agnès b. présente la sixième saison de sa collection à la Fab. dédiée au Langage du Corps.
Avant même que le mouvement ne donne lieu à un geste ou à un mime, parfois avant même toute intention de signifier quoi que ce soit, en tension fébrile ou abandonné au repos, sur la scène d’un théâtre ou démasqué par la mort, le corps parle sans jamais s’interrompre. Le silence de l’image est empli d’un verbe décliné à tous les temps : aussi bien, la mémoire dont le corps est doué recompose le présent perpétuel auquel il semble voué. — À son départ comme à sa fin, dans sa silhouette et ses traits, un corps est déjà toute une histoire.
“L’étroiste cousture de l’esprit et du corps s’entre-communiquants leurs fortunes”, écrivait Montaigne, génère un langage qui n’est pas aisément traduisible (les signes disparaissent dans le mouvement même qui les produit), mais reste pertinent, sinon exact — un espéranto intuitivement réinventé qui, en fait de règles grammaticales, ne connaît que les limites de l’ossature et des muscles. Diffus dans la chair comme il l’est, rétif à toute conclusion définitive, sa parole se prête aux nuances et aux détails qu’aucune science ne pourrait décrire et raisonner : le langage du corps est tout art. Le premier, et le modèle de tous les autres, d’après lequel le comédien comme le sculpteur, le peintre comme le poète et le musicien comme le danseur forment les exigences de leur pratique.
Le photographe exige la pose (Andy Warhol, Gilbert and George, Seydou Keïta), suggère des postures (Herbert List, André de Dienes), surprend un moment incertain (Nan Goldin, Martin Parr, Martine Barrat), ou cadre le détail d’une attitude (Man Ray, Harmony Korine,…). Mis en scène selon des directives plus ou moins contraignantes (Agnès Varda, Hervé Guibert, Denis Darzacq), le corps s’inscrit aussi dans l’espace de récits suspendus. — Le dessinateur et le peintre (Frédéric Bruly-Bouabré, Jean-Michel Basquiat, Mike Lash, Bangala) élaborent à nouveau le corps d’après le langage imaginaire qu’ils l’ont entendu manifester.
Le corps parle de façon explicite et pressante, ou approximative et allusive. Quels que soient les malentendus redoutés, il se fait entendre. Il parle et s’exprime sur tous les tons — on ne saurait oublier qu’il est tout ouïe, qu’il entend et comprend ce qui lui est destiné aussi bien que ce qui semble lui échapper. — Un baiser retrouvé (Vincent Michéa) : le langage du corps est la réciprocité même.
Historien de l’art et critique, Alain Cueff a notamment consacré à Andy Warhol une exposition (« Le Grand Monde d’Andy Warhol ») et un livre (« Warhol à son image »). Les éditions Les Belles Lettres ont publié cette année son essai Ciels d’Amérique, 1801-2001.
Les artistes
AGNÈS VARDA, BERENICE ABBOTT, MANUEL ÁLVAREZ BRAVO, DIANE ARBUS,
HÉLÈNE BAMBERGER, JEAN-MICHEL BASQUIAT, OLIVIA BEE,
ERNEST J. BELLOCQ, THIBAUT BOUEDJORO,
JEAN-CHRISTOPHE BOURCART, FRÉDÉRIC BRULY BOUABRÉ,
FRÉDÉRIC BUCKHIESTER,
KENNETH CAPPELLO & BRIAN DEGRAW, HENRI CARTIER-BRESSON,
RAYMOND CAUCHETIER, CDX,
CAROLINE CHAMPETIER, ROMAN CIESLEWICZ, LARRY CLARK,
DENIS DARZACQ,
MARIE-LAURE DE DECKER, ANDRÉ DE DIENES,
NIKI DE SAINT PHALLE, WILLIAM EGGLESTON, TRACEY EMIN, VINCENT GALLO, GILBERT & GEORGE, NAN GOLDIN, DOUGLAS GORDON, LUCIEN HERVÉ,
PETER HUJAR, SEYDOU KEÏTA, HARMONY KORINE, GABRIEL KURI, MIKE LASH, HERBERT LIST, MADE IN ERIC, MAN RAY,
RYAN MCGINLEY, JONAS MEKAS, VINCENT MICHÉA, CHAD MOORE.
Commissaire : agnès b.
Collection agnès b. : Le Langage du Corps
9 juin – 22 octobre 2023
La Fab.
Place Jean-Michel Basquiat
Paris 13e
www.la-fab.com
www.agnesb.fr
