A cinquante miles à l’est de New York, on peut y arriver en ferry ou en bateau-taxi en naviguant sur la Great South Bay, Cherry Grove et Fire Island Pines, deux des 17 communautés saisonnières situées sur la dune de 32 miles de long appelée Fire Island, ont, pour des générations de gays et d’autres à travers les États-Unis et dans le monde entier, représenté une sorte de bord de mer Bizarro World en été, un fantasme de bande dessinée devenu réalité.
Ici, sur des trottoirs gris ondulés et du sable blanchi au soleil, sous un ciel bleu et au bord d’eaux bleu-gris, cette minorité condamnée depuis longtemps, criminalisée pour ses préférences sexuelles, persécutée et exploitée par des hommes de main et des fonctionnaires corrompus, ridiculisée à la fois en public et en privé, toujours attentive au danger et toujours attentive à dissimuler une partie de son essence même, cette communauté pourrait – pour une fois – cesser de regarder nerveusement par-dessus son épaule collective, respirer le bon air marin et vivre l’expérience, ne serait-ce que pour quelques heures heureuses, la liberté enivrante d’être juste «ordinaire».
J’ai eu le privilège de faire partie de ces deux communautés depuis 2006. Je n’ai jamais essayé de documenter systématiquement ces lieux, du moins pas de manière consciente. Je n’ai pas non plus essayé de créer un journal photographique de mon temps passé là-bas. Cependant, au fil des années, j’ai réalisé que mes photographies étaient devenues une sorte de document qui, je crois, raconte une histoire.
J’espère qu’un jour cela deviendra un livre, ma vision personnelle de Fire Island. En regardant ces photos, je veux donner aux gens l’illusion qu’une fois sur place, vous n’avez plus jamais besoin de retourner au travail, vous ne devez jamais descendre du haut vers le bas, vous pouvez rester à votre place, au moins jusqu’à dimanche soir, quand vous devez retourner à– l’autre réalité.
Koitz.
