« Où allons-nous lorsque nous disparaissons dans ce brouillard de la maternité? » Pendant six ans, la photographe hongroise Andi Galdi Vinko a photographié son quotidien de femme enceinte puis de jeune mère. Loin des images d’Épinal qui circulent encore aujourd’hui, elle livre un portrait honnête de la maternité dans tous ses états, tant poétique que sauvage.
Évoquant les prises de conscience féministes de ces dernières années et le gain de pouvoir des femmes sur leur corps, Andi Galdi Vinko a constaté que, jusqu’à récemment, au sein du monde de l’art, la question de la maternité était souvent mise de côté, voire tabou. Future mère, elle n’avait aucune représentation authentique vers laquelle se tourner pour appréhender cette étape universelle de la vie d’une femme. Sorry I Disappeared I Gave Birth but Now I’m Back vise à en offrir un portrait sincère.
Partant de sa propre expérience, Andi Galdi Vinko a rapidement enrichi ce tableau par celle de ses proches. En résulte une suite de portraits et de détails entre réalisme cru et semi-abstraction poétique, ponctués par des références à la nature pleines d’à propos. Une documentation intime et pleine d’humour du joyeux bazar qu’est la maternité, avec ses acrobaties et ses — rares — moments d’accalmie, ses enchantements et ses désenchantements.
Il y a un côté jouissif à se laisser entrainer dans cette frénésie, comme un shoot d’adrénaline qui, pour la journaliste Charlotte Jansen, tient de la grande liberté qui se dégage de cette série : « Les images d’Andi crient, se répandent et débordent sans aucun sentiment de contrainte. » Dans sa brillante préface à l’ouvrage, elle décrit comment la photographe « réinvente radicalement le langage domestique » en y intégrant le monde extérieur et l’immensité de la nature.
Andi Galdi Vinko pose un regard lucide sur les implications de la maternité : la mise à l’épreuve d’un corps, puis d’un foyer, d’une vie que l’on met de côté pendant un temps, que l’on doit repenser et que l’on veut parfois récupérer. La série est rythmée par des commentaires rédigés au feutre, des interstices reflétant ses réflexions et questionnements : « Comment quelque chose de si universel peut-il être si solitaire ? » ou encore « Je vais faire mon grand retour. Je travaille sur quelque chose ».
Sorry I Disappeared I Gave Birth but Now I’m Back met ainsi en lumière les difficultés pour de nombreuses femmes photographes de cette période charnière, autour de la trentaine, pendant laquelle la question de devenir mère se pose en même temps que les opportunités de faire évoluer sa carrière, générant un grand sentiment de culpabilité : « Les années où l’on doit faire le choix entre avoir des enfants ou réussir sont courtes et coïncident avec les années où l’un ou l’autre pourrait se produire, mais aucun n’est garanti. »
Véritable bouffée d’oxygène, Sorry I Disappeared I Gave Birth but Now I’m Back rend à la maternité son universalité et transforme une étape souvent synonyme de sacrifice en un manifeste de créativité déculpabilisée.
Andi Galdi Vinko : Sorry I Disappeared I Gave Birth but Now I’m Back
Un livre édité par Trolley Books
Avant propos de Charlotte Jansen
Couverture cartonnée avec dos nu
224 pages
16.5 x 22cm / 6 ½ x 8 2/3 pouces
Graphisme :Emma Scott-Child
ISBN 978-1-907112-68-3
Disponible en librairies et en ligne
