15 photographes sont sélectionnés chaque année parmi une centaine de photographes nominés par un jury international composé de commissaires, éditeurs et directeurs photo, cette dotation est accompagnée d’une aide à la diffusion et d’un soutien éditorial. La Fondation met son réseau à la disposition des photographes afin de leur assurer publications et expositions. Cette notion de mise en relation est héritée de la philosophie historique de Magnum Photos, pilier de sa pérennité et de son influence internationale. Depuis sa mise en place, le prix a été attribué à des photographes aux langages visuels variés et la prochaine sélection, qui sera annoncée en janvier 2013, s’annonce déjà riche en diversité esthétique et territoriale. Cette bourse est complétée d’autres aides financières à destination d’étudiants ou de jeunes diplômés. Le EF fellowship est un programme de deux mois proposés à de jeunes diplômés mêlant stage éditorial au sein de la Fondation accompagné d’une modeste dotation leur permettant de développer un sujet à New York. Le NYU Human Right Fellowship offre quant à lui l’opportunité à des étudiants basés hors des Etats-Unis et de l’Europe de l’Ouest de venir étudier le photojournalisme sous la direction de Susan Meiselas et Fred Ritchin. Leur intérêt doit se concentrer sur les Droits de l’Homme, un axe majeur suivi par la Fondation et qui devrait prendre la forme d’une base de données compilant des projets exemplaires dans ce domaine afin de stimuler la production de sujets frappants et originaux. A travers ses différentes actions, la Fondation s’impose comme un acteur essentiel au service d’une communauté considérant la narration visuelle comme un outil de décryptage de l’histoire du monde, avec la convivialité, le partage de savoirs et l’engagement vers la création de demain comme valeurs.
Laurence Cornet