Michel Comte est l’un des plus grands chroniqueurs photographiques d’aujourd’hui. Son œuvre photographique rapproche les environnements humains les plus dissemblables et dote les extrêmes de notre planète d’une dimension humaine. Les spectateurs contemplent des univers d’images parallèles – et apparemment sans liens. D’un côté, l’ambiance pétillante comme du champagne où évolue le jet-set, la célébration de l’affluence, du prestige, du charme et de la beauté. De l’autre, les dures réalités du monde contemporain, le revers de la médaille : des images d’endroits que nous aimerions pouvoir ignorer complètement et oublier, des photographies qui peuvent nous faire réfléchir, et nous rendre perplexes, et même furieux. Des images de personnes privées des plus élémentaires moyens de subsistance – et d’autres qui n’y ont jamais eu accès.
Toute photographie qui – comme tant des photos de Michel Comte – est reproduite des millions de fois constitue inévitablement une espèce de commentaire. Grâce à la diffusion de masse dont jouit son travail, il interrompt le flot quotidien d’images avec son style unique. L’omniprésence des images et des informations est devenue un fait de la vie. Même si nous le voulions, il n’y a aucune possibilité d’évasion. Combien d’images voyons-nous défiler en 24 heures ?
À partir de 1981, Michel Comte a travaillé régulièrement pour les magazines américains Vogue et Vanity Fair. Ces commandes ont été à l’origine de ses premiers portraits de stars comme Tina Turner, Catherine Deneuve, Michael Schumacher et Mike Tyson. Comte a photographié certaines de ces personnalités, Sophia Loren par exemple, régulièrement pendant trente ans. Beaucoup de photos de Loren ont été prises dans l’Engadine, une vallée de la montagne suisse que Comte a souvent choisie pour ses commandes de portrait. Il y a travaillé pendant les cinq dernières années sur un cycle de paysage, prenant pour thème le monde exaltant de la montagne, en particulier les divers états de l’élément aquatique.
Au cours des trois dernières décennies, Michel Comte s’est fait un nom dans un certain nombre de genres photographiques différents. Mais dès le début, un thème a souvent émergé, celui des femmes. Au fil du temps il a construit un portrait collectif complexe de la femme contemporaine, composé de magnifiques photographies qui couvrent glamour et intimité, vulnérabilité et force. Ses images de femmes sont souvent caractérisées par une réserve superbe, mais il y a aussi des images chaleureuses et sincères, et d’autres marquées par la lucidité et la joie de vivre. En fin de compte, les nus de Comte deviennent des métaphores hautement érotiques qui dessinent une image de la femme en pleine évolution.
Que ce soit un nu ou un portrait, chaque image de Comte expose des moments apparemment privés. Grâce à des innovations plastiques sans cesse renouvelées, il réussit à créer des portraits très individualisés. Il réussit également un effet de renversement: ces comédiens, modèles, athlètes de haut niveau et pop stars sont tous habituellement piégés dans l’image qui leur est imposée, celle que le public attend : mais Comte parvient à les décrire en dehors des rôles qui leur sont prescrits. Ces images représentent des moments d’intimité, offrant aux spectateurs un accès presque personnel à l’individu représenté. Sans aucun doute, le don de permettre à ses modèles, à ses sujets, de parler à travers leurs images, de se présenter comme ils se voient (ou comme ils souhaiteraient se voir) est l’une des plus grandes qualités de Michel Comte. « C’est toujours une question de confiance », dit-il. Lorsque ses sujets décrivent leurs interactions avec Comte, ils parlent toujours de leur expérience d’un dialogue personnel. « Ces images révèlent mon être véritable ».
Christian Brändle
Christian Brändle est président des Musées d’art de Suisse et directeur du Museum für Gestaltung, à Zürich, en Suisse.
Michel Comte, Retratos
Du 10 février au 14 mai 2017.
La Termica
Avenida De los Guindos, 48
29004 Málaga
Espagne