Fondée en 2007 à New York, la Fondation Magnum a pour mission d’élargir la diversité et la créativité dans la photographie documentaire. C’est le grand projet de Susan Meiselas.
Pour Susan Meiselas, témoigner de l’histoire et protéger la mémoire de l’oubli ne peut souvent pas se limiter à un reportage photographique diffusé dans la presse. Très tôt, elle a associé à ses images des textes, vidéos, archives et autres matériels issus d’une étroite collaboration avec des journalistes, chercheurs, ou directement avec les communautés qu’elle documente. Comme l’écrit la commissaire d’exposition Pia Viewing dans le catalogue de son exposition au Jeu de Paume : « Elle travaille directement avec une situation donnée et ses différentes facettes. Présente sur place, elle fouille, à la recherche d’éléments qui signifient des expériences passées dans certains lieux où elle photographie les personnes, les traces d’évènements, où elle enregistre les témoignages de ceux qui restent, où elle rassemble des documents d’archives, note les faits. »
Dès la fin des années 1990, alors qu’internet n’était qu’à ses balbutiements comme plateforme narrative, elle lance www.akakurdistan.com – une archive participative pour redonner vie au Kurdistan après les génocides dont ses ressortissants ont été victimes, en Irak, en Iran et en Turquie. Et ce, après avoir travaillé a des projets participatifs pour aborder les violences conjugales, l’Amérique rurale ou l’héritage de la révolution nicaraguayenne.
Pionnière d’une photographie qui s’émancipe des strictes limites des besoins médiatiques, elle encourage depuis 10 ans l’évolution des modes de représentation et, ce faisant, de narration, à travers la Fondation Magnum, dont elle est la présidente depuis sa création en 2007. Alors que l’industrie des médias accusait les signes de réductions budgétaires mettant à mal la production photographique, la Fondation Magnum « a été conçue comme une initiative visant à soutenir une narration visuelle indépendante et de longue durée sur des questions sociales », peut-on lire sur leur site.
L’action de la Fondation a commencé par la distribution de bourses pour la production de reportages photographiques et s’est très vite diversifié pour devenir un laboratoire soutenant des modes expérimentaux de narration a travers et un réseau de mentorat et de diffusion pour des voix de plus en plus diverses. Répondant aussi au manque actuel d’une pluralité de voix dans le paysage médiatique, la Fondation a mis en place des programmes spécifiques pour former et soutenir la diffusion d’une génération montante de photographes du Moyen-Orient, d’Asie et d’Amérique Latine. S’ajoutent à ces missions une large archive de la photographie depuis la fin des années 1940 et une série de publications co-éditées ou commissionnées. Il s’agit là de replacer l’image comme catalyseur social, une notion chère à Meiselas. « Des débuts modestes dans son studio de sous-sol à un personnel à temps plein et des centaines de photographes soutenus d’une manière ou d’une autre à travers le monde, il est vraiment spécial de voir ce qui est né de sa vision au cours des 10 dernières années », résume Simone Salvo, directeur de la communication de la Fondation Magnum.
Laurence Cornet
Laurence Cornet est une journaliste spécialisée dans la photographie. Elle est également commissaire indépendante. Elle vit entre New York et Paris.